San Mao le petit vagabond



Samedi 02 octobre 2004 à 21h – 2ième Festival  2004

Cinéma Mercury – 16 place Garibaldi – Nice

Film  de Zhao Ming et Yan Gong – Chine – 1949 – 1h55 – vostf

Pour survivre, San Mao, un orphelin d’une dizaine d’années, ramasse des mégots et vend des journaux. Une famille riche l’adopte mais le jeune garçon étouffe dans ce milieu. Lorsque les soldats communistes arrivent à Shanghai en mai 1949, San Mao voit là un moyen de quitter sa nouvelle famille.

Sur le web

 » Petit personnage de l’une des bandes dessinées les plus célèbres en Chine de Zhang Leping avant de s’incarner au cinéma, San Mao est devenu une figure légendaire à laquelle le film de 1949, San Mao le petit vagabond, a donné durablement chair et vie. C’est la première adaptation de la bande dessinée au cinéma, et elle a rencontré un immense succès dès sa sortie. Avec ce film, les réalisateurs Yan Gong et Zhao Ming veulent dénoncer la dégénérescence de la société chinoise et la misère qui en découle. Le film, tourné avec beaucoup d’amour et de compassion pour les pauvres est plein d’humour et de dérision. A cause de la censure, il ne pourra être terminé qu’en août 1949 après la victoire des communistes.

C’est au début de 1948 en effet qu’est lancée l’idée d’adapter à l’écran la bande dessinée de Zhang Leping. La proposition en est faite au studio Kunlun par deux personnalités du théâtre de gauche : Yang Hansheng, également figure de proue du cinéma chinois dès les années 1930, et Chen Baichen, connu pour sa part pour ses pièces de satire politique. Yang Hansheng conçoit une histoire fidèle à la bande dessinée, d’un réalisme sans sentimentalisme, mêlant observation sur le vif et pointes d’humour. Mais son scénario est jugé subversif par la censure du Guomingdang, à deux reprises. La seconde fois, Yang Hansheng, qui est membre clandestin du Parti communiste depuis 1927 et se sent menacé, préfère quitter Shanghai et partir à Hong Kong. C’est donc Chen Baichen qui termine le travail, sans grandes modifications.

Zhao Ming

Le studio confie la réalisation à deux cinéastes, Zhao Ming et Yan Gong, qui, tous deux, commencent leur carrière avec ce film. Chacun lui a apporté sa propre expérience, mais surtout ils ont fait pour le préparer un travail de terrain qui lui donne un caractère de document vécu. Né en 1915, après des études de peinture à Shanghai et des activités d’acteur et de metteur en scène dans une troupe de théâtre pendant la guerre de résistance, Zhao Ming est entré au studio Kunlun en 1947. San Mao le petit vagabond est son premier film.Il a été un temps directeur artistique du studio Mingxing et a développé cette expérience au théâtre pendant la guerre ; c’est sans doute l’un de ses principaux apports. Quant à Yan Gong, né à Nankin en 1914, il a eu à peu près le même parcours que Zhao Ming, lui aussi d’abord metteur en scène de théâtre engagé pendant la guerre et entré à la Zhao Ming Kunlun en 1947. Tout au long de sa carrière, il a surtout réalisé des films pour enfants, avec toujours une note humoristique que l’on retrouve dans San Mao le petit vagabond. Il a surtout une approche documentaire des sujets qu’il aborde.

Le plus difficile a été de trouver le petit acteur qui devait avoir la lourde tâche d’interpréter San Mao. Dans un long article paru en juin 1980 dans le journal DianyingYishu intitulé « Tourner avec des enfants », Yan Gong explique les difficultés rencontrées, et leur solution : « Le personnage principal, San Mao, est sans parents, sans logis, perdu dans le Shanghai d’avant la Libération, victime de toutes les épreuves et humiliations. La lutte pour la survie a forgé son intelligence et son  caractère. Où trouver un jeune acteur qui ressemblerait au personnage dessiné par Zhang Luoping et qui aurait ses traits de caractère ? Au cas où on l’aurait trouvé un enfant de six ans pourrait-il assumer le premier rôle d’un film ? Tout cela nous tracassait. Pour trouver San Mao, non seulement il nous fallait un jeune acteur d’une sensibilité proche de celle du personnage, mais celui-ci devait encore avoir le même âge et la ressemblance… Au bout de six mois, nous avions rencontré des centaines de gamins en faisant le tour de nos relations. Un jour, par hasard, dans la ruelle à côté du studio, je suis tombé sur deux gosses qui en venaient aux mains après une partie de billes. Le perdant ne reconnaissait pas sa défaite, le vainqueur n’admettait pas la mauvaise foi. J’ai tenté de les séparer. Le vainqueur en faisait une question de principe et voulait son dû. C’était une forte tête. C’était décidé, il incarnerait notre San Mao… »

