Wallace et Gromit, Le Mystère du Lapin-Garou



Vendredi 23 décembre 2005 à 20h45

Cinéma Mercury – 16 place Garibaldi – Nice

Animation de Nick Park et Steve Box – Royaume-Uni – USA – 2003 – 1h25 – vostf

Une « fièvre végétarienne » intense règne dans la petite ville de Wallace et Gromit, et l’ingénieux duo a mis à profit cet engouement en inventant un produit anti-nuisibles humain et écolo, qui épargne la vie des lapins. L’astuce consiste simplement à capturer, à la main, un maximum de ces rongeurs et à les mettre en cage. A quelques jours du Grand Concours Annuel de Légumes, les affaires de Wallace et Gromit n’ont jamais été aussi florissantes, et tout irait pour le mieux dans le meilleur des mondes, si un lapin-garou géant ne venait soudain s’attaquer aux sacro-saints potagers de la ville. Pour faire face à ce péril inédit, l’organisatrice du concours, Lady Tottington, se tourne vers nos deux « spécialistes » et leur demande d’appréhender le monstre.

Notre critique

Par Philippe Serve

Wallace (dont on ne connaît que le prénom et l’adresse au 62, West Wallaby Street) est Anglais. Un vrai, un pur, de la tête (prolongée latéralement par deux oreilles décollées et fendue par une bouche exhibant une dentition très… heu… très britannique) aux pieds volontiers chaussés de charentaises, en passant par les éternels pantalons de velours côtelé marron, le tricot de laine vert sans manches sur une chemise blanche assortie d’une cravate (parfois d’un nœud papillon) invariablement rouge. Le front très dégarni, Wallace a deux obsessions dans la vie : le fromage – du Weyersdale (devenu simple Cheddar en français, facilité de prononciation oblige sans doute) accompagné de crackers, et les inventions. De toutes sortes, plus farfelues, délirantes, géniales et inutiles les unes que les autres mais qui, à un moment ou un autre, finissent toujours par trahir ce lointain cousin de Géo Trouvetou et du Professeur Tournesol.

Pour l’aider dans ses tâches quotidiennes, il y a Gromit. Son meilleur ami. Certains prétendent que Gromit est un chien. Pas sûr, cependant. Gromit serait plutôt… gromitois. Car il n’y en a pas deux comme lui. Doté d’une telligence que l’on devine sans peine au-dessus de la moyenne (il lit Dogstoievsky et La République de Plato), expert en électricité et toutes sortes de bricolages, Gromit est aussi doté d’un courage peu commun. Oh, certes, il ne parle pas ! Mais nul besoin car ses yeux, ses oreilles, ses sourcils froncés ou levés, son front, bref tout son être parlent mieux que de longs discours. Gromit, disons-le sans peur d’être contredit, est la vraie star des trois courts métrages et du premier long qu’est ce Mystère du Lapin-Garou. Quiconque l’a vu précédemment être chassé de chez lui par un méchant et sournois pingouin, le visage couvert de larmes sous son ciré jaune, le baluchon sur l’épaule, n’a pu lui résister. Mais ce tendre et fidèle ami dont le destin semble être de sauver Wallace des pires situations, sait aussi se transformer en un extraordinaire aventurier. A pied, en voiture, en side-car ou en avion (avec un grand clin d’œil à Snoopy combattant le Baron Rouge), Gromit réussit à en remontrer à Douglas Fairbanks, Errol Flynn et Harrison Ford réunis. J’en connais que leur rencontre avec Gromit a rendu gaga, fan absolu. Gromit, drogue dure ? Carrément !

Le génie de ces aventures est donc d’inverser le schéma habituel. Alors que Milou sert de fairevaloir à Tintin, ici Wallace ne semble programmé aux sempiternelles bêtises et gaffes que pour mieux glorifier son compagnon. Ajoutons aux qualités de Gromit une modestie à toute épreuve. Même pas cabot pour un sou ! Et d’une docilité… Pourtant il faut voir à quoi l’oblige Wallace ! (Un excellent moyen : déguster avec délectation les dix petits épisodes de deux minutes chacun nommés « Cracking Contraptions« ). Malmené à toutes les sauces, forcé d’assister aux transformations les plus imprévues de Wallace qui tombe, my goodness ! amoureux d’une certaine Gwendolene dans A Close Shave (Rasé de près) voire pire encore, Gromit poussera un soupir, lèvera les yeux au ciel, un brin désapprobateur, et se remettra au boulot : sauver la mise à son maître et ami…

