Événement : 3 jours avec Paul Vecchiali/Les sept déserteurs ou la guerre en vrac



Vendredi 23 Novembre 2018 à 20h30

Cinéma Mercury – 16 place Garibaldi – Nice

Film de Paul Vecchiali, France, 2018, 1h31

Trois séances rencontre-débat en présence du réalisateur Paul Vecchiali !

Ce soir première séance rencontre-débat

autour du film Les sept déserteurs ou la guerre en vrac.

Dans un hameau en ruines, quatre hommes et trois femmes se retrouvent après avoir fui la guerre. Ils survivent comme ils peuvent en allant voler dans les maisons voisines. Certains se connaissent déjà. D’autres tissent des liens affectifs. Puis, sans savoir pourquoi ni d’où viennent les tirs, ils sont tués un par un.

« Le cinéma d’aujourd’hui me désole. Ce n’est pas un jugement, c’est un sentiment que quelque chose s’est perdu et ne se retrouvera jamais : le besoin du « rêve ». Cocteau disait assez justement selon moi : il faut aller au cinéma pour connaître et non pas pour reconnaître ou bien : on va au cinéma pour se laisser envahir et non pour s’évader. J’ai bien peur que tout cela ne soit définitivement enterré ! » (Paul Vecchiali)

Edito : Paul Vecchiali,  l’inlassable explorateur du sentiment amoureux

Par Josiane Scoleri

Paul Vecchiali est très certainement le cinéaste le plus atypique du paysage cinématographique français et ce dès ses tout premiers films.

Être critique aux Cahiers du Cinéma dans les années 60 et aimer passionnément Danielle Darrieux, Jean Grémillon ou Julien Duvivier, voilà sans doute un grand écart inconcevable pour bon nombre de ses co-équipiers, mais c’est précisément à ce croisement-là que se situe Paul Vecchiali. Nouvelle vague et cinéma français des années 30 que l’on qualifie souvent de populaire, c’est cet hybride improbable qu’incarne Vecchiali avec une inventivité sans pareille. Auteur reconnu dans le monde entier – de grandes rétrospectives lui ont été consacrées ces dernières années un peu partout dans le monde, de la Cinémathèque de Tokyo à celle de Sao Paolo, de Lisbonne ou de Séville– il dit souvent à quel point il aimerait que ses films passent plutôt sur les grands boulevards que dans les salles d’art et d’essai confidentielles. Mais l’artiste, on le sait, ne choisit pas son public…

L’indépendance chevillée au corps, il produit dès 1963 les premiers films de son ami Jean Eustache. Dans cette même ligne, il créera dans les années 70 sa propre maison de production « Diagonale » qui a permis l’éclosion de toute une génération de cinéastes français : Jean-Claude Biette, Jean-Claude Guiguet, Gérard Frot-Coutaz, Marie-Claude Treilhou en se mettant d’ailleurs souvent lui-même au service de tous ces jeunes réalisateurs en tant que monteur. On disait alors « la bande Diagonale ».

Ce sont les années 80 de triste mémoire, brûlées au vif par le Sida qui va décimer son entourage et plus généralement le monde des artistes. Vecchiali, cinéaste engagé comme il respire, en sortira Once more (1987), chronique de ces années de braise, qui ébranle encore aujourd’hui par son intensité à la fois ravagée et romantique, au bord du désespoir.

Lorsqu’il n ‘arrive plus à mener sa barque comme il l’entend avec sa société de production, il préfère en vendre les droits et passer à autre chose. Il n’a jamais eu peur de la télé et comme il le dit lui-même, à deux exceptions près, il a réussi à y faire de vrais films et à gagner l’argent… qui lui permettra de faire ses propres films en se passant de l’avance sur recettes (même si ça le met en rogne : il en fera le très drôle et très féroce À vot’ bon cœur !). 60 projets refusés à ce jour, tout de même !

