Vendredi 09 mars 2007 à 20h30
Cinéma Mercury – 16 place Garibaldi – Nice
Un film de Philippe Falardeau – Canada, Belgique, France – 2005 – 1h45 – vostf
Michel, fils d’écrivain paralysé, mari d’une Congolaise réfugiée et père d’un futur champion de tennis, est un inventeur belge erratique incompris de son employeur. A l’âge de 42 ans, il apprend qu’il a été adopté et qu’il est né clandestinement dans une grange au Québec, à Sainte-Cécile. Durant l’an 2000, Michel se rend à Sainte-Cécile, pour retrouver la trace de ses parents biologiques.
ENTRETIEN AVEC LE RÉALISATEUR PHILIPPE FALARDEAU
Comment est née l’idée de Congorama ?
La genèse remonte à la route des festivals suivie par mon premier long-métrage, La Moitié Gauche du Frigo. De Rouyn-Noranda en Abitibi, région du Canada, jusqu’à Namur en Belgique, j’ai croisé par hasard des cinéastes belges drôles et attachants avec qui j’ai fraternisé. Je connaissais déjà le cinéma belge que j’aime pour son audace et son humour, mais là j’ai découvert ses artisans et l’univers qui inspire leurs histoires. En Belgique, je me suis senti un peu chez moi. Là-bas comme au Québec, il est beaucoup question d’identité et de politique.
Congorama est une coproduction.
Depuis longtemps, j’avais envie de raconter une histoire qui se passe en Europe et au Québec. Après avoir travaillé à Paris en 1993, je me suis toujours senti à cheval sur deux continents, sentiment fréquent chez nous étant donné notre situation de francophones d’Amérique à la jonction de deux mondes. Mais je trouve que le cinéma a rarement traduit cette réalité de manière naturelle. Le cinéma de coproduction est surtout une affaire de financement et de collaboration. Tel pays finance un pourcentage du film en échange de l’embauche d’un certain nombre d’artisans et de comédiens. Les histoires quant à elles restent souvent bien campées sur un seul continent. L’histoire devait s’enraciner sur les deux continents pour des raisons dramatiques et dans une vraie perspective de dualité. Les personnages se rencontreraient naturellement, comme dans la vie, sans trop insister sur les différences.
Vous pensez avoir évité les clichés culturels ?
Pas totalement. Mais j’ai essayé d’éviter les gags gratuits. Avec les Belges ou les Français, on finit toujours par discuter de nos accents, de nos expressions. Parfois, l’utilisation d’un mot donne lieu à des malentendus. Ça fait partie de la réalité. J’ai voulu intégrer ça dans les dialogues, sans trop appuyer. Et puis il faut se rappeler que mon personnage principal n’est pas français. Il est belge. Si on a souvent commenté nos différences avec nos « cousins » français on aborde rarement la question avec les Belges francophones qui, comme nous, ont un rapport particulier avec la France, un espace identitaire à protéger face aux Français qui sont beaucoup plus nombreux, beaucoup plus influents sur le plan culturel.
Pourquoi ce titre, Congorama ? Qu’est-ce que le Congo vient faire dans cette histoire belgo québécoise ?
Un des premiers lecteurs du scénario m’a fait remarquer que le Congo était à Congorama ce que la Chine était à Chinatown de Roman Polanski. Une sorte d’espace psychologique davantage qu’un lieu. Le Congo a été la propriété personnelle du roi belge Léopold II, puis une colonie de la Belgique. Il y a déjà là un lien implicite. Mais pour le reste, j’ai vraiment envie que le spectateur tire ses propres conclusions sur le sens du titre, comme j’ai envie qu’il découvre le film sans trop savoir à l’avance ce qu’il va voir. Le récit se déploie au compte-gouttes et j’invite le spectateur à reconstituer lui-même les pièces du puzzle de l’histoire et ses rebondissements, mais aussi celui du profil psychologique des personnages. En tant que spectateur, je n’aime pas rester passif, j’aime bien réfléchir un peu. Et puis il est assez rare maintenant qu’on puisse aller au cinéma sans connaître l’histoire du film. On en dit trop. Je trouve ça dommage. Congorama est une comédie dramatique dont la construction ressemble un peu à un thriller. Ce n’est pas un vrai thriller, parce que l’intérêt principal du film est ailleurs que dans les rebondissements.
