La femme qui s’est enfuie



Vendredi 11 Février 2022 à 20h

Cinéma Mercury – 16 place Garibaldi – Nice

Film de Hong Sang-soo, Corée du Sud, 2020, 1h17, vostf

Pendant que son mari est en voyage d’affaires, Gamhee rend visite à trois de ses anciennes amies. A trois reprises, un homme surgit de manière inattendue et interrompt le fil tranquille de leurs conversations…

Attention! : Dorénavant, toutes les séances-débats de Cinéma Sans Frontières débuteront à 20h au lieu de 20h30.

Notre article

par Josiane Scoleri

Hong Sang-soo ou les jeux de l’amour et du hasard.

Jusqu’à présent, ce qui différenciait le cinéaste coréen de Marivaux, c’était surtout son goût immodéré pour l’alcool. Inutile de dire que les scènes de soulographie récurrentes – et prolongées – de tous ses films n’auraient certainement pas eu leur place dans le théâtre du XVIIIème siècle… Avec La femme qui s’est enfuie, plus de soju. À peine une bouteille de makgeolli (alcool de céréales à 6º) sur toute la durée du film. Qu’est-il arrivé à Hong Sang-soo ? L’amour a bien des mystères…

La femme qui s’est enfuie est entièrement construit autour du personnage de Gam-hee, jouée par la toujours très belle Kim Min-Hee, muse et égérie du réalisateur depuis Un jour avec et un jour sans (2015). Cette fois-ci, au lieu d’une construction en miroir en deux parties, avec d’infimes variations, le film s’articule en trois parties, bien distinctes, mais qui se déroulent exactement sur le même scénario. Comme si Hong Sang-soo tenait à garder une structure la plus apparente possible et amener ainsi le spectateur à davantage d’acuité dans le regard et dans l’écoute, au-delà de la structure et de la narration elle-même. Or donc, Gam-hee se rend successivement chez 3 amies qu’elles n’a pas vues depuis qu’elle s’est mariée (5 ans). Retrouvailles, papotage entre copines. « Tu n’as pas changé », « Tu t’es coupé les cheveux, ça te rajeunit ». On se raconte forcément ce qu’on n’a pas eu l’occasion de se dire depuis tout ce temps : mariage, divorce, déménagement, vie professionnelle, …On partage un repas, on éclate de rire au détour d’une phrase. Le quotidien au ras des pâquerettes en somme. 3 fois d’affilée. Il faut s’appeler Hong Sang-soo pour oser. Et surtout pour nous entraîner ainsi au plus intime de ces 4 femmes avec trois fois rien. Espoirs, frustrations, renoncements, blessures cachées. Rien n’est dit frontalement, tout affleure néanmoins dans un va et vient constant entre profond et prosaïque. Et la vérité des sentiments exprimés avec tant de retenue s’impose à nous, sans le moindre doute possible. De plus, dans son parti pris de répétition, Hong Sang-soo réussit malgré tout à introduire une montée en puissance dramatique, qui n’est pas immédiatement perceptible, mais qui va aller crescendo.

Le premier épisode est clairement celui de la comédie : les poules et le coq du voisin qui font du raffut, les yeux des vaches sur lesquels on s’attendrit tout en mangeant des brochettes et surtout l’irruption du voisin, totalement ridicule avec son histoire de chats, souligné par le dernier plan de l’épisode sur un gros matou patelin qui n’a rien du chat de gouttière). On commence à se rendre compte vers la moitié du second épisode qu’on n’est pas vraiment dans une simple répétition mécanique. La conversation est nettement moins légère, il est question d’argent sur fond de vide existentiel et sentimental, jusqu’à l’apparition de l’ancien amant, totalement pathétique dans son insistance absurde. Mais c’est surtout dans le troisième épisode (le plus resserré, en à peine une vingtaine de minutes) que les sentiments seront les plus complexes, avec le retour du passé amoureux et l’apparition du cinéma à l’intérieur du film (les dernières images de La femme sur la plage du même Hong Sang-soo, avec la même Kim Minhee). La scène où Woo-jin exprime ses regrets en posant à peine sa main sur celle de Gam-hee, dans une société où le contact physique est quasiment proscrit, est emblématique de la manière du film. Ce geste , si anodin en apparence, suffit à dire l’intensité de la charge émotionnelle qui se joue là, sous nos yeux.

