Le Bannissement



Vendredi 22 Février 2008 à 20h30

Cinéma Mercury – 16 place Garibaldi – Nice

Film de Andrei Zviaguintsev, Russie, Belgique, France, 2006, 2h33 – vostf

Un homme, sa femme et leurs deux enfants, quittent une cité industrielle pour la campagne d’où est originaire le mari et s’installent dans la vieille maison du père de celui-ci. En contraste avec le lieu d’avant (la ville qui enjolive les rapports entre les personnages), le nouveau lieu est donc la Nature, une nature envoûtante. Et personne ne retiendra la main du père levée sur son fils. Aucune voix ne sera entendue, le fils ne sera pas remplacé par l’agneau. Car celui qui brandit le couteau n’entend pas, ses yeux ne voient pas, son cœur est sec. Mais sa foi en la « loi » de la fierté humaine est aussi violente qu’insatiable. Comme n’importe quel film, Le Bannissement parle, quelle qu’en soit la manière, de nous tous : de gens beaux et charitables plongés dans des circonstances tragiques et sans issue.

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Le Retour, premier film d’Andrei Zviaguintsev, avait remporté un grand succès. Il avait été sélectionné dans plusieurs festivals et avait obtenu le Lion d’Or à la 60ème Mostra de Venise. Le réalisateur fait part de son expérience pour ce deuxième film : « Il y a une croyance selon laquelle le deuxième film est toujours un échec, comme une sorte de baisse d’énergie. Mais il suffit de se mettre à travailler pour que tous ces signaux et ces peurs reculent. Le syndrome du deuxième film est un mythe et il faut s’en débarrasser. La seule chose qui puisse te rendre justice est ce que tu fais, c’est-à-dire le film. C’est très exactement pour cette raison que le film est un but – et non le moyen de prouver quelque chose. »

Le Bannissement est une adaptation de la nouvelle de William Saroyan, Matière à rire. Mais le réalisateur précise qu’il n’a pas fidèlement retranscrit cette oeuvre : « Je m’en suis beaucoup éloigné : il suffit de dire qu’aucun des protagonistes de la nouvelle de Saroyan ne reste en vie. J’ai d’abord découvert le scénario qu’Artiom Melkoumian avait adapté de cette nouvelle, qui est peu connue dans l’oeuvre de Saroyan. J’ai ressenti alors quelque chose d’extraordinaire. La langue était très particulière, avec des phrases lourdes, caractéristiques de cette époque qui nous ramène au milieu du siècle dernier. Parfois, les deux frères Mark et Alex (qui se prénomment différemment dans la nouvelle) parlaient dans une langue incompréhensible. C’était de l’arménien, mais j’étais gêné par le fait que, si la langue était définie, on décoderait tout très précisément. Une idée m’est alors venue à l’esprit, celle de les faire parler dans une langue morte – de celles que reconstruisent les linguistes spécialisés. Mais cela aurait pu créer une artificialité exagérée à l’intérieur du film, et nous avons renoncé à cette idée. »

Le film a été tourné en Belgique, dans le Nord de la France et en Moldavie.

Andrei Zviaguintsev explique le choix des acteurs : « Je voulais éviter de reprendre Konstantin Lavronenko après Le Retour, car je ne voulais pas creuser le même sillon, mais je n’ai finalement pas trouvé qui que ce soit d’autre de son niveau. Je voyais au départ Alex plus jeune, mais j’ai compris ensuite qu’il devait être exactement ainsi : la quarantaine passée, quand la moitié de la vie est déjà derrière vous et que l’écroulement de cette vie est vécu de manière bien plus grave. De plus, Konstantin et moi avons la même compréhension de la nature du jeu de l’acteur au cinéma. La rencontre avec Alexandre Balouiev fut pour moi une agréable découverte. Bien qu’il soit célèbre en Russie, il a travaillé sans montrer un quelconque signe de fatigue, acceptant de refaire 19 ou 20 fois la même prise – bien qu’il fût clair que cela ne lui était guère arrivé auparavant. Nous avions, pour le rôle de Mark, fait passer des essais à de nombreux autres acteurs, connus ou non, mais Balouiev s’est finalement retrouvé sans concurrent. »

Le réalisateur commente le choix de cette actrice : « Je l’avais vue dans le film norvégien Dina et avais été stupéfait par l’énergie fantastique qu’elle dégageait. J’ai compris alors qu’il s’agissait d’une nouvelle actrice d’une nouvelle époque. Je ne savais même pas qu’elle était suédoise avant qu’on nous présente à la cérémonie des Golden Beetles de Stockholm et que je voie sa photo parmi les portraits des plus grands artistes du Théâtre royal. Nombreuses furent les actrices russes qui firent des essais pour ce rôle, mais c’est Maria qui l’a eu, bien qu’elle ait dû jouer des scènes très difficiles dans une langue qui lui était étrangère. Tout en conservant sa beauté aérienne, presque diaphane, elle s’est pratiquement métamorphosée en personnage de Dostoïevski – la  » Douce  » de la nouvelle éponyme – et cela correspond à ma vision de l’art. Lorsqu’un acteur essaie de surprendre à tout prix, d’être expressif, cela anéantit le personnage. L’acteur doit vivre la vie du personnage sans se soucier de l’oeil qui l’observe. »

Andrei Zviaguintsev parle de la musique du film : « Le générique final se déroule sur la musique d’une des parties du Kanon Pokajanen d’Arvo Pärt qu’interprète le Choeur de chambre d’Estonie dans la cathédrale de Tallinn. Le texte d’Andreï Kritski est en vieux-slave. Dans le cours même du film, on entend la musique d’Andrei Dergatchev, le compositeur du Retour et ingénieur du son du Bannissement. On entend également Kyrie Eleison et Exsilium en latin. Comme vous le voyez, on a du latin dans le film et du vieux-slave à la fin, mais interprété par un choeur estonien : polyphonie et interpénétration des cultures. »

Présenté en Compétition Officielle au 60ème Festival de Cannes, Le Bannissement a été récompensé du Prix d’interprétation masculine, décerné à Konstantin Lavronenko.


Présentation du film et animation du débat avec le public : Josiane Scoleri.

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