Ghost Tropic


 


Mercredi 12 Février 2020 à 20h30 – 18ième  Festival

Cinéma Mercury – 16 place Garibaldi – Nice

Film de Bas Devos – Belgique – 2020 – 1h25 – vostf

Au retour d’une journée de travail, Khadija s’endort dans le dernier métro, et se réveille, loin de chez elle, au terminus, à l’autre bout de la ville. Commence alors l’aventure ordinaire d’une nuit d’exception. Khadija, traverse Bruxelles endormie, fait des rencontres, donne de l’aide et en reçoit, le temps unique de toute une nuit, comme un instantané.

Notre article

par Vincent Jourdan

L’aventure est au bout de la ligne. Une ligne de métro qui traverse l’agglomération bruxelloise et qu’emprunte Khadija, l’héroïne du nouveau film de Bas Devos, Ghost Tropic. Une héroïne du quotidien, car Khadija travaille dans une société de nettoyage pour les entreprises. C’est aussi une femme d’une cinquantaine d’année, musulmane qui porte le voile, mais d’une façon très naturelle. C’est aussi une bonne nature. La première scène la montre avec l’équipe de nettoyage, partageant un moment joyeux, où elle est prise d’un irrépressible fou rire. Plus tard, nous en apprendrons plus sur elle, qu’elle est veuve, vit avec sa fille adolescente et qu’elle a un grand fils qui a quitté le foyer.

Nous apprendrons d’autres choses encore car Ghost Tropic est un portrait, un « instantané » comme le décrit le réalisateur, une façon de pénétrer en douceur dans l’intimité et l’intériorité d’une personne d’apparence banale, de ces personnes invisibles que nous côtoyons tous les jours sans y faire attention. Comme nous ne croisons que rarement les personnes qui s’occupent de nettoyer le monde dans lequel nous vivons. Avec la petite équipe, Khadija termine tard et, ce soir-là, s’endort dans la rame qui doit la ramener chez elle. Du coup, elle se retrouve à l’autre bout de la ville à point d’heure et va devoir trouver le moyen de rentrer après le dernier métro. Commence alors une micro odyssée, ponctuée d’événements qui en temps ordinaire ne prêteraient pas à conséquence mais qui, passé minuit, deviennent autant de défis à relever.

On se rappelle de la mécanique implacable qui faisait de la nuit du héros de Martin Scorsese dans After Hours (1985) un vrai cauchemar. Le parcours de Khadija tient plus des déambulations des personnages des premiers films de Wim Wenders, et la mise en scène comme le propos de Bas Devos nous ramènent à la Chantal Ackerman de Jeanne Dielman, 23, quai du commerce, 1080 Bruxelles (1975).

Quand même, c’est la nuit et il va falloir rentrer. Pour notre personnage, il va s’agir de trouver un distributeur pour récupérer de l’argent, tenter de prendre un bus de nuit, se réchauffer par cette nuit glaciale d’hiver en cherchant une station-service encore ouverte dans un univers urbain entre hostilité et indifférence. Mais pas si désert qu’il ne le semble de prime abord. Le parcours de Khadija se ponctue de rencontres, autant d’îlots d’humanité qui mettent à l’épreuve sa bonté naturelle. Un vigile compréhensif, une caissière de station-service accueillante et serviable, un jeune squatter, un voisin soupçonneux (pardon, vigilant), un ambulancier hésitant, deux policiers peu motivés, du personnel hospitalier de garde. Et puis un sans-abri allongé dans le froid qui va susciter chez Khadija compassion et tentative pour le sauver. Et enfin il y aura sa fille, le hasard faisant bien les choses et permettant de passer du général au personnel, de relancer les enjeux de ce « road movie » sans presque de voitures et d’affiner le portrait de cette femme.

A travers ce récit minimal et délicat, Bas Devos fait aussi le portrait d’une ville, Bruxelles, bien loin du centre et des quartiers chargés d’histoire. Béton, asphalte, tours de verre, ensemble urbain comme il y a tant, cette ville prend parfois l’allure d’une cité du futur comme l’Alphaville de Jean-Luc Godard construite sur le Paris moderne de 1965. A côté des sentiments de froid et d’hostilité, créés par le décor, se dégage une curieuse poésie véhiculée par la photographie de Grimm Vandekerckhove qui utilise une pellicule argentique 16mm. Le grain et la lumière très travaillée vont chercher la beauté de cet univers déprimant.

