Mulholland Drive



Vendredi 08 novembre 2002 à 20h45

Cinéma Mercury – 16 place Garibaldi – Nice

Film  de David Lynch – USA – 2001 – 2h26 – vostf

A Hollywood, durant la nuit, Rita, une jeune femme, devient amnésique suite à un accident de voiture sur la route de Mulholland Drive. Elle fait la rencontre de Betty Elms, une actrice en devenir qui vient juste de débarquer à Los Angeles. Aidée par celle-ci, Rita tente de retrouver la mémoire ainsi que son identité.

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A Hollywood, durant la nuit, Rita, une jeune femme, devient amnésique suite à un accident de voiture sur la route de Mulholland Drive. Elle fait la rencontre de Betty Elms, une actrice en devenir qui vient juste de débarquer à Los Angeles. Aidée par celle-ci, Rita tente de retrouver la mémoire ainsi que son identité.

La Mulholland Road est une longue route sinueuse bordée par les montagnes californiennes des environs de Los Angeles. D’Hollywood aux canyons de Bel Air, elle offre un panorama imprenable sur Beverly Hills ainsi que tous les studios mythiques du cinéma américain. David Lynch, en véritable amoureux de Mulholland, a confié que cette route dégageait quelque chose de mystique et d’irréel lorsque la nuit tombe.

A l’origine, Mulholland Drive devait être le pilote d’une série, et devait être diffusé sur la chaîne ABC. Cette première version de 1h59 a été coupée pour passer à 1h30. Lorsque sa diffusion télé a été annulée et qu’une sortie en salles a été décidée, David Lynch a dû tourner de nouvelles séquences. Le montage initial récupéré, le film est passé à 2h26.

L’idée du scénario de Mulholland Drive est venue à l’esprit de David Lynch alors qu’il était en plein tournage de Twin Peaks. Il s’est notamment inspiré de l’un des personnages féminins de la série, Audrey Horne (Sherilyn Fenn), pour développer celui de Betty (Naomi Watts).

«…Tout droit sorti de l’imaginaire onirique de Lynch, Mulholland Drive est une illusion dans laquelle nous nous projetons avec l’envie et la maladresse de nos premières fois. Et même si le film est à consommer comme dans une phase de sommeil paradoxal, groggy et juste bercé par les impressions, on ne peut s’empêcher de chercher une route à suivre et une suite logique. Et même si la dernière phrase du film « Silencio » nous intime l’ordre de nous taire, il nous faut d’abord tenter de démêler le ruban de Moebius. A priori, le film nécessite plusieurs visions, plusieurs lectures ; ce qui conduit inévitablement à une foule de déclinaisons bigarrées et d’interprétations qui trouveront souvent leurs justifications. Mulholland Drive regroupe une foule de genres cinématographiques, qu’il mélange pour en extraire un milk-shake détonnant. La première partie du film qui voit les deux héroïnes se lancer à la poursuite de la mémoire de Rita (Laura Elena Harring) a tout de l’intrigue policière. Ce qui se trame autour d’Adam Kesher (Justin Theroux), le réalisateur, est du même acabit. Démêlés Hollywoodiens où la vie des acteurs par projection narcissique se confond avec les rôles qu’ils cherchent à interpréter. Et tous, dans ce manège, ne sont que les pions d’un puzzle manipulé avec dextérité par le nain de Twin Peaks. C’est alors la découverte d’un corps dans une maison abandonnée, un corps en décomposition. Un jeu de transformisme homosexuel où l’autre n’est que l’image d’un soi déformé par le désir d’être au devant de la scène. Enfin deux spectatrices d’un club où rien n’est joué pour de vrai. Une boîte bleue qui inverse la donne, le genre, l’histoire et qui la démêle avec violence. Lynch nous laisse entrevoir, la vision d’un monde fantasmé par une jeune femme en perte de sens. Rêves de gloire, d’une magnifique folie qu’enferme le magicien réalisateur dans la boite noire essentielle à la captation d’image du réel, pour les laisser s’échapper d’une boite bleue en laissant à chacun l’inventivité triangulaire essentielle à l’ouverture à de pareilles interprétations fantasques.