L’irruption dans nos vies de ce « couple » dont on a toujours peine à croire qu’il se meut en pâte à modeler (de la plasticine, à raison de 2,8 tonnes par semaine de tournage) et ne mesure que quelques centimètres fut, à n’en pas douter, l’un des plus joyeux événements de 1989. A vrai dire, la plupart d’entre nous ne les découvrirent pas avant leur deuxième aventure, l’oscarisé The Wrong Trousers (Un Mauvais Pantalon, 1993). Deux ans plus tard et un nouvel Oscar en poche, nos deux amis et leur papa, le génial Nick Park, décidèrent que 30 minutes, c’était vraiment trop court et que leurs aventures méritaient bien un long-métrage. Les poules de Chicken Run avaient montré la voie, ne restait plus qu’à travailler pendant cinq ans, à raison de deux à trois secondes d’animation tournées image par image… par jour. Une entreprise titanesque s’étalant sur cinq longues années…

Associé depuis Chicken Run à DreamWorks, la compagnie de Steven Spielberg (qui vient d’être rachetée par la Paramount), les Studios Aardman de Nick Park ont largement gagné leur pari. Le passage du format court au long n’a en rien fait perdre à Wallace et Gromit  leur charme et, pour tout dire, leur génie. Sachant les entourer de personnages secondaires aussi mémorables que les précédents Pingouin ou Shaun, le mouton craquant, ils ont pu bénéficier d’acteurs de premier plan pour doubler les voix : Helena Bonham-Carter pour Lady Campanula Tottington, grande châtelaine dans la meilleure tradition anglaise, et Ralph Fiennes pour le fourbe Victor Quartermaine. Se priver des divers et irrésistibles accents parsemant ce film, sans parler de la voix de Wallace, aurait été une grande faute de goût de notre part et c’est pourquoi nous avons décidé, seuls à Nice, de vous le  présenter en version originale sous-titrée.

Pour la première fois, une part non négligeable de l’animation (mais complètement minoritaire en regard de celle « à la main« ) a été réalisée grâce à des effets spéciaux numériques : brouillard, bonds dans l’espace de lapins… Mais le goût de l’authentique est si collé au corps et au cœur de Nick Park et de ses collaborateurs qu’ils ont quand même reproduit, même dans ces plans, les marques d’empreintes de doigts sur la plasticine qui participent à la légende des tournages de Wallace et Gromit !

Le Mystère du Lapin-Garou enchantera aussi les cinéphiles amoureux de ces bons vieux films d’horreur comme savait si bien les trousser le fameux studio anglais de la Hammer dans les années 50-60. On y retrouve tous les ingrédients, mais si l’on tremble ici, c’est de rire ! Bien avant 7 ans et bien après 77…

Sur le web

Le Mystère du lapin-garou est le premier long-métrage mettant en scène les célèbres personnages de pâte à modeler Wallace et Gromit. Nick Park, leur créateur, n’avait en effet réalisé que trois courts métrages avec eux auparavant : Une grande excursion, Un mauvais pantalon et Rasé de près. Ces deux derniers ont par ailleurs remporté l’Oscar du meilleur court-métrage d’animation, respectivement en 1994 et 1996.  » Réaliser un Wallace & Gromit de 30 minutes exige déjà énormément de temps, de soin et de patience, explique Nick Park. Un long métrage de 85 minutes revient à bâtir… la Muraille de Chine avec des allumettes ! Il a fallu cinq ans d’efforts ininterrompus, parce que chaque détail compte, y compris les plus minuscules. Je pense toutefois que le défi majeur fut d’inventer l’intrigue qui nous permettrait de passer d’un coup de 30 minutes à 85.« 

Wallace et Gromit le mystère du lapin-garou est la deuxième collaboration entre les studios Aardman et DreamWorks Animation après Chicken Run. A cette occasion, Mark Burton, l’un des scénaristes de Madagascar (produit par DreamWorks), est venu participer à l’élaboration du script.

Animateur sur Un mauvais pantalon et Rasé de près, Steve Box fut choisi comme co-réalisateur du Mystère du lapin-garou aux cotés de Nick Park, faisant ainsi son entrée dans le long métrage.

