Samedi 16 juin 2012 à 20h30
Film de Djo Tunda Wa Munga – Congo – 2010 – 1h38 – vostf
Kinshasa, où la vie nocturne voluptueuse et trépidante semble toujours prête à engloutir le temps. Quelques rares privilégiés y mènent la grande vie, au mépris de tous les laissés-pour-compte. Ceux qui n’ont rien envient ceux qui ont tout et ils n’aspirent qu’à une seule chose : devenir les nouveaux maîtres de la nuit. Riva est l’un de ces rêveurs. Il rentre plein aux as après dix ans d’absence, bien déterminé à s’offrir, avec son vieux copain J.M., une folle nuit de beuverie, de danse et de débauche. Reine de la nuit, mystérieuse et distante, Nora danse et Riva est subjugué. La belle appartient à un caïd local, mais Riva s’en moque : il lui faut cette fille. Aura-t-il sa chance ? Son argent, Riva l’a « emprunté » à son ex-patron, un truand angolais qui le poursuit à travers la ville en semant la panique sur son passage. Au point du jour, le rêve se transforme en cauchemar : après son heure de gloire, Riva finit sa course dans un recoin sordide de la ville…
Notre critique
Par Josiane Scoleri
Avec Viva Riva, nous sommes de plein pied dans l’Afrique d’aujourd’hui : urbaine, violente, électrique, éclatée. Kinshasa, la capitale du Congo nous est montrée comme le lieu du chaos même. Pas étonnant que le premier film tourné au Congo depuis 25 ans soit un film de gangsters tourné sur un rythme trépidant qui n’a rien à envier au Chicago des années 30. Tous les canons du genre sont là : le gangster au petit pied, le vrai chef de gang, le big boss et bien sûr la femme fatale. Mais ce qui est intéressant dans Viva Riva!, c’est justement l’appropriation par un cinéaste africain -dont c’est qui plus est – le premier long-métrage de fiction, de tous les codes d’un des genres hollywoodiens par excellence pour nous parler sans ménagement de la situation de son pays aujourd’hui.
Dio Tunga Wa Munga vient du documentaire et ça se sent. Cela permet au réalisateur de ne pas se cantonner justement à une histoire qui ne vaudrait que par le suspense dun bon thriller, avec son lot obligatoire de coups de feu, de poursuites et de scènes de sexe. Il est clair que Dio Tunga Wa Munga sacrifie volontiers aux lois de genre avec l’ambition de conquérir un large public en le tenant en haleine de bout en bout.. Mais, il ne s’arrête pas là. Car cette histoire des bas-fonds joue tout autant, voire surtout le rôle de révélateur d’une société á la dérive, profondément déchirée, caractérisée par la violence des rapports sociaux et des rapports humains en général. (cf la scène de retrouvailles entre Riva et sa mère par exemple). La corruption qui règne à tous les étages de la police et de l’adminstration est montrée brut de décoffrage et l’obsession de l’argent, l’argent, l’argent comme disait déjà Oumarou Ganda à la fois dans « Moi, un Noir » et dans Cabascabo brouille entre temps toutes les pistes et balaye d’un revers de la main toute velleité de morale.
« L’argent finit toujours par t’empoisonner » dit Nora au cœur des embrouilles. Voilà une phrase qui fait écho très fort aujourd´hui -au-delà de l’intrigue du film et du propos du réalisateur- de ce côté -ci de la Méditrerranée.
Sur le web
Malgré le manque de moyens du projet et les nombreux acteurs amateurs du film (Marlene Longange, Diplome Amekindra, Alex Herabo, etc.), Viva Riva ! compte dans ses rangs des comédiens professionnels non négligeables, parmi lesquels Manie Malone (l’interprète de Nora), que l’on a pu voir dans les séries françaises Femmes de Loi et Braquo, ou encore Hoji Fortuna (Pan Am, la nouvelle série ABC, aux côtés de Christina Ricci).
Le film montre des scènes de sexe osées, conformément à la volonté du réalisateur Djo Tunda Wa Munga. Or, le sexe est encore un sujet très tabou dans la plus grande partie des pays africains, raison qui explique sans doute pourquoi ce long-métrage n’est pas diffusé dans son propre pays, en République Démocratique du Congo. Le cinéaste confesse d’ailleurs avoir eu du mal à trouver des actrices locales prêtes à se dénuder.Le film a été interdit au moins de 12 ans.
Le film a été tourné en français, mais aussi en lingala, qui est la langue la plus parlée au Congo actuellement. Cette particularité en fait le premier film tourné en lingala ! Pour retraduire l’ambiance chaotique et intense du film, Djo Tunda Wa Munga a misé sur l’importance de la musique congolaise, entre passion, fureur et mélancolie.
Il aura ainsi fallu attendre plus de 20 ans entre Viva Riva ! et La Vie est belle de Mweze Ngangura et Benoit Lamy, dernier film congolais en date (1987). Djo Tunda Wa Munga, qui déplore ce manque de développement de l’industrie congolaise, espère relancer la culture cinématographique dans son pays avec son film. Originaire de Kinshasa, il a voulu pousser un cri de révolte et alerter l’opinion publique quant à la situation critique de son pays à l’heure actuelle. Il déclare : « Ces vingt dernières années ont été mouvementées pour les Kinois, qui ont enduré tout ce qu’on peut imaginer de pire (…) Le temps est venu d’en évoquer certains aspects, connus de tous mais dont personne ne parle« . Avec ce film, il veut donc montrer la violence et la corruption qui règnent au Congo. Pour l’écriture de son scénario, il s’est d’ailleurs inspiré de l’histoire de vrais contrebandiers.
Viva Riva !, défini par son réalisateur comme « un polar moderne en forme de course-poursuite« , est reparti avec six récompenses lors des African Movie Academy Awards 2011, dont le prix du Meilleur film et du Meilleur réalisateur !
Présentation du film et animation du débat avec le public : Josiane Scoleri.
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