Quand il désespère du cinéma, il rebondit avec Antidogma. C’est à dire, une seule règle : pas de règles. Là encore, on reconnaît la réponse du berger à la bergère sur la petite planète du cinéma. Résultat, il en est aujourd’hui à 14 longs-métrages et quelques courts sous cette estampille radicale. Des films en circuit court, tournés chez lui ou en bas de chez lui, avec ses fidèles lieutenants : Philippe Bottiglione, son chef-op, Francis Bonfanti, son ingénieur du son, Roland Vincent son compositeur attitré.

Son cinéma, Vecchiali le vit avec une véritable troupe d’acteurs et d’actrices au sens ancien du terme, une troupe qu’il recrée autour de lui au fil du temps et des générations. Hier Sonia Saviange et Hélène Surgère, Jean-Luc Delahaye ou Nicolas Silberg. Aujourd’hui Astrid Adverbe et Pascal Cervo, mais aussi Marianne Basler que l’on voit malheureusement trop peu sur les écrans ou Simone Tassimot à qui il confie des rôles hors-format à la mesure de son physique et de sa voix. Ces films, pour la plupart, attendent toujours leur sortie en salle, notamment une Pentalogie -excusez nous du peu- qui en décoiffera plus d’un si elle trouve un jour son chemin jusque sur les écrans.
Mais ça n’empêche pas Vecchiali de continue à tourner et de nous surprendre à chaque fois, quand on a la chance de voir un de ses films. Notamment le magnifique Nuits blanches sur la jetée dont il nous a régalés en 2015. Adaptation amoureusement fidèle du texte de Dostoïevski, le film tourné dans la nuit, éclairé par le phare intermittent du port de Sainte Maxime et les bons soins de « Botti », est un petit bijou d’intensité dramatique et d’intelligence cinématographique.

Vecchiali observe le déploiement du sentiment amoureux un peu comme un entomologiste penché sur son microscopique. Il ne se lasse pas d’en représenter les multiples, les innombrables facettes. Ça nous vaut parfois – souvent – un « film de jeune homme », tant il explose de vitalité comme dans C’est l’amour (2016) ou un film mélancolique quand il fait retour sur le passé comme dans Le cancre (2016 aussi).

Cette plongée au plus profond des émois et des affects – thème universel et atemporel s’il en est – est résolument contemporaine et, quel que soit le registre, la mise en scène est marquée par une liberté de ton et d’esprit qui n’appartiennent qu’à lui. Elle se fait même de plus en plus radicale au fil des années.

Si la présence persistante de chansons dans tous les films de Vecchiali est un clin d’œil assumé aux années 30, la manière dont elles sont insérées sans la moindre rupture au cœur même des dialogues relève d’une audace toujours renouvelée. Les paroles sont presque toujours de lui, d’où peut-être aussi ce fondu enchaîné dans lequel on se laisse prendre volontiers.

Adepte de dispositifs minimalistes qui permettent aux acteurs de déployer tout leur talent, Vecchiali est, de fait, le virtuose du « less is more ». Ses films constituent une parfaite illustration de la maxime populaire « nécessité fait loi ». On sent que la contrainte libère chez lui une énergie décuplée et qu’il prend, apparemment presque sans le vouloir, mais avec bonheur, le contre-pied de la plupart des recettes du cinéma mainstream avec, encore et toujours, une volonté d’en découdre parfaitement bluffante. Le cinéma qu’il fabrique, comme on dit en anglais « a film-maker », est un cinéma qui brille comme une étoile solitaire, ou peut-être une galaxie à lui tout seul.  En tout cas, on peut affirmer sans risque, pour paraphraser Brassens, que le cinéma qui marche au pas, ça ne l’intéresse pas !

Du physique des acteurs à leur phrasé, du rythme du film à la bande son, du scénario au mouvement de la caméra en passant par la musique, tout porte la marque de son auteur.

Les trois films que nous présentons ici en sont une illustration palpitante.  Chacun explore par des thématiques et des angles différents, les voies inépuisables du désir, les jeux du sexe et de la mort, du dit et du non-dit, du dévoilé et du refoulé. Et à chaque fois, nous sommes saisis à la fois par l’élégance et l’intensité de ce que Vecchiali nous donne à voir et à entendre, à savourer et à rêver. Merci Monsieur Vecchiali de nous faire partager cet amour indéfectible pour le Cinéma.

