Gagarine



Vendredi 03 Septembre 2021 à 20h30

Cinéma Mercury – 16 place Garibaldi – Nice

Film de Fanny Liatard et Jérémy Trouilh – France – 2020 – 1h38

Youri, 16 ans, a grandi à Gagarine, immense cité de briques rouges d’Ivry-sur-Seine, où il rêve de devenir cosmonaute. Quand il apprend qu’elle est menacée de démolition, Youri décide de rentrer en résistance. Avec la complicité de Diana, Houssam et des habitants, il se donne pour mission de sauver la cité, devenue son  » vaisseau spatial « .

En première partie sera projeté un Court métrage (10 minutes) sur le 35 mm au Mercury tourné par Jean-Claude Assaly, un des anciens projectionnistes en hommage à son collègue Patrick Baillergeon décédé récemment.

Notre article

par Josiane Scoleri

Sans être aucunement un feel good movie, Gagarine est un film qui fait du bien. Et ce, à plusieurs titres. On en ressort avec une sorte de gratitude envers les réalisateurs . Car Gagarine qui se passe entièrement en banlieue, avec les habitants d’une de ces multiples cités qui ont fleuri dans les années 60 aux abords des villes et qui sont aujourd’hui souvent dynamitées, est un des rares exemples de réalisme magique ou poétique dans le cinéma français contemporain. Réaliste, car solidement documenté, magique car la dimension onirique rebat complètement la donne et nous transporte littéralement ailleurs.

Première fiction de ce nouveau tandem de jeunes réalisateurs, Gagarine est l’aboutissement d’un travail sur la longue durée. Et ça se sent. De fait, dès 2014, les cinéastes avaient déjà tourné un court-métrage du même titre. Et la proximité, voire la complicité avec les habitants de la cité est palpable dans toutes les scènes collectives. Mais surtout, Gagarine est un film extrêmement inventif dans sa forme, que ce soit sur l’aspect documentaire ou dans son côté rêveur. Et ça aussi, ça fait du bien. Dans les deux cas d’ailleurs, les réalisateurs intègrent des images d’archives qui se fondent complètement dans le récit et le nourrissent en profondeur. Ce n’est pas la moindre de leur réussite.

De fait, le film démarre en fanfare (c’est le cas de le dire) avec des images, à peine croyables aujourd’hui, tant elles débordent de liesse, de confiance dans l’avenir. Nous sommes en 1963, c’est l’inauguration de la cité. La cité radieuse, pourrait-on dire si le nom n’était pas déjà pris. Ce sera la cité Gagarine, inaugurée par le célèbre cosmonaute soviétique en personne, le premier homme à avoir volé dans l’espace, entouré de la nomenklatura du Parti Communiste Français. Les visages de tous les habitants aux fenêtres, de tous les badauds et le sourire des enfants ne parlent que d’une chose: leur foi dans les lendemains qui chantent. Ces premières images sont capitales. Elles disent l’Histoire de ce qu’a été la France de ces années-là, disparue ou plutôt ensevelie sous les décombres. Il n’est donc guère surprenant que la cité elle-même, devenue vestige tristement anachronique après la faillite du rêve, soit vouée à la démolition.

Lorsque le film revient au présent, nous retrouvons les mêmes alignements de façades, en couleurs, cette fois. Les cadrages révèlent le rythme de la brique et des encadrements de fenêtres. Les plans aériens tournants accentuent la silhouette de vaisseau spatial de la cité. Car Gagarine porte vraiment bien son nom. C’est là que nous découvrons Youri, le personnage principal du film, adolescent au physique athlétique et tranquille qui observe les étoiles. Mais la toute première fois que nous le voyons, c’est sur les habitants de la cité qu’il pointe son télescope. C’est donc par son regard, à travers la lunette, que nous allons nous en approcher. Sans entendre ce qui se dit. A nous de deviner.

A l’inverse, lorsque Youri monte sur le toit où il garde ses outils, il peut entendre les conversations dans les différents appartements par les conduits de cheminées. A nous d’imaginer les personnes et les situations. «Gagarine» fourmille ainsi de mille «petites» trouvailles de mise en scène qui chacune apporte leur pierre à la construction du récit. Le personnage de Youri incarne à lui seul la double portée du film. Documentaire, car c’est par lui que nous avons accès aux multiples facettes de la vie dans la cité: les jeunes qui dealent, les femmes qui s’organisent pour faire du jogging, les travailleurs sociaux, etc… Nous le suivons partout dans son entêtement à vouloir sauver la cité, de la cage d’ascenseur aux kilomètres de couloir où il change les luminaires avec son pote Houssam et la belle Diana, la jeune Rom qui leur fait connaître le gardien de la casse du coin ( Denis Lavant, impeccable, comme toujours). Mais Youri ne se résume pas à son bricolage désespéré. Il a la tête dans les étoiles et connaît par cœur les vidéos de la première femme astronaute française, Claudie Haigneré. Là encore, l’utilisation de ces images d’archives est particulièrement bien intégrée au propos du film. C’est ce qui va faire basculer le récit vers sa dimension magique.