Et comme en écho revient périodiquement l’idée d’un autre monde rêvé, la partie tropicale du titre. Des chants d’oiseaux exotiques se font entendre à plusieurs reprises, une affiche avec palmiers et mer bleu pacifique enjoint de se perdre, « get lost« . Le rêve et l’humanité sont les deux ressorts qui s’opposent à ce monde inhumain destiné à des fantômes, la partie « ghost » du titre. Cette poésie nocturne et cet appel au rêve ouvrent à une réflexion politique. Travailleurs de la nuit, nombreuses personnes d’origine étrangère (l’ambulancier, le vigile, Khadija et certains de ses collègues), services publics toujours sur la brèche, chacun assure une fonction, un infime rouage dans la grande machinerie urbaine. Ils sont pourtant les invisibles, des ombres comme les passagers du bus qui ne partira pas. Devos nous fait voir d’un oeil neuf ce que l’on ne remarque pas au quotidien. Sans jamais rien appuyer, porté par la performance de sa remarquable actrice principale, Saadia Bentaïeb (comédienne de théâtre qui a débuté au cinéma en factrice pour Yves Caumont dans Cachecache (2005), revue chez Roman Polanski, Bertrand Bonello ou Robin Campillo), réalise une oeuvre complexe qui incite à la réflexion, d’une grande rigueur dans la mise en scène. Devos impose un tempo maîtrisé qui prend le temps de donner le temps, de voir la lumière baisser dans un salon, de s’assoupir dans un wagon, de prendre un thé, de rêver à un soleil tropical au coeur de la nuit bruxelloise.

Sur le web

Depuis son diplôme, Bas Devos a réalisé deux courts métrages, The Close et We Know. Son premier long métrage, Violet, a remporté le Prix du Jury à la Berlinale Generations 2014 et a été sélectionné pour New Directors New Films au Moma NY. Son deuxième long métrage, Hellhole, a été sélectionné au Panorama de la Berlinale 2019. Ghost Tropic est son troisième long métrage.

Pour préparer Hellhole, son deuxième long métrage, Bas Devos a passé beaucoup de temps avec des jeunes de la Cité Modèle à Laeken, au nord de Bruxelles. Le metteur en scène explique : « Certains d’entre eux jouent un rôle important dans le film, nous y avons régulièrement répété leurs scènes. Dans la Cité, il m’est souvent arrivé d’engager la conversation avec d’autres habitants. La vie dans ces grandes tours résidentielles piquait ma curiosité. Il y a du chômage et de la pauvreté, mais aussi beaucoup d’énergie et de joie. Et de nombreuses vies ordinaires. Chaque porte, chaque appartement cache un univers, qui reste généralement invisible. Et ce sont les vies les plus invisibles de la cité, celles des mères des garçons, qui m’intriguaient le plus. Qui sont ces femmes, dont la plupart portent des voiles colorés, qui flânent dans la grande cour intérieure avant de disparaître dans l’ascenseur ? Quoi qu’il en soit, la place qu’elles occupent dans notre société est très précaire : à la fois personnes de couleur, souvent musulmanes et femmes. Malgré la très grande distance qui  semblait les séparer de moi, elles se sont avérées parfaitement disposées à me parler.  Certaines femmes que j’ai rencontrées  là-bas jouent un petit rôle dans « Hellhole». Ces femmes ne se laissent pas résumer en quelques généralités. Quelles personnalités  fortes ! Mais leur contexte est souvent très contraignant. Beaucoup d’entre elles sont immigrées de la première ou de la deuxième génération. Elles travaillent souvent comme femme de ménage ou sont femmes au foyer. Ce qui m’a intrigué, c’est qu’elles considèrent  souvent la génération de leurs enfants avec un mélange de méfiance et d’une certaine jalousie bienveillante. Se limiter à constater que leurs enfants sont nés ici, contrairement à elles, ferait  injustice à la grande complexité du rapport à leur foyer et à cette ville. Je remarquais parfois chez certaines de ces femmes l’amorce d’un ricanement quand elles  parlaient de leurs enfants et de leurs mauvais tours. Elles n’approuvaient pas. Mais elles savaient en même temps que ces petites transgressions  montraient justement que leurs enfants vivent réellement ici. Et je crois que cela provoquait  parfois leur jalousie bienveillante. Je pense que certaines d’entre elles se sont réellement effacées au profit de leurs enfants, pour leur offrir des chances que notre société ne leur a jamais offertes. Elles balancent ainsi entre deux mondes : le foyer, qui rappelle le pays d’origine, et le monde de leurs enfants, qui se situe à l’extérieur, dans cette ville impressionnante, hypercompliquée. « 