L’enfant s’appelait Wang Longji. Il était en fait le fils du compositeur Wang Yunjie, celui-là même qui a composé la musique du film. Il composera plus tard d’autres musiques de films, dont celle de La véritable histoire d’AQ de Cen Fan qui lui vaudra une invitation au festival de Cannes en 1982. En 1949, il mène une existence misérable de petit prof de musique mal payé, vivant dans une ruelle proche du studio Kunlun. Né en juin 1940, le gamin va très peu à l’école, passe une bonne partie de son temps dehors, avec les garnements du quartier qui, comme lui, dorment sur la paille et crèvent la faim. Un vrai San Mao, sauf qu’il n’est pas orphelin et qu’il a tout à apprendre des dures conditions de vie du vagabond de la bande dessinée et de ses pairs. Il va donc l’apprendre sur le tas, comme il l’a expliqué lui-même à un journaliste qui a retrouvé sa trace et est allé à Shanghai l’interviewer : « Avant le tournage, Monsieur Zhang [Leping] et le réalisateur m’ont emmené dans les endroits les plus pauvres de la ville…. on se serait cru en Inde. Sur le Bund aussi, …  où la plupart des orphelins nichaient sous les ponts. Nous avons sympathisé et ils nous ont raconté comment ils se débrouillaient pour survivre. Le ramassage de mégots, les braseros l’hiver et aussi ce qu’ils appelaient “le dragon qui roule par terre”, des abris de fortune bricolés avec des carcasses de vélos et du papier journal, sous lesquels ils se glissaient et dormaient les uns contre les autres ».

Nullement gêné par le bruit des caméras de l’époque, Wang Longji a le naturel qui sied au rôle. La production commence en octobre 1948. Le tournage se passe en grande partie en extérieur, dans les rues de Shanghai, avec la participation de Zhang Leping. Wang Longji est hébergé avec lui, les réalisateurs et le reste de l’équipe, dans une petite maison près du studio. On lui explique tous les jours les scènes prévues pour la journée, et elle commence par une séance de maquillage : on lui rase le crâne, on lui pose les trois mèches faites de fil de fer et de poils d’animaux, on lui colle un faux nez rond en papier mâché… Wang Longji en gardera une profonde affection pour le dessinateur. Dès le départ, la production rencontre de nombreux obstacles, et des intimidations de la part du Guomingdang. Pour manifester leur solidarité avec les producteurs et réalisateurs, les stars du cinéma shanghaïen offrent leur concours amical en faisant office de figurants, en particulier pour la scène de la soirée de gala, apportant leurs propres toilettes pour décharger la production de ces frais ; on reconnaît nombre de têtes connues, du grand Zhao Dan aux actrices Shanguan Yunzhu, Huang Zongying, et autres. Mais le conflit se rapproche de Shanghai. Le tournage doit s’arrêter. Les artistes cachent la copie. Le tournage ne reprend qu’à la libération de la ville, en mai 1949 ; il est terminé en août. Cependant, la tonalité sombre de la fin du film n’est pas en accord avec l’atmosphère de réjouissances qui règne dans la ville ; impossible de laisser San Mao déambuler comme une âme en peine, seul dans les rues. Les communistes ont vu très vite l’immense potentiel politique du film. Le film est projeté en octobre pour fêter la Libération. Il sort officiellement en décembre et remporte un immense succès.

Présenté hors compétition au festival de Cannes, en mai 1981, premier film sorti de Chine après la Révolution culturelle, il refait régulièrement surface. Il faisait partie de la rétrospective consacrée au cinéma chinois par le Centre Georges Pompidou et la Cinémathèque française en 1984-1985 ; il est depuis lors régulièrement reprogrammé à la Cinémathèque française, ainsi en 2003 lors de l’Année de la Chine en France, et récemment dans le cadre du cycle Shanghai des années 1930 et 1940 (20-30 septembre 2007). Il compte aujourd’hui parmi les grands classiques du cinéma chinois, et occupe à ce titre une place de choix dans l’ultramoderne Musée du cinéma de Shanghai du quartier de Xuhui, berceau historique des studios de Shanghai ; on y projette le film à la demande et on y a même reconstitué une scène entière en grandeur réelle. » (Brigitte Dunzan)


Présentation du film et animation du débat avec le public : Philippe Serve.

Merci de continuer à arriver suffisamment à l’avance pour être dans votre fauteuil à 20h30 précises.

N’oubliez pas la règle d’or de CSF aux débats :
La parole est à vous !

Entrée : 7,50 € (non adhérents), 5 € (adhérents CSF et toute personne bénéficiant d’une réduction au Mercury).

Adhésion : 20 €. Donne droit au tarif réduit à toutes les manifestations de CSF, ainsi qu’à toutes les séances du Mercury (hors CSF) et à l’accès (gratuit) au CinémAtelier.
Toutes les informations sur le fonctionnement de votre ciné-club ici


Partager sur :