Car, à partir de là, le film se transforme en profondeur au fur et à mesure que Youri convertit son appartement en capsule spatiale. Nous sommes dans le conte et nous nous laissons entraîner volontiers dans le «délire» de Youri. Nous entrons résolument dans l’improbable, les décors sont de plus en plus exubérants, les plans de plus en plus étonnants ( cf la visite de la station sous les yeux médusés de Diana, avec la très belle scène du planétarium où mille loupiotes illuminent le visage des deux adolescents). Car Youri, en lointain cousin des jeunes héros de Kiarostami, ne veut pas lâcher et s’entête au-delà du raisonnable. Parmi les belles idées de scénario, le personnage de Dali, petit dealer passablement antipathique jusque-là, qui ne veut pas non plus quitter la cité (pour de toutes autres raisons, bien sûr) . Cela nous vaut une très jolie scène où il tourne son visage vers les spots UV de la serre, en déclarant : « Les vacances peuvent enfin commencer » ! Mais surtout, il accueille Youri et Diana au son de la Marseillaise de Gainsbourg, le volume à fond et se met à faire le derviche-tourneur en souvenir de son grand-père. Un grand moment de cinéma.

De manière générale, la bande-son est très soignée et la musique est un élément à part entière du récit et de la mise en scène. Par exemple dans la scène d’adieu qui ne dit pas son nom où Youri et Fari sont dans la voiture, sur la mélopée très orientale de Ya Ta Ra qui ravive des souvenirs d’enfance ou encore dans la chorégraphie des femmes sur le toit de l’immeuble. Les scènes de nuit, nombreuses, sont savamment éclairées et ajoutent à la part de rêve. Les réalisateurs savent tirer partie de l’obscurité pour resserrer leur mise en scène sur l’intimité des personnages. Et même la grue de chantier, plantée là dans le décor devient un outil, presque un personnage à leur service. Toute la fin du film va crescendo au fur et à mesure que les ouvriers font leur travail de déconstruction comme on l’appelle pudiquement jusqu’à la scène finale, chargée d’émotion et qui réussit encore à nous surprendre avec ce magnifique SOS en morse dans l’ultime nuit de Gagarine.

Sur le web

La cité Gagarine est un immense bloc de briques rouges abritant 370 logements. Elle a été construite au début des années 60 à Ivry-sur-Seine, en région parisienne. À l’époque, les villes communistes autour de Paris constituent une « ceinture rouge », qui se dote de grands ensembles, symboles de modernité, afin de résorber les bidonvilles autour de la capitale française. La cité est inaugurée en juin 1963 par le célèbre astronaute Youri Gagarine, le premier homme à avoir effectué un vol dans l’espace. En 2014, la décision est prise de démolir la cité Gagarine, dont la destruction débute le 31 août 2019.

Gagarine est un prolongement du court-métrage du même nom, réalisé par Fanny Liatard et Jérémy Trouilh en 2015. L’année précédente, le duo découvre Gagarine grâce à des amis architectes qui étaient chargés de faire une étude sur la démolition future de la cité. Ces derniers lui ont demandé de venir faire des portraits documentaires des habitants de l’immeuble. Trouilh se souvient : « On a tout de suite été happés par le lieu et les gens. Dès la première visite, on s’est dit qu’il faudrait faire une fiction ici. On n’avait jamais réalisé de fiction avant, mais ça nous semblait évident que c’était là qu’il fallait commencer ».

Gagarine est le premier long-métrage de Fanny Liatard et Jérémy Trouilh. Après leurs études à Sciences Po, la première part au Liban, puis travaille à Marseille sur des projets artistiques en lien avec les transformations urbaines des quartiers. Elle se lance ensuite dans un projet de court-métrage à La Ruche de Gindou Cinéma, une formation de scénaristes pour autodidactes. Le second s’envole pour l’Inde puis l’Amérique du sud avant de postuler au Master de réalisation de documentaire de création de Lussas en Ardèche. Un an et demi après ces expériences respectives, ils se retrouvent à Paris pour écrire et réaliser des films de fiction.

