CinémAtelier



Vendredi 21 Avril 2023 de 15H à 18H – CinémAtelier

Maison des Associations Nice-Garibaldi, Place Garibaldi (TRAM: Garibaldi)

Animation : Philippe Serve, fondateur et animateur de CSF (2002-2012)


Avant-propos

L’HEURE DES MADELEINES

Des anciens grands films ramenés à la mémoire à partir de résumés-montages de quelques minutes

proposés par l’animateur.

Aujourd’hui :

INTERVENTION DIVINE

(Elia Suleiman, Palestine, 2002)

et

2046

(Wong Kar-Wai, Chine/Hong-Kong, 2004)


Première partie

Regard sur un cinéaste ou une perle oubliée ou méconnue

Aujourd’hui autour du film de GODFREY REGGIO :

KOYAANISQATSI (1982)

Des Symphonies urbaines des années 1920 à KOYAANISQATSI (1982)

À la fin des années 1920 et de l’ère du cinéma muet, un nouveau genre apparaît au sein du 7e art et de son avant-garde : les « symphonies urbaines », pionnières des documentaires citadins, fortement empreintes d’expérimentations. Le coup d’envoi est donné par le cinéaste italien établi en France Alberto Cavalcanti avec Rien que les heures en 1926. Avec ce moyen métrage – le film ne dure que 46 minutes -, le Transalpin trace le portrait d’une ville (Paris) du matin au soir, dans l’espace et le temps. Ce qui l’intéresse est l’humain et sa condition. Alors il montre la classe ouvrière la plus démunie, les chômeurs, les sans-abris, prostituées, truands et beaucoup de misère à côté de laquelle trônent les nantis et les fêtards de la nuit. Cavalcanti a retenu les leçons du Kinoglatz, le cinéma-œil théorisé et conceptualisé par le Soviétique Dziga Vertov. Tout repose donc sur le montage et la mise en perspective des différents plans et séquences via celui-ci. Il y ajoute diverses techniques cinématographiques caractéristiques de l’époque telles que surimpressions, filmage fortement accéléré, split-screen, dédoublement, etc. Le film a un tel succès et correspond si bien à l’essor des grandes villes, que d’autres symphonies urbaines sont proposées à sa suite sur les écrans entre 1927 et 1930, dont trois somptueuses.

Tout d’abord,Berlin, symphonie d’une grande ville (Berlin: Die Sinfonie der Großstadt, 1927) de l’Allemand Walther Ruttmann, pionnier du cinéma abstrait ou « cinéma absolu ». D’une longueur légèrement supérieure au film de Cavalcanti (65 minutes), il en reprend les thèmes et lui aussi s’inspire des techniques de Vertov. Son œuvre recherche sans doute davantage l’esthétique que Rien que les heures (qui était loin d’en être privé !) et reste une pierre marquante dans l’histoire du 7e art. Divisé en cinq actes, il sert aussi aujourd’hui de capsule temporelle, montrant un Berlin dont un tiers devait disparaître sous les bombes moins de vingt ans plus tard.

Il était inévitable que Dziga Vertov lui-même s’attelle à la tâche d’une symphonie urbaine. Son film, L’Homme à la caméra (1929) demeure encore aujourd’hui un véritable chef d’œuvre montré dans toutes les écoles de cinéma et les ciné-clubs. Filmant les villes d’Odessa, Moscou et Kiev pour n’en faire qu’une indistincte de l’aube à la nuit, il offre un véritable festival d’images inoubliables, mises en valeur grâce à un montage de génie, très souvent empreint de beaucoup d’humour.

Alors que d’autres cinéastes s’inspirent des symphonies urbaines en cette fin de décennie et d’ère cinématographique dans leurs œuvres de fiction (Paris qui dort, de René Clair 1924, Ménilmontant de Dimitri Kirsanoff 1926, le chef d’œuvre allemand Les Hommes le dimanche de Robert Siodmak, 1929…), ce sont bien les trois grands films précités qui sont considérés comme les meilleurs représentants du genre. J’y ajoute personnellement un quatrième : À propos de Nice, le court-métrage culte de Jean Vigo (1930) où le cinéaste dépeint selon ses propres mots « l’apparence éphémère, fugitive et que la mort guette, d’une ville de plaisir. »

