Les promesses d’Hasan



Vendredi 09 Septembre 2022 à 20h

Cinéma Jean-Paul Belmondo (ex-Mercury) – 16 place Garibaldi – Nice

Film de Semih Kaplanoglu, Turquie, 2021, 2h 27min, vostf

Lorsque Hasan apprend qu’un pylône électrique va être installé sur les terres qu’il cultive, il manœuvre afin que son champ soit épargné. Mais avant de partir en pèlerinage à la Mecque, il promet à sa femme de réparer ses erreurs passées.

Né à Izmir, en Turquie, en 1963, Semih Kaplanoğlu fait partie des scénaristes-réalisateurs-producteurs les plus populaires de sa génération.

En 1984, il est diplômé de l’Université d’Izmir en Cinéma-Télévision.

En 2001, il réalise son premier film Away From Home et reçoit le prix du Meilleur Réalisateur au Festival International du Film de Singapour. Il crée alors la société de production Kaplan Film et commence à développer des coproductions qui connaitront des succès à l’international.

En 2005, son deuxième film Angel’s Fall est sélectionné à la Berlinale et reçoit le prix du Meilleur film au Festival du Film Indépendant de Nantes, Kerala et Barcelone. Son troisième film Œuf, présenté à Cannes à La Quinzaine des réalisateurs, reçoit le Prix de la Meilleure réalisation aux Festivals du film de Téhéran, Valdivia et Bangkok. Le film recevra en tout une trentaine de récompenses, dont certains prix prestigieux comme les Golden Orange (au festival du Film de Antalya) et le Golden Tulip (au Festival du Film de Istanbul). Ce film est la première partie de la trilogie «Yusuf Trilogy» qui fait de Semih Kaplanoğlu un réalisateur mondialement reconnu.

En 2008 le film Le lait, porté par la Ciné-fondation, est sélectionné au festival de Venise en Compétition officielle et projeté dans plusieurs festivals autour du monde où il reçoit plusieurs récompenses dont le prix Fipresci au Festival International de Istanbul. Miel, la troisième partie de la trilogie «Yusuf Trilogy», qui est récompensée par l’Ours d’Or à la 60ème Berlinale, retrace les origines d’une âme.

En 2013 Kaplanoğlu est invité au Festival de Cannes en tant que membre de la Ciné-fondation et du Jury pour les courts métrages. Le film La Particule humaine sorti en 2017, reçoit le Prix du meilleur film au 30ème Festival de Tokyo. Il commence en 2018 un nouveau projet, «Commitment trilogy».

En 2019, Commitment Asli, nominé au Academy Award de Turquie, est le premier film digital du réalisateur.

En 2020, la sortie des Promesses d’Hasan se voit bloquée à cause de la fermeture des salles due à la pandémie.

Kaplanoğlu travaille maintenant sur la dernière partie de sa trilogie «Commitment Fikret» qui est une adaptation du Prix Nobel «A Mind At Peace» écrit par Ahmet Hamdi Tanpinar. Il est aussi l’auteur de nombreux articles spécialisés dans l’art plastique et cinématographique qui ont été traduits dans différentes langues et publiés dans de nombreux journaux.

Notre article

par Josiane Scoleri

Les promesses d’Hasan est le second film de la «Trilogie de l’Engagement» dont le premier intitulé précisément L’engagement n’est pas sorti en France. Le personnage principal en est une jeune femme d’aujourd’hui, cadre dans une banque, pour qui la maternité n’est guère plus qu’un passage obligé dont elle se serait visiblement bien passée. C’est peu dire que le sujet est iconoclaste dans la société turque contemporaine …comme ailleurs. Kaplanoglou appuie ainsi là où ça fait mal, sur ces lignes de fracture qui tiraillent et divisent de manière transversale tous les milieux et toutes les générations.

Avec Les promesses d’Hasan, le réalisateur aborde un autre sujet de fond, tout aussi inconfortable, et vise les contradictions, souvent profondes entre apparence sociale et réalité intérieure. Ainsi le personnage d’Hasan a tout du notable de campagne, petit propriétaire terrien qui sait mener sa barque au prix, certes, de quelques contorsions avec sa conscience. Kaplanoglou construit son film dans une progression sans faille de l’extérieur vers l’intime. D’où d’ailleurs l’importance des paysages, surtout au début du récit. Le réalisateur excelle dans le cadrage de ces espaces immenses qui nous parlent de temps et de gestes immémoriaux. Au-delà des premières scènes d’exposition qui servent à planter le décor, Kaplanoglou nous plonge dans le rythme des travaux des champs et des saisons qui semble immuable. Les plans sont larges et la caméra souvent fixe. La lumière et la bande-son, toutes deux très travaillées, donne encore davantage de relief au paysage. Nous nous sentons littéralement immergés dans cette nature où l’être humain semble bien peu de choses. Comment ne pas être séduit par de telles images et par le personnage d’Hasan, si attaché à sa terre, dont on sent bien qu’elle est toute sa vie?

