Sorry We Missed You



Vendredi 06 décembre 2019 à 20h30

Cinéma Mercury – 16 place Garibaldi – Nice

Film de Ken Loach – Royaume Uni – 2019 – 1h40 – vostf

Ricky, Abby et leurs deux enfants vivent à Newcastle. Leur famille est soudée et les parents travaillent dur. Alors qu’Abby travaille avec dévouement pour des personnes âgées à domicile, Ricky enchaîne les jobs mal payés ; ils réalisent que jamais ils ne pourront devenir indépendants ni propriétaires de leur maison. C’est maintenant ou jamais ! Une réelle opportunité semble leur être offerte par la révolution numérique : Abby vend alors sa voiture pour que Ricky puisse acheter une camionnette afin de devenir chauffeur-livreur à son compte. Mais les dérives de ce nouveau monde moderne auront des répercussions majeures sur toute la famille…

Notre article

par Josiane Scoleri

En français, on dirait plutôt : «Nous sommes passés, mais vous n’étiez pas là». Le titre du film de Ken Loach, reprenant l’avis de passage laissé par les livreurs à domicile, signifie en fait «Désolé, nous sommes passés au mauvais moment». Ce n’est pas innocent. Cette petite phrase de rien du tout suffit à renverser la situation et transfère nécessairement la faute, puisque faute il doit y avoir, du côté du livreur. Le titre, à lui tout seul, annonce clairement la couleur ! Il est bon de se rappeler, lorsqu’on parle de Ken Loach, à quel point il est l’héritier du Free Cinema et des Angry Young Men des années 50. Même passion de l’approche documentaire, même proximité avec les «vrais gens», même engagement affirmé haut et fort, même tendresse pour ceux qui souffrent. Sorry, we missed you est précisément de ce tonneau-là. Et c’est un très bon cru! Nous voici donc propulsés dans une famille typique de ce qu’on appelle en Angleterre, la «lower middle-class». Le père, la mère qui tirent le diable par la queue avec leurs deux enfants, tout en rêvant de propriété privée (merci Mme Thatcher!). Il ne saurait certes plus être question de «working class» par les temps qui courent…  Ken Loach et son scénariste Paul Laverty nous brossent un tableau d’une extraordinaire précision, fourmillant de détails qui sonnent juste, servis par quatre acteurs dont on oublie qu’ils jouent, tant nous vivons littéralement avec eux pendant toute la durée du film. Le rythme est vif, sans temps mort, à l’image de notre époque, ivre de vitesse, ou plutôt accro à la vitesse et à la performance. Et chacun sait qu’il vaut mieux ne pas se lancer distancer sous peine de couler corps et biens. La grande habileté de Sorry, we missed you consiste à dérouler son scénario à la fois dans cette nouvelle organisation du monde du travail où Ricky, le protagoniste, est soit disant son propre patron, libéré des contraintes du salariat, et en même temps, au cœur de la famille elle-même, où toutes les relations, jusqu’aux plus intimes, vont se voir bouleversées par l’irruption de ce nouveau gagne-pain. Abby, la mère, est au régime «contrat zéro heure», mis en place déjà du temps de Tony Blair. L’inventivité de la novlangue est, on le sait, sans limite. L’image est sobre, comme toujours chez Ken Loach qui ne s’embarrasse pas de fioritures. Le cinéma n’est pas là pour enjoliver le réel, mais bien pour nous le faire toucher du doigt et des tripes. Cela dit, l’image n’en reste pas moins très travaillée, et particulièrement la lumière. Paul Laverty a tenu a rendu hommage au chef opérateur, Robbie Ryan, pendant  la conférence de presse à Cannes et ce n’est que justice. Lumière froide de l’entrepôt amazonien à l’image des relations de pouvoir entre le gestionnaire et les livreurs. Clair-obscur protecteur du foyer, où les membres de la famille essaient tant bienque malde se retrouver. Jusqu’à la chevelure rousse du père et de la petite fille qui accrochent les reflets du soleil et suffisent à nous dire la complicité entre les deux. C’est à ce genre de «détails» que nous voyons à quel point un film de Ken Loach, loin d’être filmé à la va vite, est au contraire pensé de bout en bout.