Le film joue très habilement du hors champ : le mari possessif, très certainement toxique, présenté à chaque fois avec la même phrase par Gam-hee, la voisine qui a disparu dans le premier épisode et qui donne apparemment son titre au film (mais est-ce bien sûr?), l’architecte qui intéresse Su Young, mais qu’on ne verra jamais dans le second, le mari de Woo-jin dont l’absence plane sur tout le dernier épisode jusqu’à ce qu’il apparaisse brièvement vers la fin du film, dans une rupture de ton presque violente qui tranche totalement avec tout ce qu’on a vu jusque-là et qui éclaire sans ménagement le spleen évanescent transmis par le personnage de Gam-hee. Le film est construit en plans séquence assez longs où se glissent par moment des zooms avant et surtout des zooms arrière qui réussissent l’exploit de ne rien souligner. Nous sommes véritablement dans le regard de Gam-hee qui s’attarde sur le paysage ou qui scrute les images sur l’écran de vidéo-surveillance. On sent bien que le réalisateur s’amuse à introduire ainsi des images pauvres, dans un Noir et Blanc à peine lisibles, en contre-point de la haute définition du film. Tout en nous renvoyant à la pulsion scopique du spectateur qui fait écho à celle de Gam-hee. Nous nous sentons immanquablement un peu voyeur, ce petit cinéma muet n’étant destiné à personne en l’absence de l’occupante des lieux. Dans la gamme de couleurs, rien n’accroche le regard, un environnement lisse qui fait écho à la fluidité de la caméra. Les tons sont feutrés : noir, gris anthracite, ou bleu pâle dans des appartements lumineux à la déco minimaliste. Une harmonie design sans excès ni excentricité.

Nous sommes dans la  « middle class » bobo – intello, qui a les moyens de vivre correctement, loin des ultra-riches et des ultra-pauvres de Parasite par exemple. C’est le milieu du réalisateur qui parle ce qu’il connaît le mieux : les artistes, le petit monde du cinéma, sans affectation ni complaisance, avec plutôt des coups de griffes de temps en temps. Mais il nous parle avant tout des relations humaines et surtout des relations – oh combien déséquilibrées – entre hommes et femmes. D’ailleurs, dans ce film dont les protagonistes sont des femmes, le rôle des hommes est réduit à la portion congrue. Et le moins qu’on puisse dire, c’est qu’ils ne sont pas à leur avantage. De fait, ils sont filmés presque toujours de dos, comme pour signifier leur marginalité, des sortes de satellites dans la galaxie des femmes. Les hommes sont souvent veules et passablement minables dans les films de Hong Sang-soo, mais jusqu’à Un jour avec et un jour sans, ils tenaient quand même le haut du pavé, parlaient beaucoup et buvaient plus encore. On les voit glisser depuis de leur position centrale à une vague périphérie. D’ailleurs, Woojin dit de son mari : « Il répète tout le temps la même chose » Et Gam-hee l’achève d’un « Vous devriez arrêter de parler » péremptoire. Comme qui dirait que les temps changent.

Sur le web

Les films de Hong Sang-soo représentent des choses triviales de la vie quotidienne, mais reposent sur une structure conceptuelle. Ici, une structure en 3 parties correspondant chacune à la visite du personnage principal à une ancienne amie. « À présent, et ce depuis quelques années, l’idée de la structure me vient plus tardivement, environ au deuxième ou au troisième jour de tournage. Pour ce film, j’ai commencé à travailler la matière – les personnes et les lieux que j’avais choisis – sans avoir à l’esprit une structure fixe. Mais je savais vaguement que chacun des trois lieux que j’avais choisis allait d’une manière ou d’une autre constituer un chapitre à part entière » , confie le réalisateur.

La Femme qui s’est enfuie est un film centré sur des femmes et les rapports qu’elles entretiennent entre elles. Les personnages masculins essaient à plusieurs reprises de s’immiscer dans le film mais échouent systématiquement. « Je ne sais pas si c’est un film féminin. J’ai taché d’être le plus fidèle possible à la matière dont je disposais. En faisant certains choix tels que ceux dont vous parlez, j’avais conscience que certaines personnes verraient les choses de cette manière. Mais j’ai décidé de ne pas trop m’en soucier car je savais que mes motivations étaient ailleurs« , explique Hong Sang-soo.

