Monty Python: Le sens de la vie


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Jeudi 09 Février 2012 à 20h30 – 10ième  Festival

Cinéma Mercury – 16 place Garibaldi – Nice

Film de Terry Jones et Terry Gilliam – Royaume-Uni – 1983 – 1h47 – vostf

Les vieux employés d’une compagnie d’assurances se révoltent contre les jeunes loups qui les asservissent. Telle est la séquence d’ouverture de cette satire loufoque sur l’existence, de la vie à la mort, en passant par la religion, le mariage, la guerre…

Notre critique

Par Josiane Scoleri

Le Sens de la Vie, dernier film en date des Monthy Python en tant que collectif, est peut-être le plus déjanté de leurs longs-métrages. La structure à sketches qui rappelle leurs premières émissions pour la BBC du temps du Flying Circus permet de déconnecter davantage encore les épisodes, d’autant plus qu’il n’y a pratiquement pas de fil narratif, comparé à la recherche du Graal ou à la vie de Jésus qui servaient de prétexte aux deux précédents longs métrages. Ici la seule cohérence tient au déroulement de la vie humaine, de la naissance à la mort, le choix des étapes intermédiaires étant de toute façon des plus loufoques, sans oublier le court-métrage qui sert de prologue et qui n’a bien sûr rien à voir avec la suite. Mis à part qu’il résonne aujourd’hui, près de 30 ans plus tard, avec une acuité inouïe au vu de ce qu’il est convenu d’appeler l’actualité. Nos six compères en profitent évidemment pour régler leurs comptes au passage à la plupart des institutions, (l’Université, l’Église, la Médecine, le Sport, ou encore la très glorieuse armée britannique, etc..) et tordre le cou aux idées reçues et à tout ce qui peut constituer de près ou de loin « les bonnes manières », au tout premier rang desquelles, bien sûr, le fameux « No sex please, we’re British ». La leçon d’éducation sexuelle ou la « Chanson du Zizi » version crooner bien élevé sont non seulement des moments hilarants du film, mais font d’autant plus mouche qu’ils dégomment à l’artillerie lourde ce puritanisme anglo-saxon qui est encore et toujours le véritable ciment de la société britannique. Car, de toute évidence, si tous les films et le moindre des sketches des Monty Python sont immédiatement devenus des oeuvres cultes au Royaume-Uni, c’est qu’ils appuient là où ça fait mal. Nous sommes dans la satire salutaire, où la dérision sert de révulsif, le plus souvent violent et où le burlesque permet de faire passer la pilule avec notamment l’utilisation presque systématique du travestissement. Les Monty Python sont irrésistibles dans les rôles de femmes et leur seule apparition à l’écran suffit à provoquer l’hilarité et à mettre les spectateurs dans leur poche. Le ressort comique demeure inusable.

Chaque sketch apporte bien sûr sa contribution à l’entreprise de démolition générale qui est le véritable objet du film. Le parallèle entre l’entrainement sportif (élèves contre profs où tous les coups bas des forts contre les faibles sont permis) et l’entrainement militaire ne fait pas non plus dans la dentelle, surtout quand on sait à quel point la pratique d’un sport collectif est considéré aujourd’hui encore comme un indispensable outil de formation, de structuration de la personnalité jusque dans les universités les plus prestigieuses du monde anglo-saxon ( et 4 des Monty Python viennent de « Oxridge »). Ici le sport sert à apprendre à faire la guerre. Camp contre camp, la loi du plus fort en bandoulière. Exit le fair-play. Ne reste que le non moins fameux flegme britannique passé lui aussi à la moulinette du ridicule. On le voit, personne n’en sortira indemne. On pourrait croire que le trait est parfois tellement gros qu’il est impossible de prendre le propos au sérieux. Notamment le couple de prolos irlandais (catholiques, évidemment) et leur centaine d’enfants qui vont finir non pas à l’orphelinat (nous ne sommes plus au XIXème siècle), mais dans les labos d’expérimentation médicale !!! Et bien détrompez-vous. La République d’Irlande, plus papiste que le Vatican, a interdit le film en salles jusqu’à aujourd’hui et n’a autorisé que très récemment la sortie en DVD. La chanson «Chaque goutte de sperme est sacrée », à entendre évidemment comme un véritable hymne à la capote, est elle aussi un bon exemple du style Monty Python : des paroles décapantes, une mise en scène « comédie musicale » avec de plus en plus de figurants et une chorégraphie classique qui rappelle la tradition britannique toujours très vivace du music-hall. Il faut dire à ce propos que les scènes chantées qui ponctuent chacun des épisodes rivalisent en invention, en drôlerie, en jeux de mots féroces, le politiquement incorrect étant la seule règle qui vaille. Mais n’allez pas croire que seuls les piliers traditionnels de la société soient attaqués : le capitalisme libéral nouvelle manière et la société de consommation en prennent aussi pour leur grade. N’oublions pas que nous sommes au début des années 80 qui furent de surcroît au Royaume-Uni les premières années du gouvernement de Mme Thatcher. À ce titre, le court-métrage de Terry Gilliam qui ouvre le film avec l’improbable victoire des vieilles assurances « Cramoisies » sur un Wall Street futuriste est un pur moment de jubilation : le rythme s’accélère de plan en plan, les gags sont de plus en plus délirants. Tous les types de comiques sont mis à contribution et l’attaque de la «Very Big Corporation of America » rejoint en audace les sommets de la scène finale d’Une Nuit à l’opéra. Terry Gilliam, le seul américain du groupe, a bien retenu la leçon des Marx Brothers.