De même, la mise en scène d’une simplicité apparente, s’avère d’une efficacité redoutable. On pourrait citer entre mille, la scène de l’embauche où Ricky et Gavin, avec son physique de légionnaire, sont assis face à face, ce qui suffit à créer une égalité fallacieuse entre les deux hommes, au diapason du langage utilisé pendant l’entretien, tout aussi manipulateur. («Tu ne travailles pas pour nous, mais avec nous», «On ne parle pas de travail, mais de mission», etc..). Ou encore, la scène où Ricky emmène sa fille avec lui pendant une tournée. Ce qui pourrait passer pour un jeu entre eux, un sprint à qui arrivera le premier, sert tout autant à montrer que les livraisons doivent nécessairement se faire au pas de course pour tenir le timing…etc, etc…

Mais là où le film est particulièrement réussi, c’est dans la peinture du tissu familial, mis à mal dans toutes ses composantes. Le père trop exténué pour jouer son rôle face à son fils adolescent à la dérive. (la scène de taggage au nez et à la barbe des flics est un modèle du genre qui rappelle la grande époque de Riff Raff et de Raining Stones). La mère harassée qui essaie tant bien que mal de sauver les meubles tout en préservant la dimension humaine de son travail auprès des personnes âgées. (Debbie Honeywood, pour la première fois à l’écran, tout simplement formidable). Les enfants tout d’un coup perdus face à ce manque de repères. Et même si l’histoire de la clef peut sembler un artifice de scénario, elle reste plausible, au vu des circonstances. De fait, le film va crescendo au fur et à mesure que l’étau se resserre, avec une montée en puissance dramatique qui ne va pas se démentir.

Certains, parmi la critique parisienne, font la fine bouche et trouvent que Ken Loach filme sur des rails. Personnellement, je trouve qu’ici l’efficacité ne nuit pas à l’émotion, comme ça a pu être le cas, dans certains films plus démonstratifs de Ken Loach. Au contraire. Les situations, comme les personnages, sont prenants et d’une justesse absolue. Et même si on sait dès la première minute que Ricky court à la catastrophe, on s’attache au film et à ses péripéties. Comme le dit Ken Loach,un film doit vous donner envie de passer du temps avec les personnages. Et dans le cas de Sorry, we missed you, le contrat est largement rempli. Et si ça marche si bien, c’est très certainement aussi grâce à cette tendresse omniprésente que le réalisateur lui-même ressent pour ses personnages. Malgré toute la dureté de la situation, la caméra reste tendre avec ces êtres malmenés par la vie. Il y a autant de respect et de dignité chez Ricky et Debbie que dans la manière de filmer et de raconter. C’est en cela que le cinéma de Ken Loach est précieux. Une telle empathie est devenue rare, dans la vraie vie et par conséquent au cinéma aussi. C’est en cela que Ken Loach semble parfois d’une autre époque. Un peu comme Guédiguian chez nous. Mais il ne s’agit pas de nostalgie. D’ailleurs, dans les deux cas, ce sont des cinéastes où l’acuité du regard sur l’évolution de la société contemporaine est implacable.Ils ont l’avantage de connaître l’Histoire et de cultiver la mémoire. Ça aussi, ça fait la différence dans notre époque amnésique. Avec Sorry, we missed you, Ken Loach a déclaré qu’il voulait faire un film qui fasse naître de la colère chez le spectateur. La colère est très présente dans nos sociétés aujourd’hui, mais en général, elle retombe comme elle est venue. Ken Loach parle d’une colère durable et active. Il est réconfortant de penser qu’avec ses 86 ans et près de 50 ans de carrière, nous avons là un cinéaste qui croit toujours au pouvoir du cinéma.

Sur le web

Sorry We Missed You est écrit par Paul Laverty, collaborateur familier de Ken Loach puisqu’ils ont travaillé plus d’une quinzaine de fois ensemble. Le script est né de bribes d’histoires que Laverty a trouvé dans ses carnets. Alors qu’il préparait Moi, Daniel Blake, Ken Loach s’est rendu compte de l’augmentation des travailleurs indépendants ou intérimaires et qu’il y avait matière à faire un autre film : « C’est une nouvelle forme d’exploitation. Cette économie des petits boulots, comme on l’appelle, […] la main-d’oeuvre précaire, n’ont cessé d’être au coeur de mes discussions quotidiennes avec Paul Laverty ». Quant à la productrice Rebecca O’Brien, l’engouement suscité par Moi, Daniel Blake lui a donné l’impulsion de faire Sorry We Missed You : « Je crois que beaucoup de gens avaient peur de parler de l’humiliation que le système leur fait subir. Le film leur a permis de sentir qu’ils n’étaient pas seuls dans cette situation« .