Le titre du film fait écho à l’histoire de la voisine qui a quitté son mari et sa fille pour aller vivre ailleurs. « J’aimais le titre sans savoir clairement pourquoi et c’est ainsi que, souvent, j’aime les titres. J’ai imaginé l’histoire de la voisine parce que je voulais entendre dans le film quelqu’un prononcer ces mots : « La femme qui s’est enfuie ». Mais peut-être que j’avais tout simplement le sentiment que tous les personnages féminins fuient quelque chose, quelque chose d’oppressant et de malaisant« , analyse Hong Sang-soo.

Il est beaucoup question d’animaux dans La Femme qui s’est enfuie. L’animal est à la fois métaphore du rapport entre l’homme et la femme (le coq et les poules), mais il pointe aussi les contradictions des personnages, par exemple sur les modes d’alimentation (la consommation de viande). « Les chats, par exemple, étaient déjà là avant notre arrivée. Quand j’ai visité ce lieu pour la première fois, nous avons mangé beaucoup de viande de boeuf grillée pour le déjeuner. Et les chats étaient là pendant que nous mangions sur la place de parking. Nous avons naturellement beaucoup parlé d’eux. Quand nous sommes revenus sur ce lieu pour le tournage, à la fin d’une journée de travail, nous avons à nouveau fait griller beaucoup de viande de boeuf. Et l’un d’entre eux s’est approché et s’est enfui avec l’un de nos steaks« , se souvient Hong Sang-soo.

Les conversations paraissent très naturelles et spontanées. Pourtant, tous les dialogues sont écrits au préalable par Hong Sang-Soo. « Je prépare les scènes de conversation toujours de la même manière. Je parle avec les acteurs et me familiarise avec les lieux pendant un mois ou moins et je décide de ce que sera le début du film environ deux jours avant le premier jour de tournage. Puis, le premier jour de tournage arrive, et le jour suivant je tourne dans la continuité de ce que j’ai tourné la veille. Quand je tourne, je me réveille vers 4 heures du matin, et j’écris pendant 4 à 6 heures les dialogues de la journée.« 

C’est la première fois que Hong Sang-soo est crédité du montage au générique de l’un de ses films. « J’ai toujours monté mes films depuis le tout premier. Cette fois, j’ai appris juste assez pour être en mesure d’utiliser le logiciel de montage tout seul. C’était un peu différent, plus lent mais plus détendu, c’était bien.« 

« La musique est bien connue depuis une dizaine d’années : Hong Sang-soo ferait toujours le même film. C’est pourtant faux : si répétition il y a, entre les personnages de réalisateurs égotiques, les femmes mystérieuses ou malicieuses qui les remettent à leur place, et les longs plans-séquence de repas arrosés où panoramiques, zooms et dézooms se substituent au découpage, le cinéaste trouve toujours un moyen de dérouter. En dépit des ressemblances, chaque film ménage ainsi une place qui lui est propre au sein d’une filmographie toujours aussi singulière.

Première particularité de La Femme qui s’est enfuie, et non des moindres, il s’agit d’un film sans soju (mais avec tout de même un peu de makgeolli qui est un alcool de riz coréen beaucoup plus léger que le soju), donc sans ivresse. C’est probablement à cette inédite absence que tient en partie l’atmosphère de sérénité enveloppant le film. Si chez Hong Sang-soo la confusion des sentiments s’illustre souvent par une complexité dramaturgique et temporelle, La Femme qui s’est enfuie repose sur une structure on ne peut plus claire… On se demande si Hong Sang-soo n’est pas parvenu à réaliser un parfait film sans drame, sempiternelle obsession de cinéastes tels que Jim Jarmusch ou Richard Linklater. Le film n’est en revanche pas avare en drôlerie, notamment dans son étrange rapport à l’animal, piste nouvelle pour le réalisateur, à travers une histoire de poules cruelles, une discussion naïve sur le végétarisme autour d’un plat de viande, et surtout une scène hilarante se déroulant sur le pas de la porte de Young-soon (Seo Young-hwa), où l’on voit un voisin se plaindre de la présence de chats dans la résidence, et qui s’achève par un inénarrable zoom sur un matou désinvolte.