Notre critique

Par Josiane Scoleri

« Film is like a battleground. Love, hate, action, violence, death, in a word : emotion. » (1) (Samuel  Fuller)

Si l’ombre portée de la guerre est presque toujours présente dans les films de Paul Vecchiali, de la seconde guerre mondiale à la guerre d’Algérie, en passant plus récemment par celles d’Irak ou d’Afghanistan, c’est la première fois, à ma connaissance, qu’il y consacre un film tout entier.  Et ce n’est certainement pas par hasard si Samuel Fuller ou William Wellman figurent parmi les 4 cinéastes auxquels le film est dédié, eux qui révolutionnèrent durablement le genre à Hollywood. Raymond Bernard, cinéaste français aujourd’hui injustement oublié, fut célèbre en son temps pour deux films de guerre à contre-courant de la légende nationale : Les croix de bois sur la première guerre mondiale et le très beau Un ami viendra ce soir sur la Résistance.  Quant à Jean-Luc Godard, Le petit soldat et Les Carabiniers étaient déjà un cri d’alarme enragé dans les années 60, mais depuis Allemagne 9.0. et la guerre en ex-Yougoslavie, ce sujet irrigue en profondeur tous les films du réalisateur.

Nous savons donc d’emblée où se situe Paul Vecchiali, cinéaste cinéphile, même si sa manière d’évoquer la question ne ressemble à aucune autre. Là-dessus, on peut lui faire confiance. En effet, d’entrée de jeu, le parti pris est radical. Dès le premier plan, les décors en carton-pâte ne font pas semblant d’être autre chose et cette nonne qui fait à peu près aussi vrai que les décors eux-mêmes ! C’est déjà une déclaration de foi : nous sommes au cinéma et nulle part ailleurs. Ne vous attendez pas à une de ces reconstitutions minutieuses où même la boue des tranchées a l’air propre à force d’artifice. Qu’on se le dise une bonne fois pour toutes, ce n’est pas le copié-collé d’époque qui fait la véracité ! Ce n’est pas la peine de saturer l’image de toutes sortes de détails pour faire comme si vous y étiez. À ce titre, Vecchiali s’avère, une fois de plus, un maître du hors-champ.

Dans Les sept déserteurs, la guerre on ne la voit pas, on l’entend.  La bande-son est implacable, et pour le coup omniprésente. La guerre, on la parle, dans un crescendo vibrant où la pulsion vitale le dispute à l’angoisse. Les dialogues sont ciselés et puissants, portés par des acteurs incandescents. On connaît l’amour de la langue qui caractérise toute l’œuvre du réalisateur et sa direction d’acteurs où il faut tout donner dès la première et… unique prise. Et puisque nous sommes chez Vecchiali, parfois même, la guerre, on la chante. Le réalisateur réunit donc cette petite troupe de personnes, sa troupe au sens noble du terme, qui refuse de faire partie de la troupe. Et c’est déjà tout un programme. Comme dans les plus belles comédies du théâtre du XVIIIème siècle, la plupart des personnages, par petits groupes de deux ou trois, se connaissent d’une vie d’avant, où ils portaient souvent un autre nom et d’autres habits. La rencontre/retrouvailles va faire l’objet de révélations, d’aveux, de souvenirs refoulés. Avec ce dispositif d’une grande simplicité, chacun se raconte, se dévoile et/ou se cache face aux autres, et surtout face à nous.

C’est la comédie humaine avec tout ce qu’elle a de troublant, parfois pathétique, parfois tragique, toujours sur le fil du rasoir. La personnalité de chacun des personnages est ainsi tour à tour mise en lumière, dans un vrai film choral où aucun n’éclipse l’autre, comme dans un de ces big bands de jazz où tous les musiciens peuvent devenir solistes d’un moment à l’autre. Et puisque la mort rôde et frappe sans crier gare, la pulsion sexuelle surgit avec force et circule violemment entre les personnages. Chez Vecchiali, le sexe se dit et se parle sans détours, mais non sans délicatesse. À cet égard, l’une des scènes emblématiques du film, celle dont la charge érotique est certainement la plus forte, est encore une fois une scène parlée où Alexandre raconte son désir et imagine enfin la rencontre intime avec la femme qu’il aime et qu’il n’ose aborder. Il le fait à la demande pressante de Denis, son ami homosexuel, son petit frère en amitié, comme il dira plus tard dans le film. Les deux hommes sont assis dos à dos et cette simple idée de mise en scène s’avère d’une efficacité absolue. La caméra, la plupart de temps frontale, sur le profil des deux hommes, passe par moment du visage d’Alexandre, qui imagine, qui vibre et vit la scène, à celui de Denis, dont l’excitation grandit de minute en minute. Désir, fantasmes et jouissance à leur comble sans le moindre petit cm2 de peau nue à l’écran.