Jérémy Trouilh explique : « Avec ce film, on veut montrer que l’immeuble est important mais qu’au final, ce sont les gens qui restent. Leur relation à ce lieu perdure quoiqu’il arrive. C’est ce qu’on a essayé de capter et de restituer. Tendre un miroir qui dise la beauté et la complexité de ces vies. On croit au pouvoir des images sur la manière dont on se représente soi-même. C’est ça qui permet d’ouvrir les imaginaires ».

Le film est conçu comme un dialogue entre deux personnages : Youri, l’adolescent, et Gagarine, l’immeuble. « Youri a grandi dans cet immeuble et y a développé un imaginaire à la hauteur de cette barre gigantesque. Pour lui, voir disparaître cette cité c’est voir mourir ses souvenirs et ses rêves d’enfance, mais c’est aussi perdre une communauté qu’il chérit », explique Jérémy Trouilh.

Fanny Liatard estime que les cités et la jeunesse qui y vit sont souvent caricaturées. Elle voulait prendre le contre-pied de cette vision : « Youri aime sa cité. Pour lui, ce n’est pas qu’une utopie du passé. C’est son présent, et c’est le terreau de son avenir. La quitter, c’est tout perdre : renoncer à sa famille et à son monde imaginaire ». Son comparse renchérit : « Politiquement, il y a urgence à porter un autre regard sur cette jeunesse très riche et très diverse que l’on représente souvent avec un avenir bouché et par des images négatives. Ces clichés font beaucoup de mal, il faut les déconstruire ! » Il ajoute : « […] ces jeunes qu’on n’envisage, en général, que sous un aspect statistique ou spectaculaire ont des rêves et un imaginaire immenses ».

Quand, en 2014, Fanny Liatard et Jérémy Trouilh sont arrivés à Gagarine avec leurs caméras, les habitants les ont d’abord accueillis avec méfiance car les seules images qui circulaient à l’époque de la cité étaient celles des reportages de TF1. Ils ont fini par travailler en étroite collaboration avec les habitants, par le biais notamment de l’association « Voisines sans frontières » qui réunissait des femmes très engagées dans la vie de la cité. « On a passé des années à récolter les souvenirs des unes et des autres, à lier des amitiés fortes avec des gens de tous âges, aux parcours très variés. On a demandé à chacun de nous raconter sa première fois à Gagarine. C’était très enthousiasmant d’écouter les habitants exprimer leurs désirs profonds et leurs projets d’avenir », détaille Trouilh.

La directrice de casting Judith Chalier a mené durant six mois un casting afin de trouver l’interprète de Youri, d’abord au sein des habitants de Gagarine puis au-delà de ce cercle. Alséni Bathily, qui n’avait jamais joué la comédie, est tombé sur l’annonce de casting dans son lycée. Son physique de grand sportif était à l’opposé de ce qu’imaginaient les réalisateurs pour Youri mais « le contraste entre son corps et son regard, son sourire, sa douceur, rendait encore plus présente la part d’enfance qui habite le personnage » selon Jérémy Trouilh. Si le jeune comédien n’est pas originaire de Gagarine, son père et un de ses cousins y ont vécu.

Pour avoir vécu en Amérique du Sud, les deux réalisateurs ont été marqués par le réalisme magique qui imprègne cette culture. « La dimension magique nous permet d’aborder le réel et sa violence par un autre biais. Ce que vit Youri est dur. Il est le symbole d’une jeunesse qui a été mise à la marge et qui, parce qu’elle souffre de cet abandon, se replie sur elle-même. Si Youri a du mal à grandir c’est parce que le contexte ne lui donne pas confiance. Ça nous intéressait que cette dureté à laquelle il fait face ne soit pas occultée mais qu’elle soit abordée de façon décalée », explique Jérémy Trouilh.

La première fois que les réalisateurs ont découvert la cité de Gagarine, elle leur est apparue comme un vaisseau. Pour concrétiser cette idée dans leur film, ils ont effectué une résidence au CNES (Centre National d’Études Spatiales) où ils ont suivi des conférences qui les ont aidés à avoir une vision concrète de ce qu’est un vaisseau, de ce que signifie vivre dans l’espace. Ils ont imaginé un vaisseau qui n’est pas aseptisé mais organique, vivant et un peu sale.

Gagarine était vide quand les réalisateurs ont investi les lieux pour tourner leur film. Il restait toutefois des objets que les habitants avaient abandonnés avant de déménager. Les ouvriers chargés de la démolition étaient venus s’installer en même temps que démarrait le tournage. Il a même fallu négocier avec le chantier pour pouvoir tourner dans une aile de l’immeuble pendant que les ouvriers travaillaient dans un autre bâtiment.