Mais, les premières fissures apparaissent très vite dans ce tableau a priori idyllique. Il est tout de suite question d’argent, de propriété, de procès et de limites de parcelles. Pas d’idéalisation, loin de là. En effet, le cinéma de Kaplanoglou tend à la complexité plutôt qu’à la simplification et ce qui s’annonçait comme une fable plus ou moins écolo bien dans l’air du temps (la défense des champs de tomates contre les affreux pylônes imposés par une administration insensible et corrompue) s’avère un portrait sans concession, de plus en plus fouillé. Les plans sur les visages se font plus serrés, traquant les moindres variations du regard. C’est tout un écheveau que Kaplanoglou défait brin après brin, remontant tranquillement dans le temps sans à-coup, mais sans concession.

Ce faisant, c’est aussi le fonctionnement des institutions turques qui est démonté sous nos yeux. Notamment la justice avec le personnage du juge prompt aux arrangements, la banque et les entourloupes au crédit, la famille et les relations de couple sans oublier les rapports de classe, tous ces aspects renforcent l’armature du film et rythment le récit, bien au-delà de l’histoire personnelle d’ Hasan. De toute évidence, il n’est pas anodin que l’événement déclencheur de tout ce processus soit la préparation du pèlerinage à La Mecque. La morale refait surface quand on ne s’y attendait plus, à travers, qui plus est, une institution sociale, totalement encadrée et instrumentalisée par l’État. C’est le retour du refoulé, comme diraient les psychanalystes.

Dans Les promesses d’Hasan, il prend la forme de cauchemars de plus en plus oppressants. Kaplanoglou réussit – et c’est rarement le cas au cinéma – à rendre palpables l’angoisse et les remords qui travaillent Hasan au fur et à mesure qu’il s’interroge sur ses actes les moins reluisants. De petits «oublis» (cf la scène chez le cordonnier) à de réelles magouilles (l’acquisition du terrain du voisin endetté) le film va crescendo jusqu’à la scène finale dans le face à face entre les deux frères. Les acteurs qui portent le film Umut Karadag (Hasan) et Filiz Bozok (Emine, sa femme) sont tous deux impeccables dans ce jeu d’ambivalences qui caractérisent leurs personnages. Le film gagne ainsi en densité au fur et à mesure que se révèle l’ampleur des arrangements et des compromissions, mais ne perd à aucun moment ce rythme ample qui le caractérise car ce qui importe à Kaplanoglou, c’est de brosser un tableau le plus complet possible, sans manichéisme aucun, et de nous donner cette vue d’ensemble qui correspond aux nombreux plans larges du film. Les correspondances entre le fond et la forme sont puissantes et constantes ( pour exemple, la scène du café sous ce platane magnifique où Hasan se rend pour mener à bien son affaire). Ce sont elles qui donnent une stature et une «épaisseur» rares à ce film majeur.

Sur le web

Alors qu’il attendait la sortie de son film La Particule humaine qui a mis cinq ans à se faire, Semih Kaplanoğlu a commencé à écrire de courtes histoires qui ont évolué en scénario. Les Promesses d’Hasan est le deuxième volet de la «Commitment Trilogy» qui provient de ces courtes histoires.

Le réalisateur s’intéresse aux conflits humains et aux questionnements que l’on peut se poser au sein des différentes classes sociales. «Pour moi, c’est important de faire ressentir aux spectateurs ce que ressent tout être humain, la douleur, le remords, les angoisses, tandis qu’à l’image j’essaie de filmer leurs conflits et leurs contradictions. Je pense que l’origine de la souffrance a quelque chose à voir avec le lien authentique et invisible qui nous connecte les uns aux autres.»

C’est lors des repérages que le réalisateur a imaginé son film. La construction narrative du scénario a évolué au fur et à mesure des jours : «Quand je suis sur le terrain, je conçois les ajouts et les manques du scénario plus clairement. La nature, les visages, les véhicules, les ombres et lumières, les ponts au-dessus des rivières, les vergers, les sons de la nuit, des arbres et des animaux vous éloignent des mots du scénario pour vous amener dans l’univers du film.»