Pour Ken Loach, l’exploitation est vieille comme le monde, ce qui a changé c’est l’implication de la technologie moderne, qui permet par exemple à un client de suivre à la trace son colis : « C’est un équipement hautement sophistiqué, avec des signaux qui rebondissent sur un satellite, quelque part. Le résultat est qu’une personne se tue à la tâche dans une camionnette, allant d’un point à un autre, de rue en rue, se démenant pour répondre aux exigences de cet équipement…les chauffeurs livreurs, comme Ricky (le héros de Sorry We Missed You ), sont contrôlés avec un appareil électronique qui indique où ils sont, ce qu’ils font, s’ils ont livré en temps et en heure chaque personne. Ils n’ont pas besoin d’un patron de la vieille école pour leur dire de travailler dur. L’appareil – son pouvoir de contrôle – fait le boulot à sa place. Ces nouvelles technologies devraient profiter à tout le monde. Mais elles ne sont pas utilisées dans ce but.« 

Le scénariste Paul Laverty a effectué des recherches pour le film mais a rencontré quelques difficultés : les chauffeurs étaient réticents à l’idée de témoigner par crainte de perdre leur emploi et les dépôts étaient difficiles à pénétrer. Il a toutefois réussi à rassembler des informations grâce à un homme qui travaillait dans un dépôt voisin de là où le film a été tourné.

Sorry We Missed You offre à Kris Hitchen son premier grand rôle au cinéma. Plombier durant vingt ans, il décide de se lancer dans la comédie à l’âge de 40 ans avec l’accord de sa femme, qui a dû travailler plus afin de mettre leur famille à l’abri. C’est grâce à son agent qu’il passe une audition pour le film : « J’ai cru que j’avais foiré, mais on m’a appelé pour d’autres essais. Alors j’ai mis le paquet – on n’a qu’une chance, non ? Après, tout est allé très vite. J’ai reçu un appel – je me souviens que je venais juste de me faire payer pour des chaudières« .
Ses partenaires à l’écran se sont eux aussi mis tardivement à la comédie : Debbie Honeywood est assistante de vie scolaire et Ross Brewster est officier de police.

Le tournage a eu lieu à Newcastle durant cinq semaines et demi : « Nous voulions que le paysage urbain de Newcastle soit présent dans le film, sans que ça ressemble à des images touristiques, pas uniquement pour montrer la ville. Je pense qu’on a un sens du paysage : on voit les vieilles terrasses, les immeubles et le centre ville, avec son architecture classique » explique Ken Loach.

Le film a été présenté en compétition au Festival de Cannes 2019.

« …Sorry We Missed You s’ouvre sur un entretien d’embauche. Ainsi, à l’inverse de Moi, Daniel Blake, le rôle-titre de son précédent film, Ricky Turner ne va pas devoir affronter une perte d’emploi mais bien l’acquisition d’un nouveau job. Il est dès lors d’autant plus intéressant de découvrir comment le cinéaste parvient à faire de ce point de départ, à priori positif, la source d’une série d’ennuis, voir même d’un cercle vicieux tout aussi destructeur que les situations qu’il avait déjà pu croqué au cours de sa carrière.

Les compromis que Ricky et sa femme Abbie doivent faire pour cumuler deux emplois et ainsi rembourser leurs dettes et nourrir leurs enfants, en dit long sur le regard que Loach porte sur le marché du travail actuel. Soit, comment, sous couvert d’un semblant de liberté, les employeurs ne font que renforcer la précarité, et donc l’asservissement, de leurs salariés. C’est tout un système qui se voit pointer du doigt à travers les conditions de travail au demeurant inhumaines des deux personnages : le système UBER. Ainsi, il apparaît que Ken Loach a parfaitement su moderniser son regard sur le sujet depuis Riff-Raff qui, en 1991, dénonçait déjà la façon dont le patronat imposait sa mainmise sur la classe ouvrière. Les acquis sociaux que le prolétariat croyaient avoir acquis depuis n’étaient alors qu’une vaste fumisterie.