De nombreuses archives sont visibles dans Gagarine, dont les images de l’astronaute Claudie Haigneré. Depuis leurs courts-métrages, les deux réalisateurs ont toujours puisé dans des archives : « Pour nous, l’archive n’est pas une image morte, c’est du mouvement qui permet de continuer à écrire le film au montage », affirme Jérémy Trouilh. Fanny Liatard précise : « Les archives sont comme des nouvelles rencontres qu’on fait au montage. Elles créent un trouble pour le spectateur, un déplacement, et amènent une autre dimension. L’archive éclaire la fiction et la fiction nourrit l’archive ».

Les premières images de Gagarine de Fanny Liatard et Jérémy Trouilh surprennent : le spectateur débarque au beau milieu d’archives montrant la construction et l’inauguration d’une de ces immenses constructions résidentielles typiques des années 1960 en France métropolitaine. La stature imposante du cosmonaute soviétique Youri Gagarine domine cette introduction, rappelant au passage l’identité communiste de cette proche banlieue de Paris qui épousa les idées venue d’Union soviétique à partir des années 1920 et la création du parti en France après le congrès de Tours. En quelques scènes, un décor est planté, des milliers de mètres carrés de béton deviennent le logis d’une population qui en a cruellement besoin. C’est une des thématiques centrales du film, parler de ces personnes qui ont fait société par le biais de ces barres de béton représentant à l’époque la modernité de l’habitation à la française.

« On repense d’emblée au Joli mai de Chris Marker et Pierre Lhomme (1963), contemporain de cette construction, qui posait des questions sur le devenir de ces projets immobiliers qui allaient considérablement altérer le paysage du pays, établissant un modèle qui n’allait pas être remis en cause pour le reste du siècle. L’urgence fut de loger des populations massées à l’entrée des grandes villes françaises tout en conceptualisant une nouvelle façon d’occuper l’espace et de proposer une vie en communauté. Quand Gagarine délaisse les archives pour filmer le présent on constate l’étendue de l’échec de cette politique. Il ne reste que des ruines, et une condamnation à la destruction et au relogement pour les milliers de locataires. Le talent des auteurs est de planter comme personnage principal un jeune homme, adolescent, noir, et amoureux de cet endroit dont il porte le nom, Youri.

Son identité est intimement liée à sa cité, à sa relation avec elle, et à la dimension qu’elle a pu acquérir pour lui. Fleuve de béton, elle est devenue une mère, un refuge, tout ce qu’il reste quand le reste du monde a ou va déserter. Youri se débat avec quelques personnes pour sauver sa maison, la rafistoler, devenant expert en luminaire, câblage, électricité, tout ce qui peut servir à lui faire tenir le coup et les inspections des pouvoirs publics. Il mène un combat perdu d’avance qui représente un travail à plein temps. On est en été, pas de préoccupation extérieures ne viennent perturber la bonne marche de cette entreprise de sanctuarisation du lieu aimé. Débrouille et activités à la limite de la légalité sont les vecteurs de ces journées passées à essayer de sauver la cité Gagarine, corps en perdition à l’orée d’une mort certaine…

La cité n’est jamais utilisée comme un simple décor prétexte au développement d’un film de genre se moquant des enjeux propres à ces lieux, elle est un personnage à part entière qui raconte sa population. L’émotion de toutes ces personnes revenues assister à la destruction de leur ancienne maison est extrêmement bien orchestrée et terriblement touchante. Même devenue invivable et insalubre, Gagarine reste dans les cœurs et les mémoires comme un corps commun, un lieu de mémoire. Cela dit beaucoup de choses sur la très belle idée du bien commun, ce qui nous appartient à tous en opposition à l’exaltation de la propriété privée et à un individualisme qui est l’opposée de cette entraide visible dans le film. En cela, Gagarine est un film politique, fort, chargé d’une énergie poétique rarement vue dans le cinéma français de ces dernières années, et qui n’oublie pas d’émouvoir. » (lebleudumiroir.fr)

« Tourné en 2019 pendant la démolition d’une cité d’Ivry-sur-Seine, ce premier long métrage séduit tant par sa liberté graphique que par son imaginaire débordant…Venus du documentaire, les réalisateurs réussissent à filmer la cité Gagarine d’Ivry-sur-Seine (Val-de-Marne) tel un vaisseau spatial où les rêves se forment en apesanteur. Le réel a inspiré cette fiction, dont les fils semblent tirés par le vieil ascenseur : confrontés, en 2019, à la démolition imminente de la muraille de brique – laquelle fut inaugurée en 1963 par le cosmonaute soviétique Youri Gagarine (1934-1968) –, les auteurs ont tissé un récit envoûtant autour d’un adolescent romanesque et résistant, Youri (Alséni Bathily), et d’une jeune fille fière d’habiter sa caravane (Lyna Khoudri)…C’est sans discours que passe un demi-siècle de bétonnisation, de grands ensembles qui portaient l’utopie de liens sociaux. Le film livre des bribes de scènes de banlieue où la violence, aussitôt qu’elle affleure, ne nous est pas donnée à voir. Plus la peine, le montage esquive, le sujet est épuisé. Le héros emprunte d’autres couloirs, voire traverse les cloisons, telle une évocation contemporaine du Passe-Muraille (1941), de Marcel Aymé… » (lemonde.fr)