Semih Kaplanoğlu a découvert Umut Karadag, qui joue le rôle de Hasan, sur une photo de tournage. On lui proposait l’acteur à côté de lui mais il a été happé par Umut : «L’expression qu’il avait sur la photo avait quelque chose de l’air archaïque d’un homme qui travaille la terre. Je pense que, avec l’aide d’Umut, nous avons transformé son visage en une image iconique. Bergman avait raison, le cinéma commence par un visage.»

Ce film a été présenté dans la sélection Un Certain regard du Festival de Cannes 2021.

« Si l’un des plus beaux films turcs mettait en scène un poirier sauvage (Nuri Bilge Ceylan en 2018), c’est un autre arbre qui occupe le centre de l’affiche du nouveau long-métrage de Semih Kaplanoglu, cinéaste chevronné de 59 ans. Présenté en 2021 dans la section Un certain regard de la sélection officielle du Festival de Cannes, Les promesses d’Hasan étend ses branches avec volupté et prend le temps de bien poser son intrigue. C’est un récit ample et complexe qui prend plaisir à muter au fur et à mesure que se développe son propos, bien plus fin qu’il n’y paraît au premier abord. Hasan est un petit propriétaire terrien, et ce sont ses difficultés qui occupent le centre du plan dans la première partie. Un pylône électrique doit être construit en lieu et place de son champ de tomates, ruinant des années d’efforts pour diversifier sa production et devenir rentable.

Une heure durant le regard est porté sur cet homme vieillissant et son combat pour garder son bien, grâce à des intrigues et un clientélisme qui, déjà, questionne. Les failles sont déjà présentes dans la personnalité d’Hasan, et elles ne cesseront dès lors de se creuser, portant en creux une critique de l’individualisme qui gangrène les communautés paysannes de la Turquie. Ce combattant du quotidien se mue en opportuniste qui profite du malheur de ses pairs, rachetant des terrains à bas prix par le biais d’intrigues de bas étage et d’une morale à géométrie variable. C’est tout l’ordonnancement de la vie de cet homme, et par la même ses choix, qui est remis en question.

S’il est agriculteur précaire, Hasan est aussi un chef d’entreprise qui a des employés, et notamment dans sa maison, où règne sa femme Emine qui revendique à chacune de ses scènes une idée du statut social qui est le sien. Le mépris de classe est très présent autour de ce personnage, que ce soit dans ses rapports avec ses employés, mais aussi avec les autres membres de sa communauté qu’elle rabaisse par principe pour s’affirmer toujours un peu plus et refuser un éventuel déclassement. C’est pourquoi chaque détail compte, de la commande à une couturière qu’on retourne pour montrer qui a le contrôle, jusqu’au pèlerinage à la Mecque, symbole et accomplissement d’une vie pour un ou une musulmane pratiquante. Si Hasan est le pater familias au sens classique du terme, c’est bien Emine qui domine et rayonne, impulsant chaque décision.

Le deuxième temps du film ne fait que renforcer les détails décrits, soulignant le trait déjà esquissé d’une famille qui s’appuie sur la misère des autres pour se hisser au-dessus de la ligne de flottaison de la pauvreté. Le petit producteur de fruits et légumes intègre fait son examen de conscience, critère fondamental avant d’effectuer le pèlerinage, et ce qu’il en ressort écorne profondément tout ce que l’on croyait savoir du personnage. En cela, l’arbre qui rayonne au milieu de l’affiche des Promesses d’Hasan est un symbole d’une famille qui a perdu ses racines, tout comme le poirier de Ceylan était l’obsession du père de famille, ciment inconscient qui ramifie les relations entre chacun. Ce très beau film qui trouve enfin une sortie dans les salles françaises, est un visage de plus de la paysannerie contemporaine, fin et profond, où rayonne l’actrice Filiz Bozok et un Hasan joué par Umut Karadag, particulièrement juste et touchant. » (lebleudumiroir.fr)

« La question écologique fait heureusement son entrée de plus en plus sur les écrans de cinéma. Elle s’invite cette fois dans l’intimité d’une famille qui cultive jour après jour des fruits et des légumes, au milieu de paysages d’une beauté incroyable. Si l’été, la pluie est rare, aux jours tempérés, l’eau apporte aux collines des couleurs sublimes, lesquelles permette à Hasan de vivre dans une certaine luxuriance. Mais l’homme est appelé un après-midi du tracteur où il traite ses plantations. Un ingénieur a pris la décision unilatérale de faire installer des pylônes électriques immenses, au milieu de ses terres, dont on connaît la nocivité. Les animaux ne survivront pas à cette hérésie capitalistique, et sans doute que sa famille succombera à son tour à des maladies terribles. Pour autant, les pesticides, les méthodes agricoles d’Hasan lui-même ne facilitent pas non plus le soin de la planète. Derrière l’homme dévoué pour ses terres, se cache un entrepreneur déterminé à faire fortune, quitte à écraser ses proches.