Quelle leçon de cinéma ! Quelle foi dans le pouvoir de l’imagination ! Puisque c’est bien ça la grande force du cinéma, de mettre en mouvement tout notre imaginaire le plus intime en écho à celui qui s’exprime à l’écran. Quelle leçon de vie aussi ! Car, notre époque l’oublie trop souvent, le désir se nourrit de suggestion et non pas de dévoilement forcené.

Les sept déserteurs est ainsi un film d’une folle intensité où Éros et Thanatos se défient de minute en minute. La mort insensée, imprévisible. L’amour, tout aussi insensé et tout aussi imprévisible. Deux forces qui nous dépassent et qui nous mènent.  Les acteurs sont véritablement habités par ces deux forces qui les enveloppent et les traversent. De Simone Tassimot, la nonne au franc-parler, ex-pute et ex-marquise à Astrid Adverbe qui incarne à elle seule toute la jeunesse, capable de passer de l’insouciance à la gravité en une fraction de seconde ou Marianne Basler à l’élégance nonchalante et sensuelle, les trois actrices sont tout simplement formidables. Vecchiali avec un sens aigu du casting, choisit volontiers des physiques qui ne correspondent pas complètement aux canons en vigueur. On reconnaît bien là la grande liberté de l’auteur. N’oublions pas que depuis bientôt 15 ans, tous ses films sont estampillés « Antidogma » !

(1) Le cinéma, c’est comme un champ de bataille. L’amour, la haine,  l’action,  la violence, la mort : en un mot, l’émotion.

Sur le Web

Interrogé sur le choix des dédicaces dans son film et sur sa genèse, Paul Vecchiali répond : « Pour Raymond Bernard, c’est simple : selon Fritz Lang, Les Croix de bois serait le film le plus fort fait sur la guerre et, d’ailleurs, Hawks lui a emprunté quelques passages. Pour Godard, il y a dans Les Carabiniers un air commun à ma recherche. Pour Fuller, c’est l’auteur qui a le mieux filmé la guerre, ses contradictions et ses émotions. Enfin, pour William Wellman, c’est son film, Les Forçats de la gloire, qui a déclenché la volonté de faire Les Sept Déserteurs. La contrainte économique vient après. Jamais avant. Le petit quatrain qui ouvre le film est de moi. Il est évident que le mot « mort » qui ouvre le film n’est pas innocent. Il en déclenche la dialectique. Mon père m’a souvent parlé de la guerre, celle de 14-18 où, précisément, c’étaient les fantassins qui représentaient la nation. Les États-Majors n’intervenaient qu’en cas de désertions, justement, ou de conflits internes. C’est donc un choix théorique et « engagé »…On ne sait jamais vraiment d’où viennent les idées qui poussent à faire un film. J’ai dit ce qui l’avait déclenché mais après ? La révolte contre les fausses guerres d’aujourd’hui ? Ma volonté anarchique de lutter contre toute forme de pouvoir ? Le souvenir des bombardements de la guerre de 39/40 où ma grand-mère a succombé et où j’ai vu, à l’âge de treize, des horreurs de toutes sortes : les gens que l’on noyait parce qu’on ne pouvait plus les sauver, les pillards qui profitaient de la mort pour chaparder, les chapelles ardentes où des ballets macabres s’organisaient entre les chercheurs et les cadavres ? En vrac, comme la guerre ? »
Concernant le tournage de son film, il ajoute : « J’écris seul, certes, mais en ayant, au préalable, dans ma tête, les intonations des comédiens et comédiennes auxquels j’ai pensé. Nous faisons deux ou trois lectures « à plat » pour voir si quelque chose gêne dans les mots. Puis une dernière lecture où je leur propose une cadence : accélération, ralenti, pauses, « absences »… Ils se réjouissent beaucoup de cette « approche » du tournage. Dans le décor ensuite, il y a juste quelques « coups de patte » quand je ressens un faux-sens par rapport à la scène. Ici, ce n’est jamais arrivé.« 