« …Gagarine ancre son récit dans un cadre documentaire et y fait naître une fiction vibrante, qui clame puissamment sa foi dans les pouvoirs de l’imaginaire pour contrer l’effondrement. Gagarine fait un bien fou. En ces temps menacés par le désenchantement, voilà un film qui donne à voir et à entendre un chant d’espérance ample et sincère. Son scénario comme sa mise en scène semblent nous dire droit dans les yeux qu’il est urgent de réenchanter les imaginaires et son personnage central, Youri, se fait l’incarnation de cette utopie désirable… Pilier de cette histoire, ce jeune héros au prénom d’aventurier est comme un trait d’union entre un monde confronté à une réalité drue et le cosmos tout entier, qu’il rêve de sillonner. Il est incarné par un acteur, Alséni Bathily, découvert lors d’un casting dont il a vu l’annonce dans son lycée. C’est là son premier rôle et c’est peu dire que sa sensibilité et la grâce de sa présence sidérante apportent au film l’essentiel de sa haute vibration.

À travers son regard doux, un autre monde que celui du quotidien chahuté se déploie. Youri voit haut, regarde loin, scrute les étoiles, imagine des mondes et construit un ingénieux laboratoire à base de matériel de récupération, où s’exprime sa passion de l’espace. À la manière du Petit Prince de Saint-Exupéry, il se fait le traducteur de cette réalité éloignée, que peu sont capables d’appréhender. À sa manière, Youri est un authentique poète, et la mise en scène du film lui emboîte le pas. Inventive, parfois un brin affectée, l’esthétique visuelle et sonore offre une alternative à la menace d’effondrement qui plane non seulement sur la cité (qui sera bel et bien détruite le 31 août 2019, sous le regard de ses habitants), mais sur le monde tout entier aujourd’hui même. C’est toute la force de Gagarine, qui, en bâtissant une passerelle entre le monde terrestre et les sphères célestes, entre le réel et l’imaginaire, nous exhorte à croire en notre propre pouvoir intérieur. On en ressort l’âme réjouie et le cœur battant. » (bande-a-part.fr)

…Il est rare que le cinéma français quitte le sentier bien balisé d’un réalisme pur et dur pour partir vers un réalisme magique, mélange de poésie et d’onirisme, digne de ce qui se fait beaucoup plus couramment dans les divers cinémas sud-américains. Fanny Liatard et Jérémy Trouilh ont osé procéder à ce pas de côté et on ne peut que s’en féliciter tant la réussite s’est invitée tout au long de ce chemin. (critique-film.fr)

« C’est toute la réussite du film de faire croire que le jeune héros a transformé son immeuble en station orbitale, avec commandes de pilotage, sas, serre végétale… Vêtu d’une combinaison et d’un casque d’astronaute, il se déplace en apesanteur dans l’appartement et les parties communes ; bientôt d’autres le suivent. Comme dans ses entreprises solidaires de réhabilitation de la cité, tout le voisinage participe à son rêve… Le scénario original de Fanny Liatard et Jérémy Trouilh fourmille de formidables idées de mise en scène, faisant de Gagarine un splendide poème visuel. Récit de résistance, sans une once de violence, pétri de solidarité sans être bisounours, nourri d’images époustouflantes, le premier film de Fanny Liatard et Jérémy Trouilh aurait sans doute figuré au palmarès de Cannes 2020 s’il avait eu lieu. Ne passez pas à côté de cette pépite dont la modernité est de la graine de grands cinéastes. »(francetvinfo.fr)


Merci de continuer à arriver suffisamment à l’avance pour être dans votre fauteuil à 20h30 précises.

Présentation du film et animation du débat avec le public : Josiane Scoleri.

Entrée : Tarif unique 8 €. Adhésion : 20 € (5 € pour les étudiants) . Donne droit au tarif réduit à toutes les manifestations de CSF, et à l’accès (gratuit) au CinémAtelier et à l’atelier Super 8. Toutes les informations sur le fonctionnement de votre ciné-club ici


 

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