La bête aveugle



Mercredi 19 Février 2014 à 20h30 – 12ième  Festival

Cinéma Mercury – 16 place Garibaldi – Nice

Film de Yasuzo Masumura – Japon – 1969 – 1h24

Un sculpteur aveugle (Michio) enlève et séquestre dans son atelier un modèle (Aki)pour la soumettre à l’empire des sens afin qu’elle devienne une statue idéale. Comprenant après plusieurs vaines tentatives qu’elle ne pourra fuir ce cauchemar, la victime est peu à peu attendrie et envoûtée par son bourreau…

Sur le web

En France nous connaissons beaucoup mieux des réalisateurs comme Imamura (La femme insecte, La Ballade de Narayama ou L’Anguille), Oshima (Nuit et Brouillard au Japon, L’Empire des sens, L’Empire de la passion, Tabou), que Yasuzo Masumura. Après l’abandon de ses cours de droit à l’université de Tokyo, il est embauché comme assistant directeur aux célèbres studios Daiei (The Dark Myth, Zatoichi, Gamera). Il y reste quelques-temps, mais retourne étudier la philosophie. Il obtient son diplôme en 1949, ainsi qu’une bourse d’étude qu’il va utiliser pour prendre des cours au Centro Sperimentale di Cinematographia, en Italie (il aura des professeurs aux noms prestigieux tels que Federico Fellini ou Luchino Visconti).

De retour au Japon, il va travailler avec Kenji Mizoguchi et Kon Ichikawa en tant qu’assistant réalisateur. Il réalise son premier film en 1957 : Les baisers. Bien vite il s’impose comme précurseur de la nouvelle vague, tant par les thèmes abordés, que par l’esthétique de son univers. Il va beaucoup travailler sur les passions, l’érotisme. Il fera entre autres jouer Mishima dans {{Le gars des vents froids}}. Toujours dans ce travail de réflexion sur les passions, il tournera L’ange rouge(1966), La chatte japonaise (1967) et La bête aveugle (1969).

La Bête aveugle est l’adaptation cinématographique d’un conte sadomasochiste de Edogawa Rampo, publié en 1931. Yasuzo Masumura, qui avait été condisciple de Masao Mishima à l’université impériale de Tokyo pendant la guerre, s’est fait remarquer à la fin des années cinquante, en publiant des textes dans la revue « Higa Hyôron » (« Critique de cinéma »), où il exprimait sa volonté de peindre des personnages assumant dynamiquement leur ego et leurs désirs, ce qui était alors proprement révolutionnaire au Japon. II affirmait aussi I’existence physique de la femme japonaise, en contraste avec un homme « dévalorisé » :  « Contrairement à l’homme, qui n’est qu’une ombre, la femme est un être qui existe réellement, c’est un être extrêmement libre. Voila l’érotisme tel que je le vois.« 

Entre 1955 et 1984, Yasuzo Masumura a signé plus de 60 films en tant que réalisateur et plus de 20 en tant que scénariste. Parmi ces nombreuses réalisations, peu de films ont été diffusés en France. Plusieurs de ses films en 1957 en ont fait une figure de la « nouvelle vague » nippone qui dynamisa le cinéma japonais dans les années 50/60.

« La Bête Aveugle est un film caractérisé par sa beauté fulgurante, la violence des situations décrites, une forme de lyrisme étouffant, cérébral et sensuel à la fois, la mise à nu de passions et de pulsions aussi libératrices que destructrices.Le cinéaste explore les ravages de la passion, de l’attraction érotique, de la dépendance sexuelle. La Bête Aveugle est d’une invention perpétuelle et une expérience hallucinante pour qui voit le film. Le fétichisme, l’exaltation du toucher, le plaisir dans la souffrance deviennent autant les éléments d’un manifeste esthétique que d’un drame sexuel. Les trois personnages (la jeune femme, le sculpteur et sa mère) du film y incarnent tour à tour l’artiste, le modèle, le critique, dans une collision de névroses et d’obsessions. Une jeune femme, modèle pour photographe, est enlevée et séquestrée par un sculpteur aveugle qui veut créer une oeuvre parfaite. Celle-ci, après avoir tenté de s’échapper, le séduit puis se prend d’une inextinguible passion sexuelle pour lui, une passion qui ne peut s’affirmer que dans la douleur la plus intense. »(Le Monde)

Irréelle et fantasmagorique, est la mise en scène avant-gardiste de Yasuzo Masumura, qui ose même flirter avec le grotesque… sans jamais y succomber. Huis-clos cauchemardesque, sorte de Jardin des Plaisirs à petite échelle, La Bête aveugle enivre le spectateur ébahi par tant de beauté… et d’atrocité…Mais le lieu le plus effrayant – et tout autant attirant -, est sans nul doute l’atelier de Michio ; sorte de musée du corps humain, il réduit celui-ci à l’état de parties… jambes, bras, seins, yeux, bouches, oreilles, nez… autant d’éléments anatomiques, exposés aux murs tels des toiles… ou des trophées, comme si Michio souhaitait posséder ce qu’il ne peut voir, en grand nombre et à une échelle démesurée – à l’image du corps sans bras ni tête d’une femme fantasmée, gigantesque… représentation évidente de « la mère », de la femme et de l’amante…

Masumura posséde un véritable don pour créer un univers envoûtant, ainsi qu’un sens inné de la claustrophobie visuelle, bref, un génie de l’image dont les magnifiques plans, travaillés comme de l’orfèvrerie n’entamèrent jamais le fond… La Bête aveugle est une sorte de rêve éveillé, un voyage dans un endroit hors du temps où règne une atmosphère lourde et tendue.


Présentation du film et animation du débat avec le public : Philippe Serve.

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