Dans le dernier segment apparaît un autre film sans drame, un film dans le film que Gam-hee va voir deux fois dans le cinéma où elle croise une ancienne amie (et rivale amoureuse). On n’en voit qu’un extrait, une fois en noir et blanc, une fois en couleur…Il s’agit d’images enregistrées sur le tournage de Woman on the beach, qu’a réalisé Hong Sang-soo en 2006, film autrement plus cruel et torturé que celui-ci…Que ce morceau de cinéma aussi calme provienne d’un film tumultueux atteste – accidentellement sans doute – de l’effet d’apaisement de La Femme qui s’est enfuie. Comme avec le bouleversant Grass, qui semblait tissé de différents brouillons de scénarios qu’aurait retrouvé le cinéaste au fond d’un tiroir, La Femme qui s’est enfuie tire sa beauté de sa grande simplicité. La maturité du cinéma de Hong Sang-soo se situe sans doute là, dans la modestie d’une méthode épurée, précise et pourtant nonchalante. Isolée dans la salle, Gam-hee se sent bien. Nous aussi. » (critikat.com)

« … La parole chez Hong Sang-soo comme chez son père spirituel Eric Rohmer est centrale dans son cinéma : ce sont des films où l’on parle beaucoup, certes, mais ce sont surtout des films sur la parole et sur l’étrange et vertigineux décalage entre la paroles, les actes et les êtres… La parole renseigne (on prend des nouvelles, on se souvient du passé), mais elle est aussi absurde et cela constitue un formidable moteur de comédie. C’est le cas dans ce nouveau film très drôle où l’héroïne peut parler de son désir de devenir végétarienne la bouche remplie de viande, ou lorsqu’un autre personnage éconduit un voisin mécontent avec une politesse tellement extrême qu’elle en devient génialement passive-agressive…

… « Comment des propos répétés en boucle peuvent-ils garder leur sincérité ? », se questionne t-on de manière ironique dans le long métrage. Comme d’habitude chez Hong Sang-soo, un flou mystérieux est conservé sur la nature de ce qu’on voit… Comme souvent chez le cinéaste, il y a ce grand écart entre l’ultra-épure réaliste et la vibration abstraite voire fantastique. Il y a une mise en scène qui se voit (avec ce qu’un zoom peut venir cueillir) et tous ces moments où l’on assiste à des conversations en oubliant la mise en scène, en oubliant qu’on est au cinéma. On a beau dire « comme souvent » ou « comme d’habitude » pour qualifier les films de Hong Sang-soo, il y a toujours un fascinant tour de magie à produire des films qui sont à la fois théoriques et si simples, immersifs et humains. Car derrière la comédie et les conversations banales se dessine quelque chose de bouleversant… » (lepolyester.com)

« Après trois films en noir et blanc, Hong Sang-soo revient aux couleurs et semble amorcer une sorte de nouveau cycle. Hotel by the river sonnait comme une oraison funèbre, une dérive de ses personnages au pays de la mort. La femme qui s’est enfuie, deuxième film en 2020 en France pour le maître sud-coréen, a lui des allures de bilan…

…Tout d’abord, une discussion des plus cordiales, comme souvent chez Hong Sang-soo on parle nourriture, boisson, presque du temps qu’il fait. La trivialité de ces échanges est accompagnée de sourires, d’une joie et d’une paix apparentes. L’auteur s’amuse pour chaque situation à provoquer un point de rupture dans le récit, une chute qui vient bouleverser l’humeur et la couleur de la scène. Dans les trois cas, cela prend la forme d’un homme, non invité, qui fait irruption entre elles et change la polarité jusqu’ici positive des discussions. Ils sont les agents perturbateurs qui détruisent la quiétude des lieux. Que ce soit un voisin insistant qui crée le malaise pour une simple histoire de chats errants, ou un ex-amant qui ne veut pas se faire congédier, c’est l’homme qui vient emboutir les débats, et révéler les brèches dans la concorde décrite jusque-là. » (lebleudumiroir.fr)

« A partir d’une trame narrative très fine, le réalisateur coréen nous guide dans le quotidien de ces femmes dont nous suivons avec plaisir la conversation, a priori anecdotique. Car c’est bien d’un film de paroles qu’il s’agit : comme son modèle Rohmer, Hong Sang-soo nous livre des dialogues légers, anodins et pourtant passionnants en raison de leur justesse. La réalisation souligne cette apparente trivialité : des plans fixes, une caméra à hauteur des personnages qui semble nous inviter à rien d’autre qu’à écouter. Une inscription dans le quotidien qui permet un humour léger, comme ce personnage de Youngsoon qui revient systématiquement sur ses propres propos, de peur de vexer les gens.