 » Les films de Wallace & Gromit ont toujours fait référence à d’autres genres cinématographiques, avoue Nick Park. Nous étions ravis d’adresser ce clin d’oeil aux films d’horreur Universal des années trente et quarante. Leur fameux Loup-Garou devient ici un Lapin-Garou, qui au lieu de dévorer des êtres de chair et de sang, s’en prend aux… légumes. Et c’est ainsi que Wallace et Gromit le mystère du lapin-garou est devenu le premier film d’horreur végétarien de l’histoire du cinéma. « 

Chaque figurine utilisée dans le film est constituée d’un squelette métallique recouvert d’une pâte à modeler spéciale (l’Aard-mix), plus résistante que la pâte à modeler courante. A l’inverse des figurines de Chicken Run dont la texture était parfaitement lisse, celles du Mystère du lapin garou conservent quelques imperfections visant à renforcer le côté artisinal qui fait le charme des films de Wallace et Gromit.

La plupart des figurines étaient dupliquées dans diverses poses et costumes. Plus de 35 versions de Wallace ont été ainsi réalisées, et plus d’une douzaine pour Lady Tottington et Victor. Une fois la fabrication des figurines achevées, elles étaient livrées aux 30 animateurs « clés » et assistants animateurs.

Un geste ou un seul déplacement de personnage demande jusqu’à 24 postures par secondes. L’équipe d’animateurs, qui travaillait sur plus de 30 plateaux en même temps, ne pouvait ainsi totaliser plus de dix secondes utiles par jour de tournage.

La figurine du chien Gromit est celle qui a posé le plus de problèmes aux animateurs. Toutes ses pensées et émotions devaient être exprimées par ses mimiques et son langage corporel :  » Gromit me fait penser à un acteur du muet, explique la comédienne Helena Bonham Carter. Il n’a pas besoin de parler, car l’on sait toujours exactement ce qu’il est en train de penser. À bien y réfléchir, c’est peut-être le plus grand comédien de tous les temps ! « 

La figurine du lapin-garou posa elle aussi beaucoup de problèmes aux animateurs. Sa fourrure soyeuse interdisait de le toucher, sous peine d’y laisser des traces de doigts. Pour résoudre ce casse-tête, les animateurs fixaient dans le dos de la figurine de petits leviers actionnant une délicate machinerie interne. Les dimensions et le poids de la figurine, sensiblement supérieurs à la moyenne, posèrent encore d’autres problèmes : »Chaque mouvement imposait à l’armature un supplément d’effort et « fatiguait » davantage le revêtement« , explique l’animateur clé Ian Whitlock. « La moindre impulsion demandait de notre part une énergie considérable, ce qui était en contradiction avec la fluidité et la grâce recherchées. »

Pour la première fois dans l’histoire des studios Aardman, Nick Park décida de faire appel à l’imagerie numérique afin de compléter certains plans :  » La pâte à modeler est un matériau limité, qui vous interdit, par exemple, de simuler l’eau, la fumée, le brouillard. C’est pour cela que nous avons demandé à la Moving Picture Company (MPC) de créer les effets visuels du mystère du lapin-garou… Il est loin le temps héroïque où nous nous efforcions de créer ce genre d’effet en agitant des petites boules de coton au bout d’un fil ! « 

L‘équipe de décorateurs a dû recréer plus de 700 légumes en plâtre ainsi qu’une centaine de plantes pour conférer le maximum d’authenticité au parc, à la forêt voisine et aux serres de Lady Tottington. Les outils de jardinages sont, quant à eux, pleinement opérationnels, de même que le Van de Wallace et Gromit, un modèle réduit d’Austin 35 dont chaque accessoire (phares, pneus, coffre) devait fonctionner comme dans une vraie voiture. Enfin, toutes les tapisseries ornant les murs de Tottington hall ont été peintes à la main.

Déjà compositeur des musiques des premiers courts-métrages de Wallace et Gromit, Julian Nott a aussi signé la partition du Mystère du lapin-garou. Pour cela, il a été aidé par Hans Zimmer, directeur de du département  » musique de film  » de Dreamworks et compositeur, entre autres, des bandes-originales de Gladiator et du Roi Lion. Ce dernier a en effet supervisé la production musicale du film : »Il fallait coller à l’essence de Wallace & Gromit, explique le célèbre compositeur. Le Mystère du lapin-garou possède les atouts d’un long métrage, mais il préserve ce côté artisanal qui me semble très important. Nous avons disposé de moyens considérables, mais nous avons tenu à ce que ce film semble être l’oeuvre de deux gus qui n’auraient jamais quitté leur petit atelier de Bristol. Il fallait préserver cet aspect « bricolé », car c’est bel et bien là que réside le charme de Wallace & Gromit « .


Présentation du film et animation du débat avec le public : Philippe Serve.

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