Quant à la société de consommation, la scène du restaurant et le repas de M. Creosote (la créosote fut un produit miracle de l’ancienne pharmacopée britannique et de l’industrie alimentaire) sont d’une outrance à peine soutenable et l’obèse finit par littéralement exploser : à bon entendeur, salut. Tout aussi bien vu, la dénonciation du tourisme organisé, une espèce de non-sens où M. et Mme Tout le Monde ne voient que du feu (dans la série « plus c’est gros, mieux ça passe » : les pseudo-danses traditionnelles, les soi-disant coutumes locales ou, encore plus fort, l’illusion de la culture « plus toc tu meurs »). La mort enfin, l’inéluctable, l’inexplicable, celle dont on dit qu’elle donne justement sens à la vie. Et bien ici, foin de faux-semblants ou de conversations intellos, c’est par la malbouffe qu’elle adviendra. Vingt ans avant la vache folle et les OGM, les Monty Python avaient déjà tout compris. José Bové devrait penser à les embaucher pour le prochain démontage de McDo et c’est vrai qu’on les verrait bien en faucheurs volontaires !! Monthy Python contre Monsanto, ce serait une sacrée affiche !! Et vu que le groupe a décidé de se reformer pour une nouvelle aventure, voilà un sujet pleinement à leur mesure, ou plutôt à leur démesure. Nous essaierons de transmettre cette suggestion à qui de droit. Nous verrons bien l’accueil réservé à une proposition des Frenchies.
Zygomatiquement vôtre,

Sur le web

Lord Delfont était « not amused ». Le boss de la puissante major EMI n’avait guère l’habitude de gérer les affaires courantes, mais là, un beau jour de février 1978, il a bien dû s’y coller en lisant un scénario. Le scénario d’un film que son entreprise était sur le point de produire. Les décors étaient construits, les billets d’avions étaient réservés pour les acteurs et l’équipe de tournage. Seul le scénario posait problème, du moins aux yeux de Lord Delfont, qui le trouvait obscène, blasphématoire et ne voulait en aucun cas qu’EMI soit associée à ce genre de production. Deux jours avant le début du tournage, il retirait son financement.

Le film obscène en question n’était autre que La vie de Brian des Monty Pythons. Son sauveur apparu sous les traits d’un ex-membre des Beatles, George Harrison, qui en assura le financement à lui seul. On dit qu’il aurait payé le ticket de cinéma le plus cher du monde. Quant à Lord Delfont, les Monty Pythons l’ont immortalisé à la fin de La vie de Brian, avec leur célèbre chanson Always Look on the Bright Side of Life.

L’année où l’homme posait le pied sur la lune, quatre Anglais, un Gallois et un Américain firent leurs débuts à la télévision, avec un humour radicalement nouveau pour le quotidien cathodique de l’époque. Le 5 octobre 1969, la BBC diffusait une émission au titre aussi absurde que débridé, Monty Python’s Flying Circus. Lors de leurs premières interviews, on demanda souvent aux six membres de la troupe qui parmi eux pouvait bien être ce « Monty ». Or le nom, tout comme le contenu de l’émission, n’était qu’une libre association dénuée de sens. Le principe de la série était de donner l’impression de ne pas avoir de principes, même ci ce format d’à peine une trentaine de minutes devait se conformer à quelques règles.Monty Python’s Flying Circus innovait comme jamais en mélangeant sketchs, courtes séquences filmées et parodies de quiz ou des talkshows.

And now for something completely different: c’est avec ces mots que John Cleese, sagement assis derrière son bureau, annonçait le sketch ou la séquence filmée à venir dans Monty Python’s Flying Circus. Un gimmick de génie que de passer du coq à l’âne grâce aux annonces de Cleese ou aux cartoons hilarants de Terry Gilliam. Bientôt, on ne parle plus que d’eux en disant les Pythons. Entre John Cleese l’égocentrique, le conciliant Michael Palin, l’impulsif Terry Jones, l’excentrique Eric Idle, Graham Chapman le charmeur fantaisiste et Terry Gilliam, toujours prêt à en découdre, le groupe réunit six individualistes, qui entre eux, étaient tout sauf des enfants de chœur. Ils se connaissaient de leurs études à Oxford ou à Cambridge et avaient déjà travaillé dans d’autres productions à la télévision. Avant tout, ils étaient concurrents, et allaient le rester. John Cleese résumera plus tard leur état d’esprit qui consistait à souhaiter toute la réussite possible aux l’autre, du moment qu’ils ne vous font pas d’ombre…