Les Promesses d’Hasan est un film qui prend le temps. L’image très soignée s’attache à filmer des détails de la vie des personnages qu’il raconte. Les couleurs sont vives, très belles, comme si chaque plan était pensé comme un tableau de peinture. Semih Kaplanoğlu s’attache à décrire l’existence simple et bucolique de paysans à travers des scènes de travail ou du quotidien, où chaque objet, chaque son concourent à la poésie des espaces. Mais il ne s’agit pas d’un long-métrage faussement romantique, vantant les vertus de la vie campagnarde. Les Promesses d’Hasan interroge les rapports de force qui cohabitent entre les détenteurs de pouvoir et d’argent et le peuple. Chaque personnage, chaque institution contribuent, qu’ils le veuillent ou non, au dérèglement du monde et poussent à des conduites terribles, empruntes d’égoïsme et d’inhumanité. Le récit montre avec froideur et beauté à la fois comment chacun peut se nourrir de la misère d’autrui pour parvenir à ses propres desseins.

Le personnage d’Hasan occupe une grande part de l’écran. C’est une figure complexe, hantée par son désir de rendre la justice contre ce qu’il juge être une hérésie et son désir infini d’être toujours plus riche et plus puissant. Il est présenté comme une sorte d’anti-héros sinistre et touchant qui s’est repu du désespoir des autres pour s’enrichir, à la manière finalement de ces industriels dont il critique les comportements. Autour de son personnage principal, Semih Kaplanoğlu crée un univers où chacun doit composer avec ses propres contradictions, ses valeurs et ses desseins individuels. En fait, le réalisateur offre un film universel qui trahit chez chacun de nous, notre propension parfois à nous bâtir un bonheur sur le désespoir d’autrui.

Les Promesses d’Hasan pourrait pêcher par sa longueur. En réalité, c’est un film qui prend le temps de dérouler les noirceurs de l’âme humaine à travers des paysages, des scènes quotidiennes, les objets, les récoltes et des dialogues d’une indiscutable beauté. Le réalisateur de Miel parvient à extraire de ces images, des couleurs et des émotions qui semblent autant d’invitations pour les personnages à trouver en eux la rédemption et la paix. Le spectateur doit se laisser aller à ce rythme lent, qui est interrompu parfois par les cauchemars d’Hasan. La puissance romanesque du long-métrage s’élève dans des images très soignées, où la photographie joue admirablement entre les ombres et les lumières. » (avoir-alire.com)

« Le réalisateur de Milk et Miel, Ours d’or à Berlin en 2010, filme la splendeur de la nature de cette région de la Turquie avec une attention aux détails et aux sons – le bruit du vent dans les feuilles – qui font paraître encore plus dérisoires les petites misères et lâchetés humaines. Elle lui permet de composer des images comme autant de tableaux, allant du clair-obscur d’une tonnelle éclairée par le reflet d’un néon à la lumière franche d’un champ de blé desséché.

Au milieu de toute cette splendeur, l’acteur Umut Karadag dans le rôle de Hasan, avec son air constamment impassible, apparaît toujours solitaire et à distance des autres, comme prisonnier de ses démons, dont le film dévoilera peu à peu la nature. Jusqu’à cette magnifique scène finale où, franchissant l’étape la plus difficile de son repentir, des larmes coulent sur son visage buriné lorsqu’il prend conscience de l’irrémédiabilité du temps qui passe et comprend que certaines fautes ne pourront jamais être réparées. » (la-croix.com)

« Le mot turc tavaf signifie « tourner autour de quelque chose« , et dans un contexte islamique c’est le fait de tourner autour de la Kaaba, au centre de La Mecque, en partant de la Ḥajaru al-Aswad, la Pierre noire. C’est à cela que se préparent spirituellement Hasan et Emin Yilmaz, le couple marié au centre de Les Promesses d’Hasan de Semih Kaplanoğlu, le candidat turc aux nominations aux Academy Awards 2022, après le passage du film à Cannes dans la section Un Certain Regard.

