Vendredi 08 Février 2008 à 15h30 – Spécial Inde
Cinéma Mercury – 16 place Garibaldi – Nice
Film de Mehboob Khan – Inde – 1958 – 2h48 mn- vostf
Grande fresque populaire et patriotique sur les conditions de vie des paysans. La lutte de Radha pour survivre, son amour pour ses enfants et pour sa terre, prennent une dimension nationale et se transpose en image de l’Inde luttant pour sa survie après l’Indépendance.
Notre critique
Par Philippe Serve
En 2003, une enquête menée auprès de 25 des plus grands cinéastes indiens actuels rendait un verdict sans ambigüité : Mother India, plébiscité, était élu plus grand film indien de l’Histoire. Qui s’en étonnera ? Depuis près d’un demi-siècle, le film de Mehboob Khan représente le sommet indépassable du genre le plus dominant car le plus populaire du sous-continent : le film hindi (ou hindoustani) devenu au cours des années 70 « Bollywood« .
Aventures, (mélo)drame, comédie, saga, métaphore politique, l’éternelle Mère-Inde et ses incontournables fils à l’opposé l’un de l’autre (le « gentil » et le « méchant« , une vraie tradition du côté des studios de Bombay) et, bien sûr, tout son lot de chansons et de danses dans un tourbillon de couleurs, il y a tout et encore plus dans Mother India. Près de trois heures d’un spectacle au souffle épique emportant tout sur son passage, à l’image des éléments naturels déchainés faisant plier mais jamais rompre la courageuse, l’admirable, l’exemplaire Radha !
Profondément politique, Mother India ne tourne certes pas toujours le dos à la grandiloquence. Il enfile parfois de gros sabots démonstratifs, soulignant tel ou tel effet de manière dramatique au cas où le spectateur n’aurait pas bien compris le message délivré. Mais ce ne sont là que broutilles et cet improbable croisement entre Autant en emporte le vent (pour l’irrépressible souffle) et tant d’œuvres soviétiques des années 20 (surtout signées Dovjenko) finit par enlever la mise. On comprend, en le voyant, pourquoi 172 millions d’Indiens (sur une population alors de 350 millions !) firent un triomphe à ce film à sa sortie… et continuent à le célébrer sans relâche depuis. Mais aussi pourquoi son aura a très vite dépassé les frontières du pays, chaque nouveau public le découvrant en un quelconque point du globe lui réservant toujours un chaleureux accueil. Inspiré d’un roman de Pearl S. Buck (situé en Chine) et remake de son propre premier grand film, Aurat (1940), le Mother India de Mehboob fut le premier film indien nominé aux Oscars et rata la statuette d’une voix au troisième tour face aux Nuits de Cabiria de Fellini.
Si les paysages naturels de l’Inde frappent par leur splendeur (tourner en extérieurs était encore très rare à l’époque et le film marqua une grande avancée), si les compositions musicales du grand Naushad, toutes magnifiquement interprétées, notamment par la merveilleuse Lata Mangeshkar, enchantent toujours autant l’oreille et ne sont jamais plaquées à l’action mais la soutiennent et la renforcent (louons aussi la grande qualité des paroles des chansons), si les chorégraphies sont parmi les plus belles du cinéma Bollywood, si l’utilisation du procédé couleur Gévacolor tient toutes ses promesses et ne cède jamais le pas au kitsch (si souvent présent dans les films Bollywood), la performance d’actrice de Nargis reste, elle, inoubliable.
Alors âgée de 28 ans, l’interprète de Radha avait rencontré la gloire en 1949 avec Andaz, énorme succès de Mehboob Khan. Son naturel et son authenticité révolutionnèrent le jeu des actrices indiennes à un point tel qu’il n’apparaît pas abusif de parler d’un « avant » et d’un « après » Nargis (on dira de même pour la chanteuse Lata Mangeshkar qui double ici Nargis, comme elle le faisait déjà dans Andaz). Le couple que forma l’actrice (sur et hors écran) avec l’immense acteur-réalisateur Raj Kapoor – qui la dirigea également dans une quinzaine de ses propres films – hante encore la mémoire de tous les Indiens et fait partie intégrante de la légende du cinéma hindi. Mais Raj Kapoor refusant de divorcer de son épouse, Nargis épousera un autre acteur : Sunil Dutt, son… fils dans Mother India, acteur (et futur ministre) qui lui sauva littéralement la vie pendant le tournage du film en la sortant des flammes dans une des plus spectaculaires séquences du film qui faillit bien mal tourner… Ils restèrent unis jusqu’à la mort de Nargis, survenue en 1981 d’un cancer. En 2000, Nargis fut élue en Inde plus grande actrice du millénium.
Présentation du film et animation du débat avec le public : Philippe Serve.
Merci de continuer à arriver suffisamment à l’avance pour être dans votre fauteuil à 20h précises.
N’oubliez pas la règle d’or de CSF aux débats :
La parole est à vous !
Entrée : 7,50 € (non adhérents), 5 € (adhérents CSF et toute personne bénéficiant d’une réduction au Mercury).
Adhésion : 20 €. Donne droit au tarif réduit à toutes les manifestations de CSF, ainsi qu’à toutes les séances du Mercury (hors CSF) et à l’accès (gratuit) au CinémAtelier.
Toutes les informations sur le fonctionnement de votre ciné-club ici