L’autre sujet de prédilection de Loach reste la jeunesse, et on le ressent dans le travail qu’il opère dans la représentation des relations chaotiques entre Ricky et Seb, son fils de 16 ans. En pleine crise d’adolescence, le gamin en arrive à ébranler le socle familial. La grande problématique du film est alors de s’interroger sur le fait que les difficultés que traversent les Turner sont bien la conséquence de la précarité économique à laquelle ils sont confrontés. Le fait que leurs conflits internes viennent souvent du comportement de ce fils qui se sent délaissé, leurs difficultés financières apparaîtront au final comme un ciment qui viendra renforcer leur solidarité. Ainsi, Ken Loach nous démontre à sa façon que même si l’ultralibéralisme a rendu le marché du travail toujours plus contraignant, la priorité doit rester la famille, qui reste un élément bien plus difficile à gérer qu’il n’y paraît. Sans atteindre la virulence politique d’un It’s a Free World ni la délicatesse d’un Sweet Sixteen, le cinéaste de 82 ans signe une œuvre touchante et surtout qui sait allier des thématiques universelles à un contexte parfaitement contemporain. » (avoir-alire.com)

« Du haut de ses 82 ans et de ses deux Palmes d’Or (Le vent se lève et Moi, Daniel Blake), Ken Loach revient pour cette 72ème édition du Festival de Cannes avec Sorry We Missed You. Alors que l’Europe est bouleversée par des révolutions politiques internes, et si les questions du Brexit ou des Gilets Jaunes n’en sont peut-être qu’une conséquence indirecte, Ken Loach évoque la problématique plus insidieuse de l’ubérisation de la société.
Sorry We Missed You dénonce les rouages d’un esclavagisme moderne, plus pervers car donnant un sentiment illusoire de liberté. Cumulant les heures de travail, Ricky et Abby dépassent largement le seuil légal de la journée de 8h, pour enchaîner les clients. Ken Loach dresse le portrait d’une lente déshumanisation, où le salarié n’existe qu’à travers son profit. Une déshumanisation à deux temps, à la fois pour les salariés, contraints d’enchaîner les services à une rapidité folle, que pour les client.e.s, devenu.e.s de simples numéros. Abby, aide à domicile pour personne âgée, n’a jamais le temps de s’attarder sur ses patients, réduits malgré eux au statut de client, qu’elle laisse à contre-coeur dans leur solitude une fois avoir franchi le seuil de la porte. Si les noms d’Amazon ou encore Zara sont explicitement visés, le film fait également état d’une ubérisation totale et absurde de la société, touchant y compris le milieu hospitalier, où les urgences deviennent une grande usine qui brasse ses patients-clients à une vitesse démesurée.

Portrait désespéré d’une société qui va toujours trop vite, Sorry We Missed You fait entrecroiser l’histoire intime et celle plus large de tout un pays, à travers la lente implosion du cercle familial. Dans sa première partie film capte les derniers instants d’humanité d’une société en plein péril. La famille devient alors l’ultime refuge face à la robotisation : si la journée de travail est difficile, Ricky et Abby chérissent leur amour pour rester souder. Mais cet amour, aussi fort soit-il, va être mis à l’épreuve par l’ardeur du travail. La fatigue et l’absence vont progressivement ronger la vie privée, jusqu’à l’effacer totalement. Véritable pilier de la société, au sens aristotélicien, la famille n’en est que le miroir : si elle va mal, la société ne peut qu’aller mal. Si le titre fait référence aux avis de passage laissés pendant une livraison, Sorry We Missed You est à prendre au sens littéral : Ken Loach raconte l’absence d’un père, aliéné dans son travail, qui manque à sa famille. La cadette endosse malgré elle le rôle de parent, tandis que son frère, multiplie les bêtises pour attirer l’attention de son père jamais présent… » (lebleudumiroir.fr)

« Tourné à Newcastle, dans le nord-est de l’Angleterre, le nouveau film, poignant, de Ken Loach a la puissance et la terrible efficacité d’une lame. Pas un détail, pas un dialogue, pas une situation n’est superflue. Ce cinéaste en colère et indigné filme à l’os, dans le dur. Venu du documentaire, avec le soutien de son fidèle scénariste, Paul Laverty, il persiste à dénoncer un état du monde intolérable qui a trouvé dans l’ubérisation le modèle idéal. Tout est juste, saisissant, implacable, dans cette description acérée de la détresse et des nouvelles formes de la misère sociale. Après les banques alimentaires dans Moi, Daniel Blake, Ken Loach enfonce le clou. Dans un pays, la Grande-Bretagne, qui n’en finit pas de payer les pots cassés du thatchérisme, laboratoire d’un capitalisme dérégulé, il ajoute, à 83 ans, une nouvelle pièce au dossier d’accusation.