Le réalisateur (qui a de nouveau fait appel aux services du directeur de la photographie Ozgur Eken, équipé d’une caméra 6K Sony Venice) s’arrête sur les différents éléments naturels pour bien souligner la distance entre un monde idéal et celui, hypocrite, où évolue le personnage central, à présent en quête du pardon des gens qu’il a trahis. C’est un petit hypocrite dans un univers hypocrite, suggère Kaplanoğlu, qui montre aussi l’impossibilité, pour les agriculteurs turcs, de vendre aux pays de l’Union européenne leurs produits traités avec des pesticides que leur vend pourtant l’Allemagne elle-même. Dans les rêves de Hasan, il y a une lamentation pour l’innocence perdue et la menace d’une punition divine imminente, magnifiquement représentée visuellement par le réalisateur quand un lot de pommes arrachées aux arbres par le vent viennent frapper notre homme – une scène qui rappelle la pluie de grenouilles biblique dans le Magnolia de Paul Thomas Anderson.

Kaplanoğlu, Ours d’or à Berlin en 2010 avec le superbe et très émouvant Miel, qui était le dernier film d’une trilogie qui l’a rendu célèbre dans le monde, nous a habitués à un cinéma au langage extrêmement raffiné, comme celui du cinéaste de la même génération Nuri Bilge Ceylan (tous deux font partie de ce qu’on appelle la « troisième génération« , avec Yeşim Ustaoğlu, Zeki Demirkubuz, Reha Erdem et d’autres), et à un regard pondéré, réaliste et subtilement politique qui se pose sur la province rurale turque, asphyxiante et suffocante, et qui explore les relations familiales, à mi-chemin entre tradition et modernisation, ainsi que le conflit entre foi et aspirations personnelles. Une tendance expressive confirmée par ce film, qui est la deuxième partie d’une nouvelle trilogie, commencée avec Commitment Asli en 2019. » (cineuropa.org)

« Il y a toujours autant un fort héritage du cinéma de Yilmaz Güney qui transpire dans les réalisations du cinéaste turc Semih Kaplanoğlu, l’auteur du merveilleux triptyque L’Oeuf (2007), Lait (2008) et Miel (2010), et qui ausculte une énième fois avec sensibilité le rapport entre l’homme et la nature avec Les Promesses d’Hasan, une exploration authentique de la vie d’une famille d’agriculteurs, de sa relation avec l’environnement et l’écosystème qui l’entoure à son rapport à la religion et même à une société turque menaçant sa survie et celles de ses terres fertiles et cultivées.

Soit la famille d’Hasan donc, qui a hérité de la culture des arbres fruitiers de son père et qui doit faire face à la construction d’un pylône électrique en plein milieu de son champ, avec les conséquences que cela entraîne : même si une indemnisation est prévue pour la partie expropriée, il peut perdre des hectares de cultures et subir des dégâts considérables dus aux effets causés par la proximité entre la haute tension constante et ses récoltes. Dans le même temps, seule bonne nouvelle d’un quotidien de plus en plus difficile qui voit son voisin se faire exproprier sa ferme par la banque, pour ne pas avoir remboursé à temps un prêt, lui et sa femme ont été tirés au sort pour entreprendre le pèlerinage à la Mecque…

En scrutant la lente et irrémédiable invasion de la modernité – et plus directement du néo-libéralisme – dans l’univers exilé et protégé de la campagne, tout en opposant l’intransigeance absurde de l’État et des entreprises face à l’incompréhension légitime d’agriculteurs menacés par un progrès non régulé et inégal, uniquement tourné vers la destruction et le profit; Kaplanoğlu croque une oeuvre formellement somptueuse qui se fait autant une critique sociale affûtée à la tension permanente d’une nation tiraillée par ses propres contradictions, qu’une quête métaphysique et rédemptrice d’un homme (exceptionnel Umut Karadag) qui a beaucoup à se faire pardonner, engoncé entre un avenir incertain et les regrets face aux erreurs passées, obligé de se réconcilier avec lui-même avant de le faire avec le monde.

Formidable fable morale sensorielle et contemplative à l’intrigue volontairement minimaliste, où la nature omniprésente embaume autant le cadre qu’elle dicte le rythme du récit, Les promesses d’Hasan désarçonne autant qu’il captive dans son regard sur la condition humaine, à la fois spirituel et criant de vérité sans pour autant être furieusement accablant ni complaisant. Sans contestation possible, l’une des plus belles découvertes de cet été ciné 2022. » (focus-cinema.com)


Présentation du film et animation du débat avec le public : Josiane Scoleri.

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Entrée : Tarif unique 8 €. Adhésion : 20 € (5 € pour les étudiants) . Donne droit au tarif réduit à toutes les manifestations de CSF, et à l’accès (gratuit) au CinémAtelier et à l’atelier Super 8. Toutes les informations sur le fonctionnement de votre ciné-club ici


 

 

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