La renommée dont bénéficie de nos jours l’humour anglais dans le monde entier est en grande partie redevable aux Monty Pythons. A la fin des années 60, interrompre un sketch avec la précision laconique qu’il est vraiment trop stupide était un geste révolutionnaire. Les Monty Pythons n’ont cessé de déjouer les attentes d’un public pour qui une blague est composée d’une exposition et d’une chute. A la place, un sketch pouvait très bien tenir en 44 variétés de fromages différents. Les Pythons faisaient fi des tabous, même la famille royale était la cible de leur dérision. Ils appartenaient à une génération, qui, après la Seconde Guerre mondiale, avait du mal avec l’autorité sous toutes ses formes et ne manquait pas de la brocarder sans retenue. L’humour des Pythons trouve ses racines dans une certaine forme de divertissement radiophonique. Il doit aussi beaucoup à la culture de ses membres :Flying Circusmontre ainsi que l’on peut chanter Proust en canon ou interpréter Emily Brontë avec des drapeaux de signalisation. Les Monty Pythons pratiquent un humour élitiste à double sens, bêtement absurde, volontiers potache avec de grandes ficelles, mais jamais mainstream…

Lorsque la télévision allemande diffusa en 1972 un épisode de Monty Python’s Flying Circus, les téléspectateurs réagirent de manière plutôt épidermique. Alfred Biolek, une légende de l’audiovisuel outre-Rhin avait fait venir la troupe en Allemagne. Mais le pays de Goethe et Schiller n’était pas encore mûr pour les Monty Pythons… En Angleterre,Flying Circus fut diffusé de 1969 à 1974, soit 45 numéros en tout. La première incursion au cinéma des Monty Pythons date de 1974, avec Monty Python : Sacré Graal, une parodie des légendes arthuriennes. Une quête d’ailleurs mouvementée car le premier jour du tournage, la caméra tombe en panne, tandis que Terry Jones et Terry Gilliam se disputent le titre réalisateur. Quant à Chapman, qui jouait le rôle d’Arthur, il était en phase de sevrage alcoolique…L’argent provenait de groupes de rock comme Led Zeppelin ou Pink Floyd, pas de quoi rassembler un budget royal pour autant. Et comme il n’y avait pas assez d’argent pour se procurer des chevaux, on décida d’entrechoquer des moitiés de noix de coco. Le génie de l’improvisation était à l’œuvre pour l’un des gags les plus réussis du film. Place en 1980 à Monty Python : La vie de Brian, à ce jour le meilleur film de la bande, avec sa célèbre scène finale et son chœur des crucifiés. Le film ne s’en prend pas à Dieu, Jésus ou la religion mais aux faux prophètes et aux soumissions aveugles. Monty Python : Le sens de la vie  sort en 1983. Un film à épisodes souvent de mauvais goût qui traite du sens… ou du non sens de la vie. Après, les Monty Pythons firent tous une carrière en solo.

L’aventure Monty Python s’achève définitivement avec la mort de Chapman, la veille du vingtième anniversaire de leurs débuts à la télévision, soit le 4 octobre 1989. Lors des commémorations officielles, les cinq survivants apparurent avec les cendres de leur comparse dans une urne.

En 2009, quatre des cinq Pythons encore en vie étaient présents sur la scène du Royal Albert Hall. L’occasion de reprendre le tube Always Look on the Bright Side of Life, où il est dit avec beaucoup d’ironie que les producteurs de Brian ne rentreront jamais dans leurs frais : Bernie, I said, they’ll never make their money back. Précisons que « Bernie » n’était autre que Lord Bernard Delfont. Quelques années après la sortie du film, il s’est retrouvé dans le même avion que George Harrison. Le guitariste n’a pu s’empêcher de faire parvenir un petit mot de remerciement à « Bernie ». Là encore, Lord Delfont était « not amused ».

(Pour ARTE MAGAZINE : Volker Bleeck, auteur de « Kommen wir nun zu etwas etwas völlig anderem – 40 Jahre MONTY PYTHON« )

Terry Jones vient d’annoncer le retour des  Monty Python sur les écrans avec le tournage d’une parodie de film de science-fiction: Absolutely Anything (Absolument n’importe quoi); Les extra-terrestres qu’incarneront les Monty Python captureront un terrien pour lui donner le pouvoir de faire «absolument n’importe quoi».Ce film réunira John Cleese, Michael Palin et Terry Gilliam, sous la direction de Terry Jones. Eric Idle reste encore à convaincre. Seul à manquer à l’appel, Graham Chapman, décédé en 1989.Le tournage doit commencer dans les prochains mois en Grande-Bretagne.


Présentation du film et animation du débat avec le public : Josiane Scoleri

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