Bloody sunday



Vendredi 31 janvier 2003 à 20h45

Cinéma Mercury – 16 place Garibaldi – Nice

Film de Paul Greengrass – Royaume-Uni – 2002 – 1h47 – vostf

Le dimanche 30 janvier 1972, à Derry, en Irlande du Nord, Ivan Cooper est l’organisateur d’une marche pacifique pour l’égalité des droits entre catholiques et protestants, farouchement déterminés à éviter toute violence entre les différents protagonistes. Mais malgré son dialogue avec les autorités unionistes et ses tentatives de négociation avec les forces de l’ordre britanniques, la manifestation se transforme en émeute : treize personnes sont tuées par l’armée. Cette journée, désormais inscrite dans l’Histoire sous le nom de Bloody Sunday, marque le début de la guerre civile.

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Paul Greengrass est un ancien journaliste. En 1982, dix ans après le « Bloody Sunday », il est le premier à réussir à interroger en prison les membres de l’I.R.A. grévistes de la faim pour obtenir le statut de prisonnier politique et non celui de terroriste. Le gouvernement britannique est alors dirigé par Margaret Thatcher qui refuse d’entendre leurs revendications. Une dizaine de grévistes perdra la vie dans cette lutte (voir Some mothers’s sons de Terry George, film irlandais sur ces événements). Paul Greengrass reçoit le témoignage de Raymond McCartney, qui avait manifesté le 30 janvier 1972. Il s’était engagé dans la lutte clandestine le lendemain du « Boody Sunday ». Ce récit marque fortement Greengrass.

Le titre Bloody sunday fait référence au dimanche 30 janvier 1972 durant lequel à Derry en Irlande du Nord, l’armée britannique ouvrit le feu sur une marche organisée par le Mouvement des droits civiques d’Irlande du Nord. De récentes enquêtes ont montré que les forces de l’ordre ne se sont pas contentées de réprimer les provocations et la violence de la foule. Cette journée devait servir d’exemple. L’objectif était initialement d’arrêter 500 personnes. Ces événements tragiques marquent le début d’une véritable guerre civile en Irlande. Ils ont inspiré la chanson de U2 Sunday bloody, sunday.

Paul Greengrass revient sur sa volonté de faire un film pour les deux camps opposés lors des incidents: « Bloody sunday est avant tout un film qui s’adresse autant aux Irlandais qu’aux Britanniques. C’est un enjeu de taille. Je ne sais pas si cela est totalement perceptible pour vous, mais le « Bloody Sunday » est un tel symbole! Chaque partie a sa version de l’histoire. Il n’existe aucun récit commun du « Bloody sunday ». Il y a le point de vue des anglais et il y a le point de vue des irlandais. Et ils ne se rencontrent pas. Dans ce sens, oui, c’est un film qui offre une nouvelle donne. » Bloody sunday est une coproduction entre la Grande-Bretagne et l’Irlande, avec l’intervention financière des aides publiques des deux pays.

Paul Greengrass explique comment le travail de Gillo Pontecorvo a influencé le sien: « Lorsque j’ai commencé à réflechir à ce que serait Bloody sunday, j’ai revu La Bataille d’Alger (1966). La puissance du film reste intacte. Il démontre que la guérilla est peut-être le seul moyen de se libérer de l’oppression. Il a été tourné avant les événénements les plus tragiques. Il les annonçait, et il en est aujourd’hui l’écho. Dans Bloody sunday, mon propos devait être différent. Je ne pouvais pas signer un film militant, en tout cas engagé d’un côté ou de l’autre. A la différence de La Bataille d’alger qui exalte la victoire de l’idéalisme, Bloody sunday raconte sa triste défaite. »

«Le film commence par deux conférences de presse symétriques : celle d’Ivan Cooper, bien décidé à manifester pacifiquement, et celle du commandant des parachutistes britanniques, résolu à empêcher toute manifestation contestant les autorités en place. Deux logiques opposées ne pouvant mener inexorablement qu’au clash final. C’est dans cette spirale infernale que nous entraîne Paul Greengrass, caméra à l’épaule, pendant presque deux heures. La pellicule 35mm au grain rugueux nous permet de capturer les moindres émotions, hésitations ou doutes des comédiens en tout point parfaits – une grande partie des figurants ont réellement vécu ces évènements. Le style employé emprunte donc beaucoup à la technique du documentaire et à celle d’un travail journalistique à la manière d’un reportage de guerre. Le propos et les moyens utilisés s’y prêtent parfaitement. Ce parti pris formel n’est absolument pas gratuit, on l’aura compris. Tout est là pour nous décrire le terrible engrenage de la violence, violence qui au final ne pourra que s’auto-engendrer. L’actualité, jour après jour, nous rappelle à quel point nous restons concernés. C’est pour tout cela que ce film agit comme un électrochoc politique et nous remue jusqu’au fond des tripes.» (avoir-alire.com)