Si l’écriture du scénario et le choix sourcilleux des acteurs assurent les fondations d’un bon film, une fois encore, Ken Loach et Paul Laverty posent une solide architecture narrative, avec les scènes humoristiques et de tendresse que sait toujours ménager leur cinéma, politique et empathique. Et le jeu impeccable des comédiens – Ricky (Kris Hitchen, plombier de son état, devenu acteur sur le tard), Abby (la si touchante Debbie Honeywood), Seb (Rhys Stone, au jeu plus subtil que son irritante rébellion de façade), Liza Jae (Katie Proctor, bouleversante de fragilité) et l’implacable Maloney (fascinant Ross Brewster) composent cette variation XXIe siècle, en version plus tragique, des Temps modernes.» (la-croix.fr)

« …ce film s’impose comme une évidence pour dénoncer la dérive de notre monde moderne, pour qui le travailleur n’est plus un être humain, mais un objet interchangeable qui doit rapporter et ne rien coûter…Sorry we Missed You dénonce l’uberisation de notre société contemporaine, régie par un cynisme absolu et la quête du profit, dans laquelle le travailleur poussé à bout devient son propre bourreau. La dialectique du maître et de l’esclave mise à jour par Hegel, et développée par les penseurs marxistes après Karl Marx, est devenue maintenant une réalité quotidienne qu’on ne peut pas ne pas voir et que, pourtant, tout le monde feint de ne pas voir…Il y a vraiment urgence à dénoncer aujourd’hui ce qu’on pourrait appeler, en paraphrasant La Boétie, la servitude volontaire…Le film est un constat implacable, magnifiquement mis en scène et interprété, du monde du travail actuel où l’homme s’asservit continuellement en croyant se libérer et c’est bien là la perversité de l’horreur économique. Cette horreur économique déjà dénoncée par Viviane Forrester dans un ouvrage éponyme et magistral mais qui, depuis hélas, a pris de nouvelles formes encore plus terribles, Ken Loach la dénonce à son tour en s’emportant lors de sa conférence de presse à Cannes : «Désormais c’est le travailleur qui doit s’exploiter lui-même». » (iletaitunefoislecinema.com)

« Selon l’état d’esprit avec lequel on l’aborde, Sorry We Missed You sera révoltant ou déprimant. Peut être un peu les deux. Révoltant car Loach y traduit une fois encore une situation ubuesque mais réaliste qui montre que le monde a perdu tout sens et toute logique. Déprimant car le cinéaste n’a jamais été un poseur de solutions. Ce n’est pas son job. Loach n’est pas un politicien, c’est un artiste qui utilise sa notoriété d’artiste pour exprimer les maux de ses concitoyens. Nos maux. Et ce qu’il montre avec ce nouveau long-métrage, c’est que pour beaucoup, il est fini le temps où l’on vivait sa vie. Désormais, il est davantage question de survivre, de tenir bon, d’éviter de couler, emporté par un système qui réclame toujours plus. Plus d’argent, plus d’obligations, plus de charges à porter. Sorry We Missed You est un uppercut loachien, un portrait terriblement banal et dont cette même banalité est angoissante. Porté par des comédiens d’une authenticité bouleversante, Sorry We Missed You est une énième tragédie individuelle filmée avec la justesse habituelle de Ken Loach. On pourrait avoir l’impression que le metteur en scène se répète inlassablement depuis des lustres. Pas faux. Mais en même temps, il faut bien que quelqu’un répète en boucle ce message-réquisitoire pointant du doigt les dérives d’une société capitaliste devenue assoiffée du sang et de la sueur de ses victimes. Comme Ricky et son job à devenir dingue. Comme sa femme qui s’occupe de personnes âgés et assiste impuissante à une horreur sociale. Ce qui est déprimant ? Plus la société évolue, moins l’humain avance. Et on a vraiment besoin de la voix de Kean Loach pour marteler cette idée désespérante. Faites qu’elle résonne encore longtemps car nous sommes tous les victimes de ce système qui finira bien par collapser. Ce jour-là, il sera sans doute trop tard.» (mondocine.net)


Présentation du film et animation du débat avec le public : Josiane Scoleri.

Merci de continuer à arriver suffisamment à l’avance pour être dans votre fauteuil à 20h30 précises.

Entrée : 7,50 € (non adhérents), 5 € (adhérents). Adhésion : 20 € (5 € pour les étudiants) . Donne droit au tarif réduit à toutes les manifestations de CSF, et à l’accès (gratuit) au CinémAtelier et à l’atelier Super 8. Toutes les informations sur le fonctionnement de votre ciné-club ici


 

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