Un peu plus d’un demi-siècle plus tard (1982), plusieurs collaborateurs américains dont le réalisateur Godfrey Reggio projette KOYAANISQATSI, premier volet d’une trilogie tout à la fois documentaire et expérimentale, descendant lointain mais évident des expériences des symphonies urbaines, et en particulier de L’Homme à la caméra, le film devenu culte de Dziga Vertov. Cette fois, il ne s’agit pas ou plus seulement de montrer le quotidien d’une ville du matin au soir. Le propos est étendu en réalité à l’activité humaine et à son rapport avec ce que l’on pourrait appeler « la vie moderne » empreinte de vitesse et de technologie. Pour le meilleur et plus souvent pour le pire. Le film ne se cantonne pas à la ville stricto sensu, du moins dans ses premières séquences où c’est la nature la plus sauvage qui se taille la part du lion, comme un inventaire de la Terre avant que l’Homme ne décide de la domestiquer, et de la corrompre. La trilogie aura lieu, mais les suites n’arriveront qu’en 1988 (Powaqqatsi) et 2002 (Naqoyqatsi). Une trilogie en qatsi donc, du mot hopi – langue du peuple amérindien hopi vivant au nord-est de l’Arizona – signifiant Vie ou Existence. Les trois préfixes, eux, indiquent un état de chaos, de corruption, de déséquilibre (Koyaanis), de parasite ou de transition (Pawaq) et de guerre, de violence (Nagoy).

KOYAANISQATSI est une œuvre résolument expérimentale, sans scénario, tournée sur une longue période de sept années avec diverses techniques et matériels, 16mm parfois gonflé, 35mm, ralentis, accélérés, time-lapse, anamorphoses, prises de vues image par image avec toute l’échelle des plans déclinés, le tout présenté sur une musique omniprésente et minimaliste signée spécialement pour l’occasion par Philip Glass. Le film est autant celui du réalisateur que du compositeur, ainsi que du preneur de vues Ron Fricke. Derrière le film d’avant-garde se cache une vraie réflexion socio-politique. La volonté délibérée de tourner le dos à toute démonstration ou pensum didactique et prétentieux en privilégiant une approche plus ludique dans sa simplicité explique sans doute le succès inattendu du film et sa transformation au fil du temps en œuvre culte. Le thème central – l’orgueil technologique des hommes risque d’entraîner celui-ci à sa perte, nature et culture ayant perdu l’équilibre des mondes anciens – nous parle en 2022 peut-être encore davantage que 40 ans en arrière à l’heure où l’écologie occupe le centre des préoccupations humaines, et où l’Intelligence artificielle menace de supplanter l’animal le plus développé de notre planète : l’être humain. (Philippe Serve)


Deuxième partie

Deuxième partieHISTOIRE DU CINÉMA FRANÇAIS, DES ORIGINES À LA NOUVELLE VAGUE

(Huitième saison )

Épisode 25

L’ÂGE D’OR

(1930-1939, 5e partie)

LE RÉALISME POÉTIQUE (Suite)

 JULIEN DUVIVIER

Après avoir étudié la carrière menée par Julien Duvivier au temps du cinéma muet achevée sur un véritable chef d’œuvre cinématographique, le trop méconnu et oublié Au Bonheur des Dames (1930), adapté du roman d’Emile Zola, nous avons commencé à explorer lors de la dernière séance les premières oeuvres parlantes du maître, marquées par sa collaboration avec le plus grand acteur de son époque, Harry Baur. Nous avons ainsi évoqué à l’aide de larges extraits de chaque film David Golder (1930), Les 5 Gentlemen maudits (1931), la charmante comédie franco-allemande Allô Paris… ici Berlin ! (1932). Nous reprenons ce 21 avril le cours de sa filmographie avec sa seconde adaptation (après celle de 1925) du classique de Jules Renard, Poil de Carotte (1932), véritable chef d’œuvre, suivi de La Tête d’un homme (1933, récemment diffusé par CSF), Le Paquebot Tenacity (1934), l’adaptation du roman de Louis Hémon Maria Chapdelaine (1934) où il dirige pour la première fois celui qui deviendra à la suite de Harry Baur son acteur fétiche, Jean Gabin, et enfin Golgotha (1935) qui réunit les deux acteurs – mais sans scène commune –, dernier film avant que Duvivier ne commence à tourner des films ressortant du réalisme poétique… Et tout cela bien sûr et comme d’habitude avec des montages d’extraits des divers films concoctés pour vous par l’animateur !

Poil de carotte, version 1932

De haut en bas et de gauche à droite :
Le Paquebot Trinity, Maria Magdeleine
La Tête d’un homme, Golgotha


Prochaine et dernière séance de la saison :

VENDREDI 16 juin 2023 de 15h-18h, Maison des Associations Garibaldi.

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