Le film n’est en fin de compte qu’une éternelle réinterprétation de lui-même comme l’était Vertigo. Les deux films intimement liés, partagent la même rupture narrative. En son milieu, le film de Lynch s’arrête pour un plongeon dans l’inconnu fantasmagorique d’une boite bleue portant en elle, la réalité bien moins reluisante que celle du rêve, du désir parfois, souvent sexuel. Pas de doutes, on est chez Lynch. Vertigo lui aussi tombait en son milieu dans un vertigineux trou noir amenant à son paroxysme le désir de désir du protagoniste. Chaque scène de ces deux chefs d’œuvres fonctionne par l’annulation de la précédente. La deuxième partie s’imbriquant ainsi dans la première par la simple annulation de la précédente. Lorsque Betty se prépare à passer un casting, elle est atroce. Plus tard vient la vraie audition dans laquelle elle est magnifique et nous livre en grand moment de cinéma dans le sens classique du terme. Cette scène ne fait que contredire la précédente et appuie la rupture entre désir et réalité. « Don’t play for real until it gets real » Le réalisateur donnera cette phrase en guise conseil à la jeune actrice. Mais c’est aussi un message de David Lynch au spectateur qui ne serait pas encore tout à fait immergé dans cet état d’inconscience créé par l’esprit tortueux du cinéaste.En effet, Mulholland Drive est un film cinéphile qui catalyse beaucoup de films antérieurs à sa sortie. On peut y voir outre l’influence Hitchockienne, celle du Mépris, les deux films traitant du cinéma se closent sur le mot « Silencio » et traitent tous deux d’une rupture amoureuse douloureuse avec une femme idéalisée. Celle de Sunset Boulevard, les deux films critiquant avec férocité l’industrie Hollywoodienne – et ce jusqu’à la folie schizophrène d’un des personnages – dont l’horreur sous jacente est sublimée. Celle de Kiss Me Deadly etc… Autant de chef d’œuvres dont Lynch s’imprègne sans – excepté pour Vertigo – tomber dans la citation ou la redite. Mais le film en dehors de sa lourde ascendance magnifiquement gérée, a engendré une descendance importante dans le cinéma depuis lors. On peut penser à Apichatpong Weerasethakul, entre autres…

…Lynch nous étourdit jusqu’au sommeil et nous abandonne encore une fois de plus dans un lit de velours bleu où seuls les rêves, comme une expérience sensorielle, peuvent exister.

Fonctionnant avec les mêmes techniques de montage et de surimpression que les premiers films de Méliès. Mulholland Drive en en fin de compte un pur objet de fascination qui nous intime à lâcher prise et à laisser ainsi l’esprit s’évaporer dans les hautes sphères ou vogue celui de Lynch. C’est là tout le génie du cinéaste. Il n’en dira pas plus. Tant mieux. Nous non plus. Reste juste une émotion palpable et la capacité des esprits à s’imprégner d’une ambiance inoubliable et d’un cinéma rare et précieux d’où jailli l’émotion la plus pure amenant au bouleversement ultime.

Soit, il fallait essayer juste une fois de jeter un minuscule faisceau d’analyse artificielle sur une des œuvres les plus déroutantes de l’histoire du cinéma…» (lepasseurcritique.com)

«…Ce film est un des plus authentiques chefs-d’œuvre du septième art, obscur objet de l’inconscient, catalyseur des peurs primales enfouies au-delà de la scène primitive freudienne, monstre visuel aussi protéiforme que le « green-eyed monster » shakespearien, la jalousie, vecteur de cette histoire d’amours tragiques, d’amours déçues, de décisions fatales et de rêves amers…Mulholland Drive est un mélange d’Othello et de Macbeth. tout entier construit sur la jalousie, le meurtre et le remords. Et pris comme tel, il apparaît comme une des plus formidables évocations du poète élizabéthain…Mulholland Drive nous conduit sur des routes complexes faites pour nous ramener au départ, tout en nous montrant l’arrivée terminale, celle qui détruit les corps, et tout cela par l’opération d’une technique de cinéma rarement égalée et d’un raffinement pervers.  Mulholland Drive fait partie des chants désespérés, qui, comme on le sait, sont les plus beaux pour Musset, chants de mort et chants d’amour, qui s’aventurent dans les contrées ténébreuses traversée par la route de notre vie. On aura beau chercher toutes les interprétations que l’on voudra, et souligner les incohérences ou les paradoxes, il restera malgré tout cette fulgurance que constitue ce film, un des rares à autoriser plusieurs visions, ce qui amène à chaque fois de nouvelles lectures. Éternel retour, oui, mais aussi éternel cheminement, tortueux et frustrant comme la route nommée Mulholland Drive a pu apparaître aux personnages de l’histoire…» (critikat.com)

David Lynch retrouve pour Mulholland Drive Angelo Badalamenti, son vieux collaborateur qui, depuis Blue Velvet en 1986, a écrit toutes les musiques de ses films. Le compositeur fait même une courte apparition dans le café au tout début du film.

Le dernier mot prononcé dans Mulholland Drive est « Silencio« , tout comme dans Le Mépris de Jean-Luc Godard.

Mulholland Drive est dédié à Jennifer Syme, une jeune actrice dont l’histoire est étonnamment semblable à celle du personnage de Betty (Naomi Watts).

Les scènes de la version téléfilm de Mulholland Drive ont été tournées en 1999 pour 8 millions de dollars. Les scènes supplémentaires, spécialement adaptées pour le cinéma, ont quant à elles été tournées un an plus tard, pour un budget de 7 millions exclusivement financé par Studio Canal. Le budget total du film s’élève donc à 15 millions de dollars.

Mulholland Drive a obtenu le prix de la mise en scène à Cannes en 2001 et remporté le César du meilleur film étranger en 2002.


Présentation du film et animation du débat avec le public : Philippe Serve.

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