Vendredi 01 mai 2004 à 20h45
Film de Stanley Kubrick – USA – 1964 – 1h35 – vostf
Le général Jack Ripper, convaincu que les Russes ont décidé d’empoisonner l’eau potable des États-Unis, lance sur l’URSS une offensive de bombardiers B-52 en ayant pris soin d’isoler la base aérienne de Burpelson du reste du monde. Pendant ce temps, Muffley, le Président des Etats-Unis, convoque l’état-major militaire dans la salle d’opérations du Pentagone et tente de rétablir la situation.
Sur le web
« Film noir et blanc, mais surtout film noir, très noir… Dr Folamour est un diamant tranchant et sombre, à l’humour désespéré – à l’image de la vision souvent cynique qu’aura eu Stanley Kubrick de l’Humanité au travers de sa filmographie. Hilarant mais sans pitié, le constat dressé par le réalisateur de Lolita évite pourtant tous les écueils du film à thèse grâce à une mise en scène millimétrée et un script d’une rare intelligence.
1958. Peter George, ancien Lieutenant de la Royal Air Force, développe dans son roman Alerte Rouge un scénario cauchemardesque de fin du monde suite à une crise nucléaire entre les deux grandes puissances des sixties. Aidé du scénariste Terry Southern, Kubrick rachète les droits de ce roman sérieux et réaliste, chamboule tout et tire le script vers la comédie noire et déjantée. Idée de génie : l’épée de Damoclès minutieusement ciselée par Kubrick a d’autant plus d’impact qu’elle joue sur le rire. Un rire jaune, certes. Mais un rire éclatant : peu de films regorgent autant de répliques cultes (« Gentlemen, you can’t fight in here. This is the war room« ), de dialogues étourdissants de drôlerie (la théorie de Dr Strangelove, préconisant une vie sous terre avec un ratio de 10 femmes / homme – et la réaction de Turgidson) et de situations totalement frappadingues au sein d’un contexte pourtant hautement dramatique…
Mais le film ne serait rien sans le génie comique tout bonnement ahurissant de Peter Sellers, qui trouve là sûrement un de ses plus grands rôles, si ce n’est son plus grand. Méconnaissable selon qu’il joue Mandrake, Muffley ou Strangelove, Peter Sellers fignole chaque personnage avec amour – avec un sens rare de l’accent, il habite littéralement chaque scène et fait taire tous ceux qui lui ont reproché un jour ou l’autre un certain cabotinage. Alternant sobriété (le président Muffley) et incroyable sens de l’improvisation (le monologue final de Strangelove et son » zieg heil « ), le futur inspecteur Clouseau porte le film sur ses épaules. Pour vous faire une idée du potentiel comique de l’acteur, précipitez-vous sur la 86′ minute du film (+ 50 secondes) – et notez comment Peter Bull (l’ambassadeur russe Alexi de Sadesky) essaie vainement de retenir son fou rire face à la prestation de l’immense Peter Sellers. Une merveille !
Ce serait toutefois faire injure au reste de la distribution que d’oublier de rendre hommage à George C.Scott, Sterling Hayden ou Slim Pickens, tous grandioses et qui trouvent chacun ici l’occasion de plusieurs scènes mythiques. A noter aussi que le film marque la première apparition d’un tout jeune James Earl Jones (que l’on retrouve dans le making-of). Heureux James Earl Jones, qui aura donc tourné avec le Maître : Stanley Kubrick. Kubrick qui réalise ici un de ses chefs-d’œuvre, un film où l’on retrouve son sens du cadrage (les scènes de la War Room lui permettent de dessiner toutes sortes d’arabesques proprement renversantes de beauté), une photographie éblouissante de Gilbert Taylor, toute en noirs et blancs superbement contrastés – ou encore une utilisation passionnante de la musique mais aussi des effets spéciaux qui finalement passent plutôt bien les ans. » (dvdclassik.com)
Stanley Kubrick, en cinéaste minutieux, a lu près de 50 livres sur le nucléaire et la Guerre Froide pour préparer le film.