Avec Ghost Tropic, Bas Devos a voulu parler de cette génération de femmes sous-exposées et sous-représentées à Bruxelles. Il précise : « Le film vise également à en finir avec le caractère fragmentaire de mes deux films précédents. Après Violet et Hellhole, j’avais envie de faire un film qui pourrait être considéré comme un instantané. En l’occurrence, le récit d’une seule nuit. Avec un bref épilogue à une autre époque et un autre endroit. Le temps se déroule de manière linéaire. Les scènes se succèdent de manière fluide. Et enfin, le point de départ de l’intrigue devait être un incident ordinaire, presque banal : une femme, Khadija, s’endort dans le dernier métro en rentrant de son travail et est forcée de traverser Bruxelles à pied en pleine nuit pour rentrer chez elle.Je crois pouvoir réduire la distance entre le spectateur et le personnage de Khadija en  travaillant de manière minimaliste, tant pour la forme que pour le fond. Je veux la rendre visible et tangible. Et j’essaie à cet effet de créer un maximum  d’espace pour la regarder. La simplicité est donc importante pour pouvoir la montrer dans toute sa complexité.Au fil du film, Khadija rencontre une série de personnes. Elles ont toutes en commun avec elle une vie en bas de l’échelle sociale. Un sans-abri, un vigile, des migrants, une pompiste, le gérant d’un magasin de nuit et une infirmière de nuit. Leurs rencontres sont parfois sans paroles, voire de simples observations. Il arrive que des conversations se nouent. Mais il apparaît rapidement que le périple de Khadija est légèrement surréel.  D’ordinaire, cette femme timide ne s’engagerait  jamais dans de telles rencontres. Mais les circonstances l’y obligent et elle semble les considérer comme une chance. Le retour chez elle devient pour elle une petite révolution. Un tournant. Un bond dans l’inconnu. La rencontre la plus significative est celle de sa fille. Quand elle prend sur le fait sa fille adolescente, en escapade nocturne avec quelques garçons, elle en est perturbée. Elle voit chez sa fille un relâchement qu’elle a trop peu connu elle-même. »

La totalité de Ghost Tropic se déroule pendant une nuit glaciale d’hiver, à l’exception de l’épilogue. Tandis que la plupart des gens s’enferment à l’intérieur d’une habitation éclairée et chauffée, Khadija erre dans les rues. Cette absence de lumière et de chaleur est évidemment intéressante sur le plan visuel. Bas Devos confie : « Les caméras numériques d’aujourd’hui nous permettraient parfaitement de voir dans l’obscurité grâce à leur photosensibilité énorme. Mais je veux que la nuit reste tangible comme une réalité écrasante et potentiellement menaçante pour cette femme. Dans ce film elle est très éloignée de sa zone de confort. Voilà pourquoi j’ai tourné ce film en 16 mm. Le grain qu’il fait apparaître rend l’obscurité presque vivante. En même temps, les instants éclairés pourront bénéficier de la douceur et de la chaleur de la pellicule. De manière presque poétique, l’imperfection  du film est une métaphore de la vie de Khadija : vulnérable, vibrante à la lumière, mais effrayée  dans le noir.Le film se déplace dans la ville à  plusieurs vitesses. Au pas de course dans le métro, au pas lent de Khadija, par à-coups dans la voiture qui s’arrête et redémarre  fréquemment. J’apprécie la beauté de ces différences de vitesse et je souhaite les transposer le plus simplement possible. La caméra bouge quand Khadija bouge,  accélère quand elle accélère et s’arrête quand elle s’arrête. La caméra est son  compagnon de route. Elle reste à ses côtés et ne prend du recul qu’occasionnellement, pour montrer un aperçu du chemin qui s’ouvre devant elle. Quand le film se fait plus lyrique, en montrant la ville nocturne et la forêt tropicale  de la fin, une rupture formelle réelle devient alors possible : un flou onirique dans lequel la ville et la jungle semblent se confondre formellement. L’agitation de la ville, de la forêt et du personnage principal bouillonne ainsi à travers les cadrages du reste  plutôt dépouillés. Comme si le contrôle était  abandonné et qu’une fluidité sous-jacente se dévoilait…