Mais le sujet se situe ailleurs, autour de la famille…
Absolument. C’est seulement en relisant la première version du scénario que le thème du film m’est apparu plus clairement. Le rapport au père et la question de la filiation m’ont semblé s’installer en filigrane. Avant d’être ingénieur, Michel se pose beaucoup de questions sur son identité. Alors que ses compétences professionnelles sont remises en question par son employeur, son père lui apprend qu’il est issu d’une adoption clandestine au Québec. Marié à une Congolaise et père d’un enfant aux traits africains très prononcés, Michel a du mal à composer avec cette nouvelle. Il en veut à son père. Les cartes se brouillent dans son esprit. La raison cartésienne d’un ingénieur n’est d’aucun secours pour affronter une quête identitaire et démêler les émotions. Michel va finir par s’embourber dans une succession de mauvaises décisions.
Pourquoi avoir choisi Olivier Gourmet (La Promesse, Le Fils) pour incarner Michel Roy ?
Pour la vérité de son jeu. Avec lui, on est tout de suite dans le vrai, le réel. Étant donné le côté parfois invraisemblable de certaines situations, je voulais à tout prix crédibiliser le personnage par le ton du jeu. Olivier Gourmet est connu pour ses rôles dramatiques. J’avais envie de lui faire jouer des situations drôles tout en conservant son côté dramatique pour créer un humour décalé.Nous n’avons pas encore parlé de votre comédien fétiche, Paul Ahmarani, que vous retrouvez pour votre deuxième long métrage.Je pense que le talent de Paul Ahmarani est encore sous-estimé. Il a une énergie particulière et un charisme différent. Son registre est plus étendu qu’on ne le croit. J’ai écrit le rôle pour lui. J’imagine mal faire un film sans lui, peu importe l’importance du rôle.
Philippe Falardeau Réalisateur
Sur le web
Après des études en sciences politiques et relations internationales, Philippe Falardeau est choisi comme candidat à la « Course destination monde », diffusée sur Radio Canada en 1993. Il réalise 20 courts-métrages et remporte le premier prix. En 1995, il co-scénarise avec le réalisateur Jacques Godbout Le sort de l’Amérique, un documentaire produit avec le soutien de l’Office National du Film.
Deux ans plus tard, il réalise Pâte chinoise, un documentaire sur l’immigration chinoise au Canada. Le film est présenté au Festival des films du monde de Montréal et remporte le prix du meilleur scénario au Yorkton Film Festival.
En 2000, il réalise son premier long métrage de fiction, La moitié gauche du frigo, qui obtient un vif succès au Canada et dans de nombreux festivals tels Rotterdam, Londres, Paris, Seattle, Vancouver et Montréal. Le film remporte également le Prix City TV du meilleur premier long métrage canadien au Festival de Toronto et le prix Claude Jutra aux Canadian Genie Awards. Congorama est son deuxième long métrage
Aux côtés d’Olivier Gourmet en ingénieur belge, Louis est interprété par Paul Ahmarani, artiste canadien aux multiples facettes. Après avoir fait partie du Cirque du Soleil, il a chanté au sein du groupe Les Nouveaux mariés et débuté une carrière au cinéma en 1998. En 2000, Philippe Fallardeau lui confiait (déjà) le rôle principal de La Moitié Gauche du Frigo, son premier long métrage. Il y incarnait un jeune ingénieur au chomage, une prestation saluée par un Jutra (équivalent québécois des César) du Meilleur acteur en 2001.
Philippe Falardeau revient sur le sujet profond du film, la quête identitaire : « C’est seulement en relisant la première version du scénario que le thème du film m’est apparu plus clairement. Le rapport au père et la question de filiation m’ont semblé s’installer en filigrane. Avant d’être ingénieur, Michel est une personne aux prises avec des questions d’identité. Alors que ses compétences professionnelles sont remises en question par son employeur, son père lui apprend qu’il est issu d’une adoption clandestine au Québec. Marié à une Congolaise et père d’un enfant aux traits africains très prononcés, Michel a du mal à composer avec cette nouvelle. Il en veut à son père. Les cartes se brouillent dans son esprit. La raison cartésienne d’un ingénieur n’est d’aucun secours pour affronter une quête identitaire et démêler les émotions. Michel va finir par s’embourber dans une succession de mauvaises décisions.«
Congorama a été présenté en 2006 au Festival de Cannes dans le cadre de la Quinzaine des Réalisateurs. La même année, il a été présenté au Festival de Toronto.
Présentation du film et animation du débat avec le public : Josiane Scoleri.
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