Le Prince Nezha triomphe du Roi Dragon



Dimanche 10 octobre 2004 à 14h30 – 2ième Festival  2004

Cinéma Mercury – 16 place Garibaldi – Nice

Animation  de Wang Suchen – Chine – 1979 – 1h05 – vostf

L’épouse de Li Jing, commandant de la garnison de la Passe Chentang, met au monde une boule en forme de fleur de lotus. Le mari fend la boule d’un coup d’épée. Il en surgit un bel enfant qui n’est pas plus grand que l’ongle d’un pouce. Le génie Tai Yi vient féliciter les parents, choisit l’enfant comme disciple et le nomme Nezha. Celui-ci offre à Nezha deux armes magiques : un cerceau symbolisant le ciel et la terre et une écharpe. Quand le petit garçon a 7 ans, il doit affronter son premier monstre, un démon de la mer dont la mission est de voler des garçons et des filles pour les offrir à son maître le Roi Dragon…

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Le cinéma d’animation chinois, totalement sinistré pendant la Révolution Culturelle, a dû attendre jusqu’en 1976 pour faire sa réapparition. C’est en 1979 que Shuchen Wang réalise son premier dessin animé en scope, Le Prince Nezha triomphe du roi dragon, film fantastique pour enfants. Ce film d’air, d’eau et de feu, riche de références à la mythologie et aux contes chinois, est fascinant à plus d’un titre, par sa naïveté et pourtant sa quasi-abstraction. Par opposition aux décors généralement monochromes, épurés, les personnages et objets en action sont traités splendidement par la précision et la finesse du dessin.

Le Prince Nezha triomphe du Roi Dragon est inspiré d’une légende de la mythologie chinoise. Nezha est l’un des Dieux les plus populaires en Chine, défenseur des volontés divines et protecteur des hommes.

Héros populaire chinois, Nezha n’a pas seulement inspiré le film d’animation Le Prince Nezha triomphe du Roi Dragon mais s’est exporté dans d’autres pays asiatiques, notamment au Japon où le personnage a eu sa propre série de mangas (« Hoshin Engi« ). Il a aussi inspiré le personnage de Nataku – nom japonais de Nehza – dans la série de mangas adaptée aussi en version animée, avec Saiyuki (2000).

 » Le Prince Nezha triomphe du Roi Dragon est un film historique. Plus pour ses circonstances de création que pour ses qualités propres. Il marque le réveil des studios d’animation de Shanghai après la Révolution culturelle. Si des tentatives ont lieu dans le courant des années 1970 (quelques courts métrages dont, en 1973, Le Petit clairon de Wang Shuchen que co-signe Nezha), il faudra attendre la chute de la Bande des Quatre pour assister à un redémarrage réel. Nezha est ainsi un symbole de l’Histoire chinoise et joue consciemment de cette position. Relire aujourd’hui la presse française de l’époque (le film a tout de même eu les honneurs d’une sélection cannoise Hors Compétition) s’écharner à sur-défendre ou enfoncer le film a quelque chose de comique (et force peut-être à un petit peu d’humilité) tant ce Nezha n’en demandait pas tant.

S’inspirant d’une partie du roman L’Investiture des dieux (dynastie Ming, XVIe-XVIIe siècle), le film conte l’histoire de Nezha, fils de général et chargé de protéger les hommes contre l’oppression. Il affronte ici le règne tyrannique des dragons des quatre océans qui sèment la terreur auprès de la population en enlevant des enfants et s’arrogeant le territoire marin. L’analogie avec la défaite de la Bande des Quatre (quatre proches de Mao, dont son épouse, placés à des postes stratégiques de 1973 à 1976) toute récente semble évidente. Le film dresse le portrait de dirigeants despotes et met en avant une histoire de rébellion contre le tyran et contre l’obéissance aveugle à ses règles. Mais paradoxalement, Le Prince Nezha triomphe du Roi Dragon sonnerait presque par moments comme une mise en garde aux nouveaux gouvernants : le jeune Nezha goûte lui-même aux risques de la tyrannie par un usage excessif de ses instruments de justice et la découverte d’une volonté de puissance. Point trop n’en faut : l’ambition est très louable sur le papier mais le scénario est tout à fait rudimentaire.

L’essentiel du charme du film tient alors à son traitement graphique. Tiré d’un ancien roman, le film s’inspire aussi fortement des arts visuels. Les dragons sont issus des représentations traditionnelles, le palais du Roi Dragon fait immanquablement penser à la Cité interdite et c’est tout le décor, traité en frise, qui fait appel à la peinture chinoise, voire à l’estampe japonaise dans le générique et l’introduction (le souvenir de la Grande Vague d’Hokusai, 1830-1831). Mais c’est surtout le comique inattendu qui fait le sel du film et fait passer la pilule d’un scénario parfois franchement bancal (et des dialogues d’un anachronisme douteux). Le Roi Dragon de l’Est a les expressions et la puissance comique d’un De Funès dans Fantômas et la surréaliste séquence du banquet marin avec ses animaux musiciens (requins guitaristes, poulpe percussionniste et ballet de tortues), outre une inspiration probable pour La Petite Sirène de Disney (Ron Clements et John Musker, 1989), est à proprement parler inoubliable.

« Même les dragons doivent respecter la vie et non la détruire. » La morale et l’ambition sont claires dans un film guère inoubliable en lui-même mais dont la place dans l’Histoire fait de lui un objet de curiosité et d’intérêt. » (iletaitunefoislecinema.com)

Le Prince Nezha triomphe du Roi Dragon a été présenté lors de la 33e édition du Festival de Cannes en mai 1980. Il y était dans le cadre de la sélection officielle mais hors compétition.


Présentation du film et animation du débat avec le public : Philippe Serve.

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