En ce qui concerne le décor de son film, il explique : « J’ai cherché pendant des mois un décor « réel ». Il y en avait même un en Corse mais on ne pouvait y accéder (pour le matériel) que par hélicoptère. Aussi ai-je choisi l’autre solution : fabriquer ce hameau dévasté qui a pris 4 mois de travail à Maurice Hug, le chef-déco, dont l’imagination et l’efficacité sont sans bornes. J’allais de temps en temps sur le lieu pour rectifier des choses en me mettant à la place de la caméra lorsqu’elle est au plus loin. Quant à l’aqueduc, comme le « mur des lamentations », c’est un hommage au film de Douglas Sirk Le Temps d’aimer et le temps de mourir.« 

« La persévérance et la prolixité avec lesquelles Paul Vecchiali, 88 ans, continue à réaliser des films envers et contre tout forcent le respect. Ce vétéran renégat, qui fut dans les années 1970 et 1980 l’auteur d’une belle série de films à la fois rentre-dedans et sentimentaux (Femmes Femmes, Corps à cœur…), puis chapeauta l’une des bandes les plus secrètement fertiles du cinéma français (la « Diagonale »), avant de trouver un nouveau souffle dans les petites productions maison en numérique, est animé d’un tel appétit qu’il a tourné pas moins de cinq films entre 2015 et 2018. Les Sept Déserteurs et Train de vies sont ses deux dernières œuvres…Les Sept Déserteurs réunit dans une clairière, où gisent les vestiges d’une église bombardée, un petit groupe d’hommes et de femmes, militaires et civils éparpillés ayant fui le grabuge d’une guerre laissée hors champ, mais dont les grondements font rage alentour…Le vacarme des bombes, l’imprévisibilité des tirs et des balles perdues cernent les personnages d’une mort imminente, qui accentue paradoxalement leurs effusions de sensualité, la recherche d’une dernière jouissance. Chacun, en se racontant, retrace une sorte d’histoire sexuelle de lui-même, tient la chronique de ses plus profonds désirs…Cela fait bientôt cinquante ans que Paul Vecchiali poursuit une œuvre prolixe et inclassable, nourrie à la fois d’une très haute conception de la mise en scène et d’une écriture populaire, héritée du théâtre comme de ce cinéma français des années 1930, dont il a chanté les louanges dans les deux tomes de son Encinéclopédie (Les Editions de l’Œil, 2011). » (lemonde.fr)

« Comme son titre le laisse entendre, Les Sept Déserteurs… est un film de guerre, mais d’une joie et d’une luminosité inhabituelles pour le genre. Ici, la guerre se joue hors-champ : on ne fait jamais qu’entendre ses grondements lointains, parfois plus proches. Les déserteurs (quatre hommes et trois femmes, dont un anarchiste, un homosexuel, une aristocrate déguisée en veuve de couvent et une servante amoureuse) se rencontrent dans une forêt, à l’automne, où il y a à peine de quoi s’abriter, et se mettent à cohabiter, ce qui va générer toutes sortes de relations entre eux. Le spectateur ne sera jamais informé de la bataille qui se livre au loin. Il ne saura jamais non plus qui tire les coups de feu qu’on entend, ni à qui est la main qui conclut l’intrigue. Ces secrets, le cinéaste français ne les dévoile pas, pour que le spectateur les complète avec son imagination. De fait, son cinéma renvoie toujours à plusieurs réponses, plusieurs significations, plusieurs angles. Vecchiali, en cinéphile fervent, dit qu’il s’est inspiré du Godard des Carabiniers, de Samuel Fuller et des Forçats de la gloire de William A. Wellman, avec Robert Mitchum (1945), mais toute ressemblance avec ces références serait purement fortuite dans le contexte de ce film qui contient un message pacifiste évident. Comme celui de Green, il revendique le texte et la parole littéraire comme éléments fondamentaux de sa poétique, y compris quand il montre quelque chose d’aussi banal et domestique que, par exemple, repasser du linge. L’auteur, toujours ultra libre et indépendant, a composé un scénario riche en rimes, en paraboles et en métaphores, mais aussi en ironie, pour ce film qui louvoie entre la plaisanterie et le jeu, le faux et le critique, l’hédonisme et le plaisir de jouer/d’écrouter, à travers des tableaux, pendant sept jours, sans qu’on ait d’indication sur le temps et le lieu de l’action (pas même à travers les costumes ou les décors ou les accessoires), dans l’atemporabilité et l’abstraction la plus totale. Les Sept Déserteurs ou La Guerre en vrac a été produit par Vecchiali via sa société, Dialectik, qui s’occupe aussi de sa distribution. » (cineuropa.org)