«Ce qui reste dans les mémoires comme le « Bloody Sunday » est une plaie encore ouverte dans l’histoire irlandaise, et une tache indélébile sur la conscience de l’Etat britannique. « Tirer sur le peuple » a toujours été le tourment et la grande question des nations déchirées par des mouvements contraires. L’Angleterre, qui a longtemps gardé une conception monarchique de l’ordre, n’a pas encore clarifié l’attitude de ses gouvernements successifs dans le conflit irlandais, et n’a jamais inquiété les responsables du « Bloody Sunday ». Trente ans plus tard et contre toute évidence, les abus n’ont toujours pas été admis ni les meurtres reconnus comme tels.

La monstruosité de ce carnage tragique et arbitraire perpétré par une bande de soudards incontrôlables, relève d’une violence archaïque, presque anachronique. Le film de Paul Greengrass s’offre à l’analyse comme un reportage classique, mis en scène avec autant de foi que de virulence, mais s’en tient à un effet de réel quelque peu stérile. C’est le « on s’y croirait » du Soldat Ryan, tout l’énergie est concentrée sur la réalité de l’événement. Dommage que l’invention n’apporte pas, comme elle le devrait, un surcroît de vérité. Est-ce vraiment le rôle d’un cinéaste de fixer sur la pellicule une saisie télévisuelle, de faire « rejouer » un drame moins passionnant dans son déroulement que dans son résultat symbolique ? Le spectateur n’a ici aucune latitude pour lui donner un sens moderne, à l’heure où tant de conflits analogues envahissent l’actualité…» (chronicart.com)

Paul Greengrass explique comment il en est venu à avoir l’idée de réaliser un film sur le Bloody Sunday: « En 1999, avec Mark Redhead, nous avons traité du meurtre raciste d’un jeune noir dans The Murder of Stephen Lawrence. Et nous avons voulu aller plus loin, en faisant un film sur notre pays, la Grande-Bretagne. Trente ans après à l’initiative de Tony Blair, une nouvelle enquête s’ouvrait sur les événements d’Irlande du Nord. Le sujet s’est donc imposé de lui-même.« 

L’interêt de Paul Greengrass pour le conflit nord-irlandais n’est pas nouveau comme nous l’explique le producteur exécutif de Bloody sunday, Mark Redhead: « Paul, alors jeune reporter pour World in Action, avait été en 1982 le tout premier journaliste à interviewer les membres emprisonnés de l’IRA grévistes de la faim. L’image de l’un d’entre eux, Raymond MacCartney, avec sa barbe et ses yeux exorbités, est un symbole inoubliable de cette guerre. Paul restait depuis hanté par cet homme, originaire de Derry, engagé dans la lutte clandestine armé au lendemain du « Bloody sunday », où les balles de paras avaient atteint 28 innocents marchant avec lui et tué 13 d’entre eux.« 

Le cinéaste irlandais Jim Sheridan qui a abordé le conflit nord-irlandais dans Au nom du père, sur un délinquant accusé d’actes terroristes en Irlande du Nord, et The Boxer est un des producteurs de Bloody sunday.

Pour de nombreux rôles du film, Paul Greengrass a choisi d’avoir recours à des acteurs non professionnels ayant vécus l’événement: « Le tournage a mis en présence des gens qui étaient ennemis en temps de guerre: des habitants de Derry ayant défilé dans le Bloody Sunday, certains dont la famille a été endeuillée, et d’anciens membres des forces militaires britanniques. A quelques exceptions près, les Anglais du film sont tous des anciens soldats, ayant servi en Irlande duNord. Beaucoup de souvenirs douloureux, donc. Mais l’élan était commun.« 

Bloody sunday a été présenté en sélection officielle à Berlin où il a reçu l’Ours d’or ex-aequo avec Le Voyage de Chihiro.


Présentation du film et animation du débat avec le public : Philippe Serve.

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