« …Le Dr Folamour, création loufoque d’un Peter Sellers trop souvent laissé en roue libre dans d’autres films, marque l’apogée d’un jeu burlesque pour lequel l’acteur recevra une nomination aux oscars. Mais ce serait faire preuve de laxisme en oubliant qu’il est tout aussi tordant dans les rôles plus mesurés du colonel Mandrake et du président des États-Unis. Deux types finalement coincés et raisonnables face à la démence de la machine de guerre, ce qui donne lieu à des décalages savoureux. La mémorable scène où le président annonce à son homologue russe que des bombardiers américains s’apprêtent à réduire son pays en miettes est un modèle du genre : l’horreur absurde de l’annonce prend le pas sur toutes les conventions d’usage. Sellers y déploie toute une palette de détours, comme un gosse annonçant à ses parents qu’il a fait une grosse bêtise, pour une désopilante scène qu’il a entièrement improvisée. On se prend alors à rêver de ce qu’il aurait pu faire de sa carrière s’il avait travaillé avec plus de cinéastes de sa stature, sachant canaliser cette énergie folle pour en laisser éclater l’absurdité brute. Et la performance de chaque acteur s’intègre parfaitement à l’ensemble, chacun trouvant sa place naturellement, avec Kubrick en maître ordonnateur sachant leur insuffler la seule règle qui compte pour mettre les égos aux placards, et offrir un écho exquis aux frasques militaires décrites dans le film : ce n’est pas la taille du machin qui compte, mais l’usage que l’on en fait…(critikat.com)
L’avant-première du film était prévue le 22 novembre 1963, le jour de l’assassinat de Kennedy. Les producteurs pensèrent alors que le public n’était pas prêt à visionner une comédie noire si peu de temps après cette tragédie. L’avant-première fut donc décalée à janvier 1964. La scène de vérification de la trousse de survie fut également modifiée en raison des évènements. Après que le major ‘King’ Kong ait énuméré les différents objets composant la trousse, il a déclaré dans la version française : « Qu’est-ce qu’on pourrait pas se payer comme weekend à Dallas avec tous ces trucs-là!« , contrairement à la version anglaise qui fait référence à Vegas. On pourrait croire qu’il s’agit d’un parti pris de la part des traducteurs, destiné à une meilleure compréhension du public français des années 60, pas nécessairement familiarisé avec la ville du péché. Mais en réalité, c’est la version originale qui a été redoublée, étant donné que le président américain est mort à Dallas. La version française a donc conservé les dialogues originaux.
Sur le tournage et entre les prises, Stanley Kubrick avait l’habitude de jouer aux échecs avec l’acteur George C. Scott. Kubrick, en joueur averti, a battu facilement et régulièrement son acteur, ce qui a eu pour effet d’augmenter l’admiration de ce dernier pour son réalisateur. Alors que l’équipe technique filmait des plans aériens au-dessus du Groenland, elle filma par erreur une base secrète américaine. Elle fut forcée à atterrir et tous les techniciens furent suspectés d’être des agents soviétiques.
Dans une des versions du scénario, l’ensemble de l’action était observé depuis l’espace par des extraterrestres. Le général qui décide de lancer l’offensive aérienne contre l’URSS s’appelle Jack Ripper. Une référence à Jack the Ripper, connu en France sous le nom de Jack l’éventreur. La cible principale du major ‘King’ Kong en URSS est Laputa. Il s’agit de l’île volante issue du roman Les Voyages de Gulliver. On la retrouve également dans le film d’animation d’Hayao Miyazaki Le Château dans le ciel. Si la salle de guerre dans laquelle le président et l’Etat-major se réunissent contient une immense table remplie de nourriture, c’est parce que Stanley Kubrick comptait clôturer le film par une bataille de tartes à la crème entre Russes et Américains. Il a cependant décidé de couper cette scène qu’il jugeait trop burlesque par rapport au reste du film. Elle n’a d’ailleurs été diffusée qu’une seule fois en 1999 à Londres suite à la mort du cinéaste. Le docteur Folamour souffre d’apraxie diagonistique, également appelée syndrome de la main étrangère. Lorsque les chercheurs de l’université d’Aberdeen ont identifié cette affection neurologique pour la première fois, ils l’ont appelée le Syndrome du Docteur Folamour. Plus de 16 km de câbles électriques furent nécessaires pour faire fonctionner le gigantesque écran sur le plateau de la « War Room« .
Peter Sellers fut le seul acteur à avoir été nominé pour un seul et unique Oscar, alors qu’il jouait 3 personnages dans le film. Après le succès de Lolita, en partie grâce à la performance de Peter Sellers selon Columbia Pictures, la société de production accepta de financer Docteur Folamour à condition que le comédien britannique joue quatre personnages. En plus d’incarner le capitaine Lionel Mandrake, le président Merkin Muffley et le docteur Folamour, il devait en outre interpréter le major ‘King’ Kong. Seulement, l’acteur avait du mal à se familiariser avec l’accent texan. Stanley Kubrick pensait le remplacer par John Wayne, mais ce dernier ne répondit jamais. C’est finalement Slim Pickens qui a obtenu le rôle et bien que Peter Sellers ne joue que trois personnages, il fut tout de même payé 1 million de dollars pour le film. C’est à dire 55% du budget. Kubrick a eu une phrase célèbre à ce sujet : « J’en ai eu 3 pour le prix de 6 !«
Docteur Folamour a été élu la troisième meilleure comédie de l’histoire du cinéma selon l’American Film Institute après Certains l’aiment chaud.
Présentation du film et animation du débat avec le public : Philippe Serve.
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