« …Les sept déserteurs est en effet également gouverné par un défi de mise en scène unique, moins séducteur et enclenchant une fiction plus problématique, mais valant ô combien le coup d’œil. Les déserteurs en question sont des hommes et femmes qui, fuyant une « guerre anonyme », sont amenés à cohabiter dans un hameau délabré. Tels les dix petits nègres d’Agatha Christie, tous assisteront à leurs exécutions successives, un tireur demeurant hors champ prenant à l’envi l’un(e) ou l’autre pour cible. Pervers, déroutant, ce principe scénaristique et esthétique consistant à faire tenir la dramaturgie sur la chute annoncée de tous les protagonistes met le spectateur dans une position inconfortable. Nous devenons littéralement les témoins d’une succession (plus que d’un enchaînement cette fois) d’assassinats. L’œil du cinéaste, sa caméra se coordonne au point de vue du tireur invisible, démiurge, attaquant ses cibles sans leur donner jamais la possibilité de se défendre, contre-attaquer. On ne peut en vouloir à personne de sortir alors du film en faisant la moue, mal à l’aise d’avoir assisté à une forme de représentation sadique de la mort au travail.

Ce malaise a le mérite de consolider l’intuition que Vecchiali, du haut de ses 88 ans, est l’un des cinéastes français en activité les plus risque-tout. Depuis le magnifique Nuits blanches sur la jetée (2014), qui, s’il introduisait pour la première fois le duo Adverbe-Cervo, annonçait comme la renaissance d’une œuvre privée d’exploitation en salle depuis A vot’ bon coeur (2004), Vecchiali semble tourner au plus près du seul désir d’interroger le cinéma dans toutes ses composantes. S’entourer de la même équipe (acteurs et techniciens sont à peu près les mêmes depuis cinq films), traiter frontalement de la mort (la sienne dans Le Cancre, celle de ses acteurs dans Les 7 déserteurs) ou de l’amour (Nuits blanches, C’est l’amour, Train de vies), s’autoriser, comme dans ces deux derniers films, à faire tenir un récit sur un dispositif transparent et immuable, c’est avant tout persister à croire que faire du cinéma, c’est mettre en place une situation donnée… » (blogspot.com)


Présentation du film et animation du débat avec le public : Josiane Scoleri.

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N’oubliez pas la règle d’or de CSF aux débats :
La parole est à vous !

Entrée : 7,50 € (non adhérents), 5 € (adhérents CSF et toute personne bénéficiant d’une réduction au Mercury).

Adhésion : 20 €. Donne droit au tarif réduit à toutes les manifestations de CSF,  et à l’accès (gratuit) au CinémAtelier.

Nouvelle activité : Atelier de Super 8 sous la direction de Vincent Jourdan. Initiation gratuite réservée aux adhérents la Samedi 5 janvier 2019 à 14h à la Maison des Associations de Nice-Baribaldi.

Voyage découverte à la Cinémathèque de Berlin et Potsdam le week-end du 8-9 juin 2019.
Toutes les informations sur le fonctionnement de votre ciné-club ici


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