Le fait que ces dialogues constituent l’essentiel de la matière du film amène également le spectateur à douter de leur teneur. De la vie conjugale de Gamhee, on ne connaît finalement que sa version. Le spectateur attentif remarquera d’ailleurs que ce qu’elle dit à ses amies est, à la virgule près, exactement la même chose, comme un discours qu’elle aurait appris par cœur. Un soupçon de mensonge qui s’accroît quand on s’aperçoit que sa course la conduit à retrouver, par un faux hasard, un ancien amant. Aussi finit-on par se demander si la femme qui donne son titre au film est Youngsoon, qui vient de divorcer, ou Gamhee, qui nous échappe. On notera au passage que le titre anglais est d’ailleurs The Woman who run.

L’essentiel des personnages que l’on suit sont donc ces femmes à qui Gamhee rend visite. S’il y a bien des hommes, ceux-ci sont systématiquement filmés de troisquart dos, en une forme de léger hors-champ. C’est que les hommes, semble nous dire le film, mieux vaut s’en débarrasser : la scène liminaire nous donne à voir des poules aux prises avec un coq, dont l’agressivité ne serait due, d’après Yougnji, qu’à sa vanité. Difficile de ne pas y voir une métaphore de la gent masculine tout entière. » (toutelaculture.fr)

Encore une nouvelle petite merveille de Hong Sang-soo, qui enchaîne les films (c’est son vingt-quatrième !) à une vitesse étourdissante, sans faux pas ou presque. Dans The Woman who ran, Gamhee, une jeune femme mariée (Kim Minhee, l’épouse du cinéaste dans la vraie vie) rencontre successivement trois amies, la dernière par hasard dans un cinéma, les deux autres dans leur appartement respectif, l’une à la campagne, l’autre au pied d’une montagne. À chaque fois, ce sont des conversations délicieuses sur tout et rien, les agréments du logement et de la région, les atouts ou les problèmes de voisinage, l’amour aussi, sur un ton faussement badin. Durant une séquence très cocasse, un voisin vient se plaindre de nuisances, à propos des chats errants que l’amie de l’héroïne nourrit. S’ensuit un échange d’incommunicabilité totalement absurde, où celle qui est visée ne se démonte pas, obligeant le mécontent à repartir déconfit. Les hommes sont ici absents. Les rares fois où ils apparaissent, ils sont montrés comme des minables. C’est léger, minimaliste, presque insignifiant en apparence. Mais sous les mots et les images palpitent bien des choses. On dirait parfois du Tchekhov. Les femmes sont au premier plan, les amies de Gamhee surtout, qui semblent heureuses ou font semblant. L’héroïne, elle, écoute surtout. Lorsqu’elle parle, elle dit qu’avec son mari ils font tout ensemble. C’est la première fois qu’ils sont séparés, lui étant parti pour un voyage d’affaires. Elle glisse cela sans mélancolie aucune, pourtant celle-ci s’insinue mine de rien. Cette Gamhee se cacherait-elle des choses à elle-même, n’est-elle pas en train de se dérober, de nier une forme de désamour ? On y pense, mais rien n’est jamais tout à fait sûr et certain dans ce monde d’inconstance, de bonheur fragile, foncièrement relatif. Où la vérité d’un moment est démentie la minute d’après. La vraie vie forte est toujours ailleurs, elle est surtout dans l’imaginaire. Autrement dit, pour Hong Sang-soo, dans le cinéma. » (Télérama)


Présentation du film et animation du débat avec le public : Josiane Scoleri. Merci de continuer à arriver suffisamment à l’avance pour être dans votre fauteuil à 20h précises.

Entrée : Tarif unique 8 €. Adhésion : 20 € (5 € pour les étudiants) . Donne droit au tarif réduit à toutes les manifestations de CSF, et à l’accès (gratuit) au CinémAtelier et à l’atelier Super 8. Toutes les informations sur le fonctionnement de votre ciné-club ici


 

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