… Bruxelles est une composante essentielle de Ghost Tropic. Bas Devos considère cette ville comme un modèle réduit de notre société, où les oppositions sociales et culturelles s’affichent dans la rue. Il explique : « La triste beauté de Bruxelles est qu’elle ne peut pas être dissimulée. Les hommes en costume sur mesure doivent enjamber les sans-abris pour se rendre à leur travail dans le quartier Nord. Certains des habitants les plus pauvres vivent en plein centre-ville. Le plus souvent, la ville n’est toutefois que le décor de l’histoire. Dans ce film, c’est la traversée de la ville qui est porteuse de sens. Cette traversée en métro, en bus, en voiture et surtout à pied, est en même temps une traversée de la diversité extrême de toutes ces vies qui font de la ville ce qu’elle est. Bruxelles est mon foyer depuis près de 20 ans. La ville me reste pourtant toujours en partie inconnue. Comme si elle était insaisissable. Comme si elle flottait devant mes yeux, tantôt nette, tantôt floue. C’est cette informité apparente qui rend cette ville tellement intéressante du point de vue cinématographique. Elle peut être à la fois familière et mystérieuse. Et le périple de Khadija reflète cette caractéristique : à la fois, ordinaire et étrange, magique. »

Le film a été présenté à la Quinzaine des Réalisateurs au Festival de Cannes 2019.

«Avec justesse et poésie, Bas Devos dépeint les rencontres nocturnes faites par une femme de ménage après s’être assoupie dans le métro bruxellois. C’est, apparemment, une histoire simple comme un conte. Une femme de ménage, Khadija (Saadia Bentaïeb), s’endort dans le dernier métro et se réveille au terminus de la ligne, à l’autre bout de Bruxelles. Ne trouvant pas d’autre moyen de rentrer, il lui reste à traverser des lieux plus ou moins inhospitaliers et abandonnés, loin du centre-ville. Elle y fait des rencontres fugaces, en se montrant à chaque fois d’une générosité discrète. Le monde nocturne qu’elle découvre est comme la marge du jour. Il est peuplé de ceux que l’on ne regarde pas, ou mal – les sans-abri, les immigrés du Sud ou de l’Est, les vigiles, les adolescentes délaissées. Ou par ceux qui se cachent et que la nuit autorise à vivre un peu plus : les clandestins. Si cette femme est spontanément compatissante avec eux, c’est qu’elle sait être des leurs. Au fond, cette nuit-là, elle découvre le monde secret auquel elle appartient elle-même, qui nettoie le soir les déchets des travailleurs diurnes.

Ghost Tropic, troisième film du Belge Bas Devos, pourrait sembler un peu candide s’il ne démontrait pas aussi que la bonté n’est ni innocente ni miraculeuse, qu’elle peut même amener à dénoncer son prochain et qu’elle ne sauve pas forcément une vie. Car la nuit, les portes et les rues ne cessent pas d’être surveillées et contrôlées, même si leurs gardiens sont plus relâchés et tolérants que ceux du jour. On y laisse encore les oiseaux en cage et on y attache les chiens. Mais le dire ainsi, c’est rendre le film plus métaphorique qu’il ne l’est véritablement. Parce qu’il se déroule de nuit, il ressemble certes parfois à un rêve éveillé et, effectivement, comme le suggère le titre, il est traversé par des êtres un peu fantomatiques. Mais il ne se réduit pourtant pas à une gentille allégorie noyant le poisson social dans une brume semi-fantastique. Il est plus précis et concret que cela : sa nuit construit un espace et un temps permettant à cette marge du monde diurne, légal et productif, d’exister autrement. Une nuit pour voir des invisibles, en quelque sorte. Et ça n’est pas simplement plus poétique ou beau que le tout-venant du cinéma dit «social», c’est aussi plus juste.

Car cette étrangeté est une façon de se préserver des archétypes en maintenant du mystère : si ce clochard, ce clandestin, ce chien, ce vigile ou même ces policiers ne sont pas réductibles aux mots par lesquels on les désigne ici, c’est justement parce que la dimension quasi onirique du film sait les maintenir dans leur singularité fondamentale. Parce qu’il est belge et nocturne, beaucoup ont déjà comparé Ghost Tropic au magnifique Toute une nuit de Chantal Akerman. Ça n’est pas faux, mais on a plutôt pensé à une référence apparemment plus lointaine : l’Autre Côté de l’espoir, d’Aki Kaurismäki, un autre film opposant la nuit aux clichés véristes pour montrer autrement ceux que les actualités condamnent aux généralités.» (liberation.fr)

…«Ghost Tropic est une longue balade nocturne, la traversée d’une ville presque onirique, où la vie se tisse à travers des rencontres furtives et des éclats de liens. Un film d’une grande délicatesse, doux comme la lente épiphanie de l’imperceptible tendresse du monde… Ghost Tropic s’en va dérouler sa narration très épurée vers une aube que sa banalité même rend presque miraculeuse. Et qui laisse apaisé. La femme qui rit le plus se nomme Khadija. Sa différence se figure dans le foulard qu’elle met sur ses cheveux. C’est elle que le film va suivre et ne plus quitter. Après cette nuit de travail qui s’achève, elle rentre chez elle dans la nuit désertée. Le plan fixe la saisit immobile sur la ville qui défile derrière la vitre du métro. Une ville aux couleurs contrastées, denses, sombres, jamais glauques pourtant. Sa tête doucement dodeline, ses paupières se ferment. Elle s’endort. Et se réveille au loin, perdue dans une partie de la ville qu’elle ne connaît pas. Il va falloir rentrer. Commence alors une longue odyssée nocturne semée de retards et de détours. Son chemin avance lentement à travers un monde peuplé d’étrangers, de petites gens, de travailleurs épuisés et de déshérités, au gré de furtives rencontres qui tissent petites solidarités ou discrètes inimitiés.

Pas un instant, la ville déserte et sombre n’est menaçante. Rien de spectaculaire dans Ghost Tropic. Tout repose sur cette attention minutieuse que le film réclamait dès le départ. Il avance de tableau en tableau, fait glisser les ombres en dehors de la nuit, multiplie les trouées lointaines de lumières. Il travaille ses contrastes par gamme de couleur, frôlant sans cesse la peinture, privilégiant dans la nuit les jaunes, les ocres, les oranges. Cette minutie, cette attention délicate fait basculer très doucement cette nuit qui n’en finit pas dans un flottement temporel un peu fantomatique où la ville s’étiole, se diffracte dans des espaces déréalisés. Et dans ce Bruxelles presque onirique, Khadija veille, modestement, sur ceux qu’elle croise, ceux qu’elle aime. Construit sur des ellipses et tissé sur une trame narrative très simple, le film dresse peu à peu le portrait d’une femme courageuse et droite, qui éclaire la nuit d’un peu de paix et d’espoir.

À travers son errance et son regard, surgit par petites touches le portrait d’une ville peuplée de mille nationalités, construite par les efforts de ce peuple discret et laborieux qui fait face à la nuit et l’éclaire doucement. C’est à ce dur métier d’exister et d’habiter les ombres, à ces hommes et ces femmes tout à fait communs et pourtant braves, que Ghost Tropic rend une sorte d’hommage. Parce que l’infime miracle est là, peut-être, dans cette ténacité qui permet de chaque jour s’éveiller et veiller, depuis sa place, inlassablement et délicatement, sur le monde qui nous entoure.» (cinergie.be)


Présentation du film et animation du débat avec le public : Vincent Jourdan.

Merci de continuer à arriver suffisamment à l’avance pour être dans votre fauteuil à 20h30 précises.

Entrée : 8 € (non adhérents), 5,50 € (adhérents). Adhésion : 20 € (5 € pour les étudiants) . Donne droit au tarif réduit à toutes les manifestations de CSF, et à l’accès (gratuit) au CinémAtelier et à l’atelier Super 8. Toutes les informations sur le fonctionnement de